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Déjà lourdement bombardée depuis des mois: Un autre massacre annoncé à Rafah

par Mohamed Mehdi

Au 213e jour de l'agression sioniste contre Ghaza, le nombre de victimes s'est élevé lundi à 34.735 martyrs et 78.108 blessés, a annoncé, hier, le ministère de la Santé de l'enclave. La veille, l'armée d'occupation a commis 5 massacres, faisant 52 martyrs et 90 blessés.

Lundi, Ghaza a enregistré le décès en martyr du journaliste Mustafa Ayyad, des suites de ses blessures lors d'un bombardement israélien qui a visé le quartier d'Al-Zaytoun dans la ville de Ghaza. Ainsi le nombre de journalistes martyrs dans la bande de Ghaza, depuis le début du génocide le 7 octobre dernier, s'élève désormais à 142 en 213 jours.

Hier également, l'occupant israélien a ordonné à la population quitter Rafah, le gouvernorat le plus peuplé de Ghaza, où s'entassent, depuis plus de 4 mois, près de 1,5 million de personnes, dont plus de 1,2 million de déplacés provenant du reste du territoire de l'enclave assiégée. Bien avant l'annonce de «l'opération terrestre», les bombardements contre Rafah sont incessants et de plus en plus intenses depuis plus de trois mois, malgré l'importante densité de population (plus de la moitié des habitants de Ghaza) dans ce gouvernorat frontalier avec l'Egypte.

Dans la nuit de dimanche à lundi, pas moins de 28 Palestiniens de Rafah, dont 11 enfants et 8 femmes, sont tombés en martyrs dans des bombardements israéliens qui ont ciblé 11 maisons dans différentes zones Est et Ouest du gouvernorat. Lundi, Rafah a également subi d'intenses bombardements.

Le correspondant d'Al Jazeera a confirmé que l'aviation israélienne mène des raids intensifs sur les zones à l'est de Rafah, que l'occupation a ordonné d'évacuer ce matin. Le nord et le centre de l'enclave n'ont pas non plus été épargnés par les bombardements sionistes alternant des tirs d'artillerie, des missiles et des bombes largués par l'aviation militaire. Un correspondant d'Al Jazeera a rapporté, hier, des bombardements d'artillerie israélienne sur les zones orientales de Jabalia et des raids aériens sur Beit Lahia, dans le nord de la bande de Ghaza. Tandis que des médias palestiniens ont fait état de tirs d'artillerie sur le nord-ouest du camp de Nuseirat, ainsi que les zones d'Al-Zahraa et d'Al-Mughraqa dans le centre de l'enclave.

Un massacre annoncé à Rafah

L'entité sioniste annonce depuis plusieurs mois qu'elle envahira Rafah au sud de l'enclave de Ghaza. Il y a moins de deux jours, ses criminels-dirigeants se bousculaient pour déclarer que cette invasion aura lieu «avec ou sans accord sur la libération des otages». Une manière claire et nette de refuser tout accord.

Pendant tout ce temps, et depuis près de 7 mois, cet Etat-voyou, protégé par les Etats-Unis, plusieurs pays occidentaux et quelques pays arabes, n'a pas cessé de bombarder Ghaza, de nuit comme de jour, au premier jour du Ramadhan comme au premier jour de l'Aïd, ne laissant ni école, ni hôpital, ni mosquée, encore moins des habitations ou des tentes. Même Rafah n'échappe pas aux bombardements depuis plus de deux mois.

Avec tout ça, et pour justifier l'invasion de Rafah, l'entité sioniste trouve prétexte du bombardement par la Résistance Palestinienne, survenu dimanche, contre des positions de l'armée d'occupation aux frontières avec Ghaza.

Le correspondant d'Al Jazeera, Hisham Zaqout, a rapporté, hier, que les quartiers que l'armée d'occupation avait appelé à évacuer, à l'est de la ville de Rafah, ont été soumis à de violents bombardements dans la nuit de dimanche. Le journaliste a expliqué que l'est de Rafah abrite des infrastructures «stratégiques» tels que «le point de passage entre Ghaza et l'Egypte, et l'hôpital Abou Youssef Al-Najjar», qui «regorge de personnes blessées».

