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Le prix du pétrole est appelé
à augmenter à 120 dollars et plus...
On constate, aujourd'hui, une éclaircie sur le plan pétrolier. Étrangement, les prix du pétrole ont remonté favorablement, après trois années, exactement, de disette. Peut-on croire que ce sont les stocks commerciaux de brut américains qui sont à l'origine de la remontée des prix ? Ou encore la réduction de la production par le cartel pétrolier Opep ? Ce serait trop facile et trop simple comme ne s'arrêtent pas les médias de le clamer. Non, il existe une cause bien plus grave, il faudrait même dire qu'elle est effrayante cette cause qui est à l'origine. En effet, le 24 juillet 2017, le prix du pétrole Brent était à 48,18 dollars. Le 29 juillet 2017, la Corée du Nord procède à deux tirs réussis d'un missile balistique intercontinental ou ICBM, le Hwasong-14, d'une portée théorique d'environ 10.000 km. « Tout le territoire américain est à notre portée», déclare déjà Kim Jong-Un. En janvier, Donald Trump avait, pourtant, affirmé que la Corée du Nord ne serait jamais en mesure de développer une « arme nucléaire capable d'atteindre le territoire américain ». Il faut rappeler que depuis près de deux ans, la course aux armements et la guerre des mots s'accélèrent. Pour le pétrole, le 31 juillet 2017, le Brent est à 52,40 dollars. (1) Il gagne en deux jours 4,22 dollars. Le 8 août 2017, le président américain Donald Trump riposte. Il promet le « feu et la colère » sur le Nord. La Corée du Nord avertit qu'elle pourrait tirer des missiles près de l'île américaine de Guam, dans le Pacifique. Le 21 août 2017, Washington et Séoul lancent des exercices militaires annuels dits « Ulchi Freedom Guardian » auxquels participaient des dizaines de milliers de soldats sud-coréens et américains. Le Nord, qui considère ces manœuvres comme la répétition d'une invasion, a prévenu Washington qu'il « jetterait de l'huile sur le feu » s'il les maintenait. Le 26 août, Pyongyang procède à trois tirs, relativement, anodins de missiles à courte portée. Le 29 août 2017, la Corée du Nord procède à un lancement d'un tir de missile balistique au-dessus du Japon, un mois après le premier le 29 juillet, jour pour jour. Il n'est pas intercepté par les systèmes antimissiles américains et japonais. Donald Trump affirme que « discuter » avec la Corée du Nord « n'est pas la solution ! ». Le 3 septembre2017, soit 4 jours après, un sixième essai nucléaire qui a provoqué un séisme d'une magnitude de 6,3. Reconnu comme une bombe H, la puissance de cette bombe pourrait atteindre 120 kilotonnes, contre 15 kilotonnes pour celle d'Hiroshima. Le prix du baril de pétrole Brent qui était à 50,69 dollars, le 30 août 2017, passe à 59,03 dollars, le 26 septembre 2017. (1) Il gagne en 27 jours 8, 34 dollars. Le 11 septembre 2017, le Conseil de sécurité de l'ONU adopte de nouvelles sanctions contre Pyongyang, concernant le textile, le gaz et le pétrole. Ce nouveau train de sanctions, le huitième depuis 2006, a été adopté à l'unanimité, avec l'aval de la Chine et de la Russie, les principaux soutiens de la Corée du Nord. De nouvelles sanctions qui n'empêchent pas le président américain d'aller plus loin, encore, dans son escalade verbale avec le leader nord-coréen. Le 19 septembre, lors de son discours à l'Assemblée générale de l'ONU, Donald Trump a menacé de « détruire totalement » la Corée du Nord, qualifiant Pyongyang de « régime vicieux » et Kim Jong-un d' « homme-fusée ». Le 29 novembre 2017, la Corée lance un nouveau type de missile balistique intercontinental (ICBM). Le Hwasong-15, comme il a été appelé, est capable de frapper n'importe où sur le continent américain, annonce Kim Jong-Un. Il ajoute que son pays est devenu un État nucléaire à part entière. Le missile, qui s'est écrasé en mer du Japon après avoir suivi une trajectoire en cloche, pourrait avoir une portée de 13.000 km, une distance inédite pour un ICBM nord-coréen. « On va s'en occuper », réagit le président américain Donald Trump, qui a été informé du tir alors que l'engin balistique était encore en vol. Une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU s'est tenue après ce tir missile nord-coréen qui a rompu avec les précédents par la portée de vol qui égalise, désormais les vecteurs balistiques des grandes puissances. Il est évident qu'avec la maîtrise de la bombe H et des missiles balistiques intercontinentaux pouvant toucher n'importe quel point du territoire américain, surtout que la Corée du Nord affirme avoir réussi à miniaturiser une bombe à hydrogène en ogive portée par un missile ICBM, la situation change totalement pour les États-Unis. Toutes les villes américaines sont menacées. Le 30 novembre 2017, le prix du baril Brent est à 62,45 dollars le baril. Le 3 janvier 2018, il est à 67,82 dollars, le 15 janvier 2018, il est à 70,19 dollars. (1) En 45 jours, il a encore pris 7,35 dollars de plus. Et si on fait le total, depuis le 24 juillet 2017, après les deux tirs réussis d'un missile balistique intercontinental ICBM, le Hwasong-14 et l'essai de la bombe H, le baril de pétrole Brent a pris 21,62 dollars de plus. Pourquoi cette remontée soudaine et de plus en plus rapide du prix du pétrole ? Il est évident que les donnes ont changé pour les États-Unis. Les quantitatives easing ne sont plus prisées, la Fed injecte massivement des liquidités depuis que la Corée du Nord menace de « réduire en cendres l'Amérique ». (9) Il y a péril pour les États-Unis. Cette période rappelle, étrangement, le mandat de Bush junior lorsqu'il a ordonné l'invasion de l'Irak en 2003. Il faut se rappeler que la guérilla irakienne qui s'en est suivie a mis tellement la pression sur les troupes américaines qu'il a fallu des renforts militaires et surtout des capitaux considérables pour financer l'effort de guerre. D'autant plus que l'armée américaine avait fait appel à des armées privées constituées de mercenaires (plus de 130.000 hommes) et qu'il fallait grassement payer. Le cours du pétrole a bondi. De 40 dollars en 2004, il est passé à 80 dollars, en 2006. Il a touché le plafond en juillet 2008, le baril de pétrole a coté 147 dollars. La guerre en Irak, par la violence de la guerre, a été comparée à la guerre du Vietnam. De plus l'enlisement comme au Vietnam a provoqué, indirectement par les subprimes, la crise immobilière et financière de 2007-2008. Comme au Vietnam, les dépenses de guerre étaient telles que le président Nixon a suspendu la convertibilité du dollar en or, en 1971. Et ce, en raison des émissions monétaires ex nihilo pendant des années de guerre. Ce qu'il faut retenir, c'est le paradoxe des émissions monétaires américaines qui fait que le reste du monde, en absorbant les dollars émis par la Fed, finançait à son insu l'effort de guerre américain. Précisément le refus des pays européens d'absorber les dollars sans contrepartie or a amené cette décision américaine de mettre fin à la convertibilité du dollar-or. Un autre point à souligner, la BCE a décidé de diminuer le montant mensuel des QE (rachats de dettes publiques), de mettre fin aux QE en 2018. Ce qui signifie dans un certain sens qu'elle va suivre la Fed américaine. Quant au pétrole, la hausse du prix de pétrole qui est visible, aujourd'hui et peut même aller au-dessus de 80 dollars, voire 90 et 100 dollars, en 2018. Qu'en sera-t-il dans les années qui viennent ? Le prix restera, certainement élevé, et tendra à augmenter. Pourquoi ? Pour la simple raison que la situation géostratégique a changé, complètement, aujourd'hui dans le monde, en particulier pour les États-Unis qui sont menacés directement par le feu nucléaire nord-coréen. Et c'est très sérieux. Un missile balistique nord-coréen ou plusieurs missiles balistiques en cascade avec des leurres, et même avec les boucliers antimissiles THAAD et MDA avec surveillance par satellite américains, peuvent mettre en danger la sécurité des villes américaines. Et doit comprendre ce qui en sera