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Ouverture des Jeux olympiques à Rio : le seigneur des anneaux

par M'hammedi Bouzina Med

Une première dans l'histoire des Jeux olympiques: la participation d'une délégation d'athlètes réfugiés de guerre sous la bannière de l'Onu. Les JO comme espoir de paix là où la politique et la diplomatie ont échoué.

Les 31èmes jeux olympiques de Rio de Janeiro peuvent-ils donner quelques espoirs au monde à retrouver le chemin de la paix ou du moins celui d'un dialogue qui diminuerait le poids de la violence et des guerres qui se déroulent sous nos yeux? Quel rôle peut jouer le mouvement sportif mondial pour éradiquer la maléfique thèse de « guerre des religions» ou « affrontement des civilisations» diffusée par des intellectuels illuminés et des leaders politiques aussi dangereux que les terroristes qui s'en réclament ? La question faisant le lien entre le sport et la paix semble a priori naïve alors qu'elle est et a été la raison même de l'idée originelle de l'organisation des premiers jeux olympiques, voilà plus de 2800 ans. Dans la cité grecque d'Olympie, Héraclès (Hercule) après avoir réalisé ses «douze travaux» bâti un stade dans le Centre religieux d'Olympie pour rendre grâce à son père Zeus, dit la légende.

Durant des siècles de la période antique, des sportifs venus de tout l'empire grec, puis romain se retrouvent périodiquement pour mesurer leur niveau d'adresse, de puissance et de maitrise de soi dans une ambiance festive de paix et de prières adressées aux dieux pour pérenniser la paix entre les hommes et favoriser le climat pour plus d'abondance dans les récoltes et le commerce. Des chrétiens, des musulmans, des juifs judaïques ou pas, des agnostiques, des bouddhistes, des athées qu'ils soient européens, arabes, asiatiques, africains ou métis se retrouvent aujourd'hui dans ce beau pays du Brésil, à Rio de Janeiro, avec le seul objectif de comparer leurs capacités et limites de l'Homme dans la maitrise de son corps et son esprit. En remettant à jour les J.O. en 1894, le baron Pierre de Coubertin avait le secret espoir que ces rencontres sportives favoriseraient la paix entre les nations marquées par de récentes guerres en Europe surtout.

Le Baron a posé un acte politique d'un grande symbolique qui marque le monde à ce jour. Point de différence à Rio et plus de plaisir du jeu même si l'actualité nous impose exclusivement de la violence tous azimuts en particulier celle attribuée à la foi religieuse et plus spécialement celle que les illuminés estiment hypocritement intrinsèque à l'islam. Les J.O à Rio sont une belle et imparable réponse aux gourous et attiseurs de haine religieuse et creuseurs de dossés entre les peuples: la statue du Christ rédempteur domine la baie de Rio et ouvre ses bras pour accueillir le monde dans ses diversités sans distinction aucune exceptée celle qui couronne l'efforts physique et mental que tous fêterons qu'ils soient sur le piédestal des médailles ou pas. Parce que le sport et la spiritualité ont cette force en commun: la foi en un idéal qui les transcende. Cette conviction intime et profonde qui appelle l'être humain à des efforts sur lui même pour comprendre sa condition, mesurer ses limites et donner un sens à son existence.

Depuis la nuit des temps l'Homme se bat pour résoudre un dilemme qu'il s'est inventé, dans lequel il s'est enfermé et qu'il tente de résoudre: la guerre et la paix. Aujourd'hui la politique et la diplomatie montrent leurs limites à vaincre la fatalité de la guerre et polluent jusqu'à l'esprit des J.O. comme avec la question du dopage et de l'exclusion totale ou partielle d'un grand pays du sport comme la Russie. Et comment ne pas être triste lorsque les médias de certains pays modernes et développés concentrent leurs informations sur la qualité des eaux de mer où se dérouleront des épreuves sportives, sur le retard supposé dans des travaux d'infrastructures sportives, sur le climat de corruption et de scandales financiers qui secoue le monde politique brésilien, les manifestations anti - jeux et pour couronner le tout sur la sécurité à Rio et dans tout le Brésil? La même campagne sournoise et stressante pour les sportifs comme pour le public a été menée lors des J.O d'hiver de Sotchi (Russie) et lors de la dernière coupe du monde tenue justement au Brésil.

Dans les deux cas sportifs et public présents sur les lieux ont célébré la fête sans aucun incident significatif autant que le reste du monde qui a suivi ces deux fêtes sur les écrans de télés. Hier en Europe des chrétiens, musulmans, juifs croyants ou pas, athées etc. ont commué ensemble dans des mosquées, églises et dans la rue pour dire non à la violence et au terrorisme au nom d'un foi, celle des musulmans, et aujourd'hui ils se retrouvent à Rio pour poursuivre le chemin de la rencontre, du partage, de la fête et de la joie au travers de jeux sportifs. Comme un retour aux sources de l'esprit des J.O dans l'Olympie d'Héraclès qui manifestait sa foi aux dieux grecs par le sport et l'effort sur soi. Comme la foi qui prône l'effort sur soi.

Les jeux auront lieux et il n'y aura que des vainqueurs avec ou sans médailles parce que c'est l'ensemble des concurrents qui offrent le spectacle au monde qui les regarde. Le monde regardera l'exclusivité de ces jeux, celle de la participation d'une équipe d'athlètes refugiés de guerres et de violences qui concourent sous la bannière de L'Onu et des J.O. comme pour secouer nos consciences face aux multiples drames qui frappent des peuples et des pays. Plus que jamais les cinq anneaux de l'emblème des J.O représentant les cinq continents réunis symbolisent cette quête de l'humanité du vivre ensemble, de la rencontre et de la tolérance. Plus que les «12 travaux d'Hercule», le monde d'aujourd'hui a un noble et unique défi à relever et oh combien difficile: celui de la paix. Bienvenue aux J.O de Rio.