Par ailleurs, Hisham Zaqout a souligné que les zones que l'occupation prétend être «sécurisées» et dans lesquelles la population de Rafah est censée s'y installer, «sont situées à Khan Younes et Al-Mawasi». Il s'agit, dit-il encore, de régions «totalement détruites» et où «il n'est pas possible d'installer des tentes» ni d'accueillir un «grand nombre de personnes déplacées».

Hamas : l'attaque de Rafah ne sera pas une «promenade de santé»

Le Mouvement de la Résistance islamique (Hamas) a déclaré que la préparation par l'armée d'occupation d'une attaque contre la ville de Rafah est un «crime qui confirme l'insistance du gouvernement de Benjamin Netanyahu à poursuivre la guerre d'extermination» contre les Palestiniens, et a appelé la communauté internationale à «prendre des mesures urgentes» pour mettre fin à ces crimes qui menacent la vie de «centaines de milliers de civils sans défense à Rafah».

Toutefois, le Hamas a souligné, dans un communiqué publié sur Telegram, que «toute opération militaire à Rafah ne sera pas une promenade de santé pour l'armée d'occupation», et que «la résistance est pleinement préparée à défendre le peuple palestinien».

Pour le bureau des médias du gouvernement à Ghaza, l'annonce par Israël de «son intention d'envahir Rafah, indique que l'occupation s'est lancée dans des négociations de trêve de manière trompeuse».

«L'agression de l'occupation ne s'est pas arrêtée un seul instant dans toutes les zones de la bande de Ghaza, et même Rafah n'a pas été épargnée par les bombardements», rappelle le communiqué qui rejette «les affirmations de l'occupation liant cette annonce à l'opération de résistance sur le site militaire de Karam Abu Salem».

De son côté, l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA) a confirmé, lundi, qu'il ne participerait pas à l'évacuation forcée des habitants de Rafah ou de tout autre endroit de la bande de Ghaza. L'agence a déclaré que «la vie à Rafah est dangereuse et que les conditions de vie sont déjà terribles et pourraient empirer», ajoutant que la «menace imminente de déplacements supplémentaires pourrait pousser la communauté au-delà du point de rupture, augmentant ainsi les risques pour des centaines de milliers de personnes».

Dans un précédent communiqué, l'UNRWA, dont le commissaire général, Philip Lazzarini, s'est vu refusé, pour la deuxième fois, l'entrée à Ghaza, avait a indiqué - via la plateforme X - que ses équipes ne quitteront pas Rafah et maintiendront leur présence le plus longtemps possible dans la ville pour apporter une assistance vitale aux habitants.

Borrell : les ordres d'évacuation de Rafah sont «inacceptables»

Le commissaire européen à la politique étrangère, Josep Borrell, a déclaré hier sur la plateforme X que les ordres israéliens d'évacuer les civils de Rafah «laissent présager le pire» et sont «inacceptables». «Israël doit abandonner l'offensive terrestre et mettre en œuvre la résolution 2728 du Conseil de sécurité (adoptée en mars 2024, et qui exige notamment un cessez-le-feu immédiat à Ghaza, ndlr). «L'Union européenne, en coopération avec la communauté internationale, doit agir pour empêcher un tel scénario», a ajouté Borrell.

Le ministre jordanien des Affaires étrangères, Ayman Safadi, a estimé qu'un «autre massacre de Palestiniens est en préparation» à Rafah, appelant à des «mesures pour empêcher» cette attaque israélienne. «Ne pas empêcher le massacre constituera une tache indélébile» pour la communauté internationale, a déclaré Safadi.

Pour la vice-Première ministre belge, Petra De Sutter, les ordres israéliens d'évacuer les citoyens et les personnes déplacées de Rafah et d'annoncer l'invasion conduiraient