pour des villes comme New York, une mégapole, Washington, le temps de vol d'un missile balistique ICBM est extrêmement court, 30 minutes environ entre le tir et l'impact. On comprend dès lors le rôle de la Fed « dans les injections massives de liquidités pour financer les 60 % de l'armada américaine qui sont en opération et en alerte pour ainsi dire permanente dans les eaux du Pacifique. » Les États-Unis, et ses alliés, le Japon et la Corée du Nord sont véritablement, menacés d'une guerre nucléaire par la Corée du Nord. Et ces injections massives de liquidités vont demander des contreparties productives physiques. Et comme les émissions monétaires ex nihilo n'ont pas de contreparties, c'est la hausse du prix de pétrole qui est facturé en dollar par les pays d'Opep qui absorbera ces liquidités et évitera l'inflation à l'Amérique et au monde. Aussi en 2018, et selon le développement de la crise en Asie, les États-Unis qui sont dans une phase difficile devront se préparer à toute éventualité, ce qui demandera un financement considérable. Et c'est la raison pour laquelle les prix du pétrole resteront élevés, et pour une durée indéterminée dans le sens que la durée peut être longue, et les prix élevés. Si la situation se tend, le prix du pétrole peut dépasser 120 dollars et aller même plus. Ce ne sont pas les États-Unis qui vont décider les prix du pétrole comme ce qui s'est passé pour les QE, mais la conjoncture de crise qui en décidera. Un autre point qu'il faut mentionner a trait aussi aux injections monétaires ex nihilo. C'est la « grande réforme de la fiscalité promise par Donald Trump a été adoptée au Sénat ce mercredi matin [18 décembre 2017]. [...] Il s'agit de la plus grosse baisse d'impôts adoptée aux Etats-Unis depuis plusieurs décennies : les impôts fédéraux sur les sociétés et sur le revenu baisseront dès 2018, ce qui coûtera 1.500 milliards de dollars pour les finances publiques sur la prochaine décennie. Les républicains arguent que cela poussera durablement la croissance au-delà de 3%. Si la baisse d'impôts est permanente pour les sociétés, elle ne durera que jusqu'en 2025 pour les ménages, faute d'accord à long terme. La quasi totalité des Américains paieront moins d'impôts en 2018. » (10) Là encore, une similitude avec une réduction d'impôts de 1.600 milliards de dollars pour 10 ans, en 2001, décidée par Georges W. Bush. Il est évident que cette réduction d'impôts va plomber le budget américain. Dès lors les déficits publics vont exploser. Non seulement les dépenses militaires dans une période critique et indéterminée mais aussi les réductions d'impôts qui vont s'étaler sur dix ans, ce qui va forcément alourdir les déficits budgétaires en 2018 et les années à venir. Là encore, comme du temps de Bush, l'histoire se répète. Les prix du pétrole vont fortement augmenter. Telle est déjà la situation financière en cours aux États-Unis, que l'on constate d'ailleurs doublement par la hausse du prix du pétrole qui a dépassé la barre de 70 dollars, pour la première fois depuis le 3 décembre 2014, voilà 3 ans, 1 mois et 12 jours. Et même si le prix du pétrole baisse légèrement, il est appelé à remonter encore. Pourquoi doublement ? Normalement le taux de change de l'euro devrait se déprécier par rapport au dollar, puisque la Banque centrale européenne injecte chaque mois 30 milliards d'euros dans le cadre du QE. Ce qui signifie que le dollar devait logiquement s'apprécier par rapport à l'euro. Or, c'est le contraire qui se produit. Non seulement le prix du pétrole augmente mais le dollar se déprécie face à l'euro. Depuis juillet 2017, l'euro s'est apprécié par rapport au dollar passant de 1,14 à près de 1,22 dollars pour un euro. La réponse qui explique ce paradoxe est que « la Fed injecte plus de liquidités que la BCE depuis que la crise entre les États-Unis et la Corée du Nord s'est révélée, et a faussé les plans des QE. » Une guerre nucléaire potentielle entre les États-Unis et la Corée du Nord ? Et une guerre qui