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Et si Donald Trump accède demain au bureau ovale?
Et si les Américains décident, faute de mieux ou par conviction, d'opter pour
la ligne électorale la plus dure au mois de novembre prochain?
Une seule probabilité certes, mais plusieurs craintes en perspective!
Aussi la question n'est-elle guère, à vrai dire, désormais au stade de
l'hypothèse mais tend ces derniers temps à dominer, de manière surprenante, les
esprits ainsi que les débats dans la blogosphère, les réseaux sociaux, les
rues, etc. Au fil des jours et partout, les chroniqueurs, les éditorialistes et
les leaders d'opinion s'inquiètent de la tournure que pourraient prendre les
présidentielles américaines. Pour cause, la cote de popularité du candidat
républicain, un démagogue invétéré, islamophobe, populiste et aux sorties
médiatiques fracassantes, monte crescendo dans les sondages.
D'ailleurs, les médias à l'échelle internationale ne tarissent pas de commentaires, d'analyses et de pronostics sur ce nouveau phénomène américain surtout avec la dernière vague d'attentats, du reste revendiqués par Daesh, ayant secoué diverses régions de la planète, en particulier l'Europe. Une occasion en or pensent d'aucuns pour que Trump reprenne du poil de la bête et glisse encore davantage dans le registre confus de ses dérives langagières quant à son front d'attaque préféré : Daesh et l'Islam. Un journaliste de New-York Times aurait même comparé récemment Omar Mateen, le tueur de 29 ans à Orlando en Floride à Gavrilo Princip du XXI siècle. Ce dernier n'est, pour rappel, autre que le célèbre nationaliste serbe de 19 ans qui, en assassinant le 28 juin 1914 l'archiduc François-Ferdinand d'Autriche et son épouse à Sarajevo, allume l'étincelle de la première guerre mondiale (1939-1945). L'éditorialiste veut-il insinuer par là que, suite à cette tuerie, Trump parviendra à ressouder les rangs, jusque-là épars, des extrémistes et des conservateurs de tous bords pour précipiter, une fois élu, le monde dans l'incertitude, c'est-à-dire, le gouffre d'une guerre de civilisations? Ou il s'agit seulement d'une prévision pessimiste sur les grandes possibilités qu'a ce dernier pour vaincre sa rivale Hillary Clinton, et nourrir par la suite un climat de tension permanent axé sur le volet sécuritaire, nuisible à long terme aux intérêts diplomatiques et économiques de l'oncle Sam? Ce qui est certain après tout, c'est que «l'effet Mateen» a été un appui moral de grand secours non seulement pour Donald Trump mais aussi, chose encore plus grave, pour toutes les extrêmes-droites européennes, le Front National de Marine le Pen en France en tête. Il a également, peut-être, influé de façon indirecte dans cette histoire du Brexit, spéculent certains analystes. Les Anglais, fidèles à leur tradition insulaire, ont donné un signal fort à la commission européenne, en se désengageant de cette Europe un tantinet encombrante et trop tournée vers la problématique des migrants. Et qui cible les migrants, touchera certainement de plein fouet l'Islam, c'est-à-dire, l'identité de la majorité de ces indésirables victimes ayant fui les feux ardents de la guerre en Syrie, Irak, Afghanistan, Soudan, etc. Celui-ci (l'Islam) est de nouveau au milieu de la tourmente médiatique, en butte à d'atroces et systématiques campagnes de dénigrement. Faut-il le réformer ou simplement réviser la charte d'intégration destinée aux millions de musulmans installés dans les pays occidentaux? Quel est l'impact des politiques interventionnistes menées ces dernières décennies à l'extérieur par les Etats Unis sur leur propre sécurité nationale intérieure? S'agit-il d'une affaire de non-intégration ou de rejet définitif des migrants des valeurs occidentales comme l'expliquent les différents médias très bavards sur cette nouvelle polémique de Floride? Et, enfin est-ce l'Islam qui est violent ou la société américaine? Celle-ci est, d'après le journal Direct Matin, l'une des plus violentes au monde. Pour preuve, en 2014, plus de 33 599 décès par armes à feu ont été enregistrés sur une population de 320 millions d'habitants, contre seulement 6 au Japon (127 millions d'habitants) et ce uniquement à cause d'une législation de port d'armes souple et très permissive. En conséquence, prétendre combattre les cas isolés «les loups solitaires» de la radicalisation djihadiste dans cette atmosphère «militarisée» est extrêmement aléatoire, voire contre-productif! En tout cas, s'il y a un constat à dresser, c'est que les sensibilités dans les sociétés occidentales se sont fragilisées. Et, quoiqu'en difficulté, Daesh tire son épingle du jeu, après des revers militaires subis par ses forces sur le terrain (il aurait, en fait, perdu selon le Pentagone environ 45% de son territoire