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2020 vient de
tirer sa révérence. Les historiens retiendront que jamais année n'a été autant
terrible pour l'Humanité. La pandémie du Covid-19 a touché tous les pays et
territoires du monde, elle a fait fi des distances, des saisons et des
spécificités.
Si les personnes âgées et les porteurs de maladies chroniques sont les cibles privilégiées du SARS-Cov-2 grands et petits, riches et pauvres, dirigeants ou simples citoyens ont été touchés. Le virus n'a pas fait de distinction de sexe, de couleur, de religion, de langue... Le plus étonnant dans cette pandémie est son impact sur les professionnels de la Santé, ceux-ci ont été durement touchés. Le premier médecin victime du Covid-19 est probablement le docteur Li Wenliang, médecin chinois travaillant à Wuhan qui a lancé l'alerte sur l'épidémie et qui est décédé le 7 février 2020. Dans le monde, les pays les plus endeuillés ont enregistré un nombre considérable de contaminations dans le corps de la Santé. Par ordre décroissant, on distingue les États-Unis, le Brésil, l'Inde et le Mexique, la Belgique, le Pérou, l'Italie, l'Espagne, le Royaume-Uni... En Italie, par exemple, les médecins continuent à payer un lourd tribut à la pandémie avec 251 décès depuis le début de l'épidémie, selon un décompte de l'Association nationale de la profession établi à la fin novembre 2020. En Afrique, malgré les déclarations très inquiétantes de l'OMS, la pandémie s'est révélée relativement modérée par rapport à l'Europe et aux Amériques. Ses 54 pays ont tous été touchés par la Covid-19. Selon le Centre pour la prévention et le contrôle des maladies de l'Union africaine, au 1er janvier 2021, le continent africain compte 64.790 décès confirmés et 2.728. 602 contaminations dont 2.280.488 guérisons. Il ne s'agit que de cas diagnostiqués mais comme les examens PCR sont peu disponibles et les cas asymptomatiques très importants, le nombre de contaminations peut être multiplié par au moins 3, mais dans cette éventualité le continent reste moins impacté que prédit par l'Organisation mondiale de la santé. En Afrique, toujours selon le centre dépendant de l'Union africaine, l'Afrique du Sud est de loin le pays le plus touché avec 1.057.161 cas de Covid-19 dont 28.469 décès, le Maroc compte 439.193 cas de Covid-19, dont 7.388 morts, la Tunisie avec 139.140 cas confirmés dont 4.676 décès, l'Egypte 138. 062 cas confirmés dont 7.631 morts, l'Ethiopie 124.264 personnes atteintes du Covid-19 dont 1.923 décès, la Libye 100.744 cas déclarés dont 1.487 morts, l'Algérie 99.610 cas de Covid-19 confirmés dont 2.756 décès, le Kenya 96.458 cas certifiés de coronavirus dont 1.670 morts, le Nigeria 87.607 cas confirmés de coronavirus dont 1.289 morts. Cette classification montre que la pandémie est sortie du contrôle des autorités sud-africaines qui ont dû faire appel aux médecins cubains plus aguerris dans la médecine communautaire. L'Egypte où la situation sanitaire est considérée comme « boiteuse », les chiffres officiels ne semblent pas refléter la situation réelle vécue par ce pays, la même remarque concerne le Nigéria, le pays le plus peuplé d'Afrique. Le corps de la Santé est touché dès le début de la pandémie Au Maghreb, l'Algérie a mieux résisté à la pandémie comparativement à ses voisins et même à la Libye si l'on prend en considération le nombre total de la population. Le premier médecin algérien décédé de Covid est le docteur Tilmatine, médecin généraliste à l'EPSP de Sidi M'hamed, au courant du mois de mars 2020. Le premier médecin marocain décédé au Maroc est une femme, âgée de 53 ans, exerçant à l'hôpital ?Mohammed IV' de Casablanca dont la mort est survenue le 4 avril. Le premier médecin libyen décédé de Covid-19 est le docteur Sadeq Elhowsh, mort le 22 avril 2020 après un séjour de plusieurs semaines en réanimation. Le premier médecin tunisien décédé du Covid-19 est annoncé le 12 septembre 2020, c'est le docteur Slim Gharsallah, médecin délégué travaillant à l'Agence de promotion pharmaceutique en Tunisie. Au 10 décembre, la Tunisie comptait « environ 50 médecins et 300 cadres paramédicaux morts du coronavirus, après avoir été contaminés par leurs patients », a souligné lundi Slim Ben Salah, président du Conseil national de l'Ordre des médecins de Tunisie. L'Algérie compte 150 praticiens décédés de Covid-19 avec