sera probablement nucléaire fait peur. Ce ne sont plus, seulement, les militaires qui sont en danger, mais surtout les civils. Une guerre nucléaire peut toucher les sites où se trouvent les bases miliaires américaines. Et il existe un grand nombre dans le Pacifique. Les bases militaires dans les îles de Guam, les 28.000 soldats américains stationnés en Corée du Sud, les bases militaires à Okinawa au Japon. Le sous-secrétaire adjoint à la Défense pour l'Asie de l'Est (2015 à janvier 2017), Abraham M. Danemark, qui dirige le programme Asie au Centre International Woodrow Wilson, fait état des forces stationnées : « Cependant, étant donné qu'il y a entre 100.000 et 500.000 citoyens américains en Corée du Sud (et plusieurs centaines de milliers au Japon) à tout moment, cela mettrait un très grand nombre de vies américaines en danger. » (11) En pertes humaines, cet auteur écrit : « Une guerre générale avec la Corée du Nord serait dévastatrice. Un rapport récent du Congressional Research Service a estimé qu'entre 30.000 et 300.000 personnes pourraient mourir dans les premiers jours de combats, même si Pyongyang s'abstenait d'utiliser des armes de destruction massive - un scénario improbable. Selon des documents du gouvernement américain récemment déclassifiés, le Pentagone a estimé, en 1994, qu'une guerre dans la péninsule coréenne tuerait ou blesserait 52.000 soldats américains et plus de 490.000 soldats sud-coréens en seulement 3 mois de combats. Ces chiffres ont presque certainement empiré, au cours des 24 années qui ont suivi, étant donné les énormes progrès réalisés par la Corée du Nord dans le développement d'armes de destruction massive. Aujourd'hui, des millions de vies pourraient être menacées. » Et ces chiffres ont été estimés en 1994, à cette époque, la Corée du Nord n'avait ni de bombe A ni de Bombe H ni de vecteurs balistiques intercontinentales. Le problème est que les villes et les mégapoles américaines sont, aujourd'hui, réellement menacées d'être touchées et les boucliers anti-missiles ne peuvent être fiables, à 100 %. Ce sont donc des millions d'êtres humains qui sont menacés. Aujourd'hui, on ne le dit pas, mais il y a une peur dans les deux camps, et les deux camps risquent de subir ce qui s'est produit au Japon, en 1945. Et ces mots de destruction totale utilisés par Donald Trump rappellent les mots qu'a employés le président américain Harry Truman, après le lancement de la première bombe atomique le 6 août 1945: « C'est la maîtrise de la puissance fondamentale de l'univers. La force d'où le soleil tire son énergie a été libérée pour s'en prendre à ceux qui ont amené la guerre en Extrême-Orient ». Sauf que cette fois-ci « La force d'où le soleil tire son énergie risque d'être libérée pour s'en prendre à ceux qui appellent à la guerre ». Et c'est complètement différent de ce qui s'est passé au début des 1940 ? le monde à cette époque est en guerre. Et aujourd'hui, c'est différent, on appelle «pour s'autodétruire». A suivre... * Chercheur spécialisé en Economie mondiale, Relations internationales et Prospective. Officier supérieur de l'ANP/FN en retraite Notes : 1. «Prix du baril - Le cours officiel du baril de pétrole». http://prixdubaril.com/ 9. « La Corée du Nord menace de « réduire en cendres » les États-Unis », par La Tribune.fr. Le 21 avril 2017. https://www.latribune.fr/economie/international/la-coree-du-nord-menace-de-reduire-en-cendres-les-etats-unis 10. «Après son adoption par le Sénat, la réforme fiscale de Trump est quasiment actée», par Libération avec AFP. Le 19 décembre 2017. http://www.liberation.fr/planete/2017/12/19/apres-son-adoption-par-le-senat-la-reforme-fiscale-de-trump-est-quasiment-actee 11. «The Myth of the Limited Strike on North Korea», par Abraham M. Denmark. Foreign Relations Le 9 janvier 2018 Traduit en français : « Le mythe de la frappe limitée en Corée du Nord » https://www.foreignaffairs.com/articles/north-korea/2018-01-09/myth-limited-strike-north-korea?cid=nlc-fa_twofa |