en Irak et 16 à 20% en Syrie. En Libye, il est même encerclée dans un périmètre de 5 km2 dans son bastion à Syrte!). En revanche, comme acte de représailles, cette mouvance terroriste aurait privilégié dans sa nouvelle stratégie d'expansion transnationale, les attentats à large échelle commis par des «loups solitaires» qui trouvent un malin plaisir à s'en revendiquer avec une facilité déconcertante. Une manière parmi d'autres de glisser un message sibyllin du genre :»Eh mes amis! Regardez de ce côté, je suis là, je vous attends» à l'attention des puissances alliées, dès que les prévisions la donne pour morte. Au fait, Daesh joue au sphinx qui renaît de ses cendres et multiplie les provocations à l'infini vis-à-vis de ses détracteurs pour les amener coûte que coûte sur le champ de bataille. Jusqu'ici, cette tactique a largement porté ses fruits dans la mesure où elle a instillé de la peur chez les opinions publiques occidentales, en reposant à chaque fois la question de l'enjeu sécuritaire comme axe principal dans les joutes électorales présentes et à venir. Et puis, manifestement, Daesh a eu un tel pouvoir séducteur que, même poussé à ses derniers retranchements par les forces alliées et les Kurdes, il se sent toujours repoussé des ailes, en devenant plus que jamais menaçant aussi bien pour les Turcs, les Saoudiens, les Syriens, etc., que pour les Américains et les Européens. Ceux-ci s'initient à une véritable «danse de derviches tourneurs», se contentant de se contempler dans leur narcissisme boiteux, coupé des réalités des choses tandis que la nébuleuse terroriste de Daesh s'emploie à conquérir l'audimat, surfant sur les injustices mondiales pour «booster» son influence même hors de la sphère islamique. Le contexte devient particulièrement délétère quand on sait que le dynamisme de Daesh n'est pas purement territorial mais moral et spirituel (stratégie de «DarIslam» et «Dar-Harb»). L'objectif étant, semble-t-il, de rallier le maximum possible de musulmans vivant en Occident à sa cause (propagande accélérée via l'internet et les moyens technologiques modernes, puis par la peur et la psychose). Mais l'erreur dans tout ça n'appartient-elle pas déjà à ces Américains qui, au début des années 1980, ont forcé les régimes dictatoriaux du Monde Arabe à s'islamiser, en voulant faire d'une pierre, deux coups? C'est-à-dire, au début, abattre à la fois le Nationalisme Arabe et le Communisme Soviétique. Puis, dans un second temps, après la chute de son rival (les soviétiques) maintenir une certaine stabilité géostratégique, en connivence avec ces islamistes-là ayant affaibli «idéologiquement» le courant des nationalistes avant que la roue de l'histoire ne tourne dans l'autre sens (11 septembre 2001). Bref, l'islamisme politique n'a jamais été l'ennemi des Américains! D'abord, les deux ont en commun en matière économique l'amour du libéralisme. Ensuite, dans la lutte tactique, les islamistes détestent les communistes pour leur athéisme dans le domaine religieux et leur collectivisme économique. En même temps, pour baratiner, ils sortent souvent leur grande artillerie rhétorique vantant l'épopée de l'Islam des origines face à des masses galvanisées et remontées contre l'hégémonisme et la domination occidentale. Tantôt, ils traitent l'Oncle Sam et les occidentaux en général de grand Satan, tantôt, ils les affublent de titre de mécréants, ennemis de Dieu et de droit chemin! Par ailleurs, Trump qui avait imputé pendant la campagne des primaires la responsabilité du désastre actuel en Irak et en Syrie notamment à Bush Junior aurait, quelque part, réveillé cette culpabilité-là longtemps tue par la Maison Blanche et les médias mais instrumentalisé par contre ce point sensible de façon caricaturale et dénuée de toute connaissance des défis régionaux (contexte de conflit au Moyen-Orient) et internationaux. Ainsi a-t-il déclaré par exemple qu'il interdirait l'entrée à tous les musulmans aux Etats Unis et qu'il rouvrirait, en plus, les centres de torture, une absurdité phénoménale et inacceptable! En gros, le personnage de Trump est à la fois extravagant, comique et cruel. Et on ne sait pas si cette théâtralisation et ce simplisme dans l'analyse de l'évolution de la géostratégie mondiale donnera davantage d'écho à ses prises de position ouvertement xénophobes ou finira, au contraire, par le noyer dans l'étang des contradictions. En face, Hillary Clinton, bien que soutenue par Barack Obama lui-même et son ancien concurrent Sanders, n'est pas vraiment l'idole des Américains. Les e-mails de l'ex-secrétaire d'Etat révélés par les médias ont grandement participé dans la chute de sa popularité mais les jours à venir sont, sans doute, porteurs de grandes surprises. |
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