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Le festival national du hawzi figure parmi le sujets de
grande préoccupation de la part de l'élite intellectuelle et artistique de
Tlemcen.
Initialement la cité abritait chaque année, pendant plus de vingt années, une rencontre élevée au rang de festival international ayant pour thème « la musique classique algérienne ». Organisée bénévolement par les associations avec l'aide de la wilaya, de l'APC sous l'égide du ministère de la Jeunesse et des Sports, cette rencontre était devenue un espace de rencontres de musiciens, d'historiens et d'hommes de l'art à l'échelle du pays et du Maghreb (un art partagé en commun ). Non seulement des concerts étaient organisés mais, surtout, des animations, des expositions et des rencontres. D'où la réputation qu'il a gagnée à l'échelle de toute la région. Le festival a permis d'élargir le contexte de cette musique et de sauver une bonne partie de sa mémoire poético-musicale grâce à l'enregistrement des concerts et des conférences très enrichissants sur la musique dite andalouse, voire ses diverses traditions de styles et de chants en Algérie. Au-delà aussi de la publication annuelle d'une revue appelée Festival. Le festival de la musique classique fut malheureusement arrêté suite à un décret qui l'annulant ipso facto malgré ses vingt années d'existence. En remplacement on a institué un autre « festival du hawzi ». Les milieux fervents de la musique allaient ainsi réagir de la même manière pour expliquer que le hawzi est de la même école et que, de ce fait, il n'était pas une expression à part et qu'il a toujours fait partie intégrante de la grande tradition très diversifiée à Tlemcen de la Sana'a gharnata. De simples passeurs interprètes érigés en maîtres absolus de l'art musical traditionnel en Algérie ont, d'eux-mêmes, décidé de priver Tlemcen de sa vieille tradition culturelle qui a, depuis des siècles, établi sa réputation de grande école de la Sana'a-gharnata. Pure expression des terroirs grenado-tlemceniens, la Sana'a gharnata est le produit de siècles de création et d'imagination du génie de ses poètes, de ses interprètes, de ses musiciens faiseurs de chants. Une bonne partie de la mémoire est là, incrustée et lisible, à travers les poètes, producteurs de bons mots. La présence de vieux manuscrits attestent de sa très riche bibliothèque. Son rayonnement et son influence partout en Algérie et au Maghreb, dans les milieux musulmans et juifs et au Maroc notamment où la tradition s'est fortement établie depuis, sous le nom de Gharnati. Boudé depuis l'origine, le festival national du hawzi ne cesse à ce jour de nourrir beaucoup d'appréhension de débats dans le milieu des mélomanes et des connaisseurs en matière d'art musical traditionnel. L'andalou en tant que terme générique couvre la diversité des genres et styles qui sont dans son giron. Le genre hawzi en tant que production poético-musicale collatérale fait partie historiquement et génériquement de la même tradition de la musique dite andalouse. De ce fait, le hawzi n'est pas une expression poético-musicale à part. Il est la continuité naturelle d'un art né en Andalousie mais qui n'est pas resté crispé au mythe de Zyrieb (9ème siècle ). Au fil du temps le patrimoine de cette musique s'est constitué un territoire très vaste sans barrières hermétiques. La présence de textes de poètes ayant marqué leur temps depuis au moins le 12ème siècle contredit cette version. L'identification des textes intervenant dans le chant justifie cette thèse. Son corpus est un véritable abrégé de l'évolution de la langue au Maghreb. Il contient des œuvres chantées et musicalisées des œuvres d'auteurs de zadjal (13-14-15ème siècle), ensuite sur zadjal-beldi (15-18ème s.) enfin, du beldi, jusqu'au 19ème s. Cet art, intrinsèquement lié à la poésie, est