plus de 10 mille contaminations dans les rangs des professionnels de la Santé, à la fin décembre 2020. C'est peut être, l'histoire tragique du docteur Wafa Boudissa qui a suscité le plus d'émotion en Algérie. Femme mariée, enceinte de huit mois, elle s'est vue refuser une demande de congé exceptionnel alors qu'elle était prioritaire. Son décès avec le bébé qu'elle portait a été annoncé, le vendredi 15 mai 2020. Dans de nombreux pays, les premiers praticiens touchés par la Covid-19 ont été des praticiens de terrain (médecins généralistes, pharmaciens et chirurgiens dentistes) du fait de leur proximité avec les porteurs de virus et souvent de l'absence de précautions notamment de port d?équipement de protection individuel (EPI). Des professeurs et des chefs de service au nombre des victimes du Covid-19 En Algérie, des médecins de haut rang, des professeurs et des chefs de service, ont été tout aussi durement touchés par la Covid-19. Preuve, s'il en est, de leur implication directe dans les soins donnés aux patients infectés de SARS-Cov-2. Plus de 10 d'entre eux sont décédés et des dizaines de rangs magistraux ont été contaminés. Le Pr. Si Ahmed El Mahdi est le premier de cette longue liste de professeurs qui ont tiré leur révérence en 2020, victime du Covid-19, il est décédé dans le service de chirurgie de l'hôpital ?Frantz-Fanon' qu'il dirigeait à Blida, le 30 mars 2020. Ancien chef de service, à l'hôpital Zémirli à Alger, il avait demandé sa mutation à Blida pour faire de la greffe rénale à l'Institut du rein. Malheureusement, l'Institut a été détourné de sa vocation malgré cela le Pr Si Ahmed a essayé de constituer une équipe autour de lui, laquelle a eu à son actif plusieurs greffes. Sa mise à l'écart en 2017 de la chefferie de service dans le cadre de la décision du ministère de la Santé d'appliquer le seuil de 67 ans aux chefs de service, ne lui a pas permis d'achever son rêve. Il est resté au service comme professeur de chirurgie participant à ses activités jusqu'à ce qu'il soit ciblé par le virus du Covid-19. Le 10 août 2020t, la Covid-19 frappe le Pr Amieur Abderrahmane, chef du service de gynécologie-obstétrique et président du Conseil médical à l'Etablissement public hospitalier de Zéralda (Alger-ouest). Le 13 septembre, c'est le tour du Dr Rachid Lezzar, doyen des gynécologues obstétriciens de l'Est algérien qui succombe au virus. Ancien chef de service d'obstétrique de l'hôpital de Constantine de 1976 à 1985, il avait abandonné la carrière universitaire pour un exercice libre lorsqu'on lui a imposé le nouveau système d'intégration universitaire. Le 3 octobre, le Pr Ahmed Zatout, chef de service de Médecine du travail au CHU de Tizi Ouzou tire sa révérence. Admis le 10 septembre à l'unité de prise en charge des contaminés à la Covid-19, il se battra contre la mort pendant plusieurs semaines avant de mourir à l'âge de 65 ans. Le mercredi 11 novembre, c'est un autre professeur de Tizi Ouzou, M'hamed Melbouci, ancien chef de service de Cardiologie qui avait rejoint le secteur libéral après sa retraite qui meurt à l'âge de 73 ans, tout juste une semaine après avoir été infecté par le coronavirus. Le Pr Chadli Mohamed, ancien chef de service de Neurochirurgie, à l'hôpital d'Oran, retraité et ayant rejoint le secteur libéral à Mohamadia, (wilaya de Mascara) est emporté par la Covid-19 à l'âge de 76 ans. Le 15 novembre, c'est un médecin femme, une spécialiste en épidémiologie, la Pr Zoubida Zaïdi qui est terrassée par le Covid-19. Lauréate du Prix Thomson Reuters, le Pr Zaidi est un médecin chercheur en maladies infectieuses, maladies cardio-vasculaires et cancer, elle a à son actif des dizaines de publications internationales, elle exerçait au CHU de Sétif. Le 21 novembre, le monde médical algérien apprend la disparition du Pr Mustapha Baba Ahmed, chef du département d'Anatomie à la faculté de médecine d'Oran. Le 3 décembre, le Pr Saadi Berkane, chef du service Gastro-entérologie au CHU Mustapha, nous quitte. Ancien chef de service à l'hôpital Bologhine, le Pr Berkane s'est distingué par ses travaux en hépato-gastro-entérologie. Le 9 décembre est annoncée la mort du Pr Hadjadj Aoul Mourad, chef de service de Pneumo-phtisiologie au CHU ?Tidjani Damerdji' de Tlemcen et président du Comité de suivi de l'évolution de la Covid-19 à Tlemcen. Le défunt était âgé à peine de 50 ans. Le 