supposé être un patrimoine d'auteur. Les manuscrits anciens appartenant à des musiciens corroborent cette thèse. La découverte il y a quelques années par l'américain Dwight F. Reynolds, professeur de langue arabe et de littérature à l'université de Santa Barbara en Californie du manuscrit d'un musicien de Tlemcen du XVe vivant du temps du grand poète et médecin de la cour zianide Abi Djamaa Talalissi (né en 1330 à Grenade, enterré à Tlemcen) est là, un document précieux pour montrer que les musiciens anciens chantaient des œuvres citant leurs auteurs. La majorité des poètes classiques dont les œuvres font partie du corpus des chants sont soit natifs ou ayant eu un lien avec Tlemcen la zianide et Grenade la nasride, au Moyen-Age nous citerons Lissaneddine Ibn el-Khatib, Sidi Abou Madyan, Ibn el-Benna, Abi Djama'a? Sidi Abou Madyan, dont l'œuvre est en grande partie incrustée dans la sana'a-gharnata, a dominé la conscience éthique des poètes de son temps et même après, du fait de sa pensée vivante véhiculée par les grands savants qui l'ont suivi depuis et qui ont choisi de finir leur vie près du saint mystique, qui de Bedjai, Tunis, Kairouan, de M'sila?voire entre autres les familles savantes : Maraziqâ, Maqqari, Ressaa ?. Cette musique est témoin de l'évolution de la langue poétique en Andalousie et au Maghreb. L'héritage musical appelé andalou est le résultat des différents âges de sa sédimentation avec une lecture unifiante du patrimoine. L'appellation hawzi est relativement récente. Les musiciens le situent à la périphérie de la sana'a en tant que production majeure du muwaschah et du zadjal. Ce genre était antérieurement désigné sous le nom de beldi. Cette forme de toponymie culturelle apparaissait déjà au 14ème siècle dans le discours de l'historien maghrébin Abdurrahmane Ibn Khaldoun, parlant de Aroud al balad. Les poètes-archétypes de cette typologie poétique et musicale dont Said al-Mandassi tilimsani, Ahmed Bentriqui des 17 et 18e siècle le désignent sous le nom de beldi. C'est là un patrimoine en rapport avec les textes. Le zadjal et le beldi, ces genres à l'aune de cette musique marquent en effet deux nouvelles proximités dans l'évolution poétique de la tradition poético-musicale dite andalouse, un territoire damassée de bourgades poético-littéraires, au carrefour de plusieurs sources, (Beldi-hawzi, Aroubi, Zendani, Medh, Sama'a?) d'un même univers et d'un même décor d'arabesques. La musique dite andalouse fut un vecteur d'influence à la production de ces genres. Les grands poètes populaires Mandassi, Bentriqui, Benmsaib, Bouletbag, Ibn Nâchit dit Zaatan, Bendebbah, Faroui, Benmessaoud, Ibn Nachit, Benhammadi? nés sous le ciel de cette musique à Tlemcen en versifiant à la fois dans le zadjal et le zadjal-beldi entrent dans la genèse de cette musique. Leurs œuvres poétiques, à cheval sur ces deux variantes de productions littéraires et poétiques, sont présentes tant dans la sana'a que le beldi. Le mouvement dit Khlas ou finale, récemment inclus dans la tradition, est essentiellement composé de chants puisés dans l'œuvre des poètes du zadjal-beldi contemporain de la grande école de Tlemcen, berceau de la sana'a-gharnata. Les connaisseurs en matière d'art andalou gardent la nostalgie de cette musique et de son unité. Le public a mal vécu les dernières éditions du festival. En tant que chercheur d'art classique andalou-maghrébin nous joignons nos voix à toutes celles qui s'élèvent aujourd'hui pour souhaiter le retour du festival international sous le label de Festival international de la Sana'a-Gharnata. *Journaliste-écrivain Auteur : - Tlemcen cité des grand maîtres de la musique arabo-andalouse. Dalimen, Alger 2011 . - L'épopée musicale Sana'a-Gharnata. El Hassar Salim et El Hassar Bénali. Ed. P.A.F. Paris, 2016. |
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