23 décembre dans la soirée, la famille de la Santé est de nouveau consternée par la disparition de l'un des siens. Il s'agit du Pr Mourad Rédjimi, ancien chef de service de Cardiologie au CHU ?Nafissa Hammoud' de Hussein-Dey, ancien sénateur et ancien ministre de la Santé. Le Pr Rédjimi est le premier cardiologue algérien à avoir introduit en Algérie la cardiologie interventionnelle, au CHU Hussein-Dey. Son court passage comme ministre de la Santé, en 2003-04, lui a permis de lancer d'ambitieux projets comme celui d'un hôpital virtuel qui devait être financé par des fonds italiens et qui devait servir de plate-forme connectée sur les principaux hôpitaux européens pour faciliter la formation et la recherche dans les domaines du cancer, de la mère et de l'enfant et des maladies cardio-vasculaires. Il est aussi l'auteur d'un projet de production de prothèses bioélectriques, lequel devait couvrir les besoins nationaux et ouvrir la porte à l'exportation de produits de haute valeur technologique. Son brutal limogeage reste sans fondement, il a mis fin à ces projets et à tant d'autres. Le 2 janvier c'est le tour du M. Mohamed Reggabi, Pr de Toxicologie, ancien doyen de la faculté de médecine d'Alger, de nous dire adieu après une longue lutte contre la Covid-19. Un chercheur, un enseignant et un homme à principes Le pays reconnaissant Face aux grands sacrifices consentis par le corps des professionnels de la Santé, le Premier ministre s'est déplacé au CUH Frantz Fanon de Blida, alors que la wilaya était sous confinement strict, le 30 mars pour marquer sa solidarité avec le corps de la Santé. Le chef de l'Etat a tenu à exprimer personnellement sa sympathie aux professionnels de la Santé en rendant visite à une unité anti-Covid-19 du CHU Béni Messous le 13 avril 2020. L'Etat s'est aussi montré reconnaissant à travers diverses mesures de soutien. Le 31 mats, le Chef de l'Etat annonce, avoir signé un décret « instituant l'octroi d'une prime exceptionnelle au profit des personnels des structures et établissements publics relevant du secteur de la Santé, mobilisés dans le cadre de la prévention et de la lutte contre la propagation du coronavirus. » Le 14 avril 2020, le ministre de la Santé a confirmé une autre décision du Chef de l'Etat, en affirmant que l'ensemble des praticiens de la Santé ayant travaillé deux mois dans la lutte contre le coronavirus « bénéficieront d'une année d'ancienneté dans le calcul de l'âge de départ en retraite, il a de même assuré la suppression du service civil pour les médecins et la prise de mesures incitatives à leur profit pour les inciter à travailler dans les wilayas du Sud.» Le Président a pris en outre une autre mesure en faveur des professionnels de la Santé, elle consiste en «l'institution d'une assurance spéciale, à la charge de l'Etat, en faveur de tous les médecins et autres personnels de la Santé publique, directement concernés par la lutte contre la pandémie». Le président a enfin ratifié un décret portant des amendements au code pénal, infligeant des peines de prison à quiconque agresserait des membres du personnel médical dans l'exercice de leurs fonctions. Il s'agit de « peines de prison allant de 5 à 10 ans à l'encontre de quiconque dont la responsabilité est prouvée dans des agressions, quel que soit le genre, contre le personnel médical. » Appel en faveur de la mise en place d'un mémoriel Le corps de la Santé s'est distingué tant durant la guerre de Libération que depuis la récupération de l'indépendance nationale par ses sacrifices et son engagement pour son peuple et son pays. Il est partie prenante dans toutes les catastrophes naturelles qui ont touché le pays ou épidémies. Il s'est montré disponible dans le cadre des grandes missions humanitaires : guerre du Biafra, guerre d'Angola, Bombardements israéliens contre Gaza et le Sud Liban. Aujourd'hui avec plus de 250 martyrs et des milliers de contaminés, il représente ce qui a été qualifié « d'armée blanche », mobilisée pour lutter contre la plus dangereuse des pandémies que l'Humanité ait connu durant son histoire. Il nous parait utile de suggérer la mise en place d'un mémoriel à Alger, à la mémoire des professionnels de la Santé qui sont morts de Covid-19 et en hommage de tous ceux qui l'ont combattue. *Professeur - Président de la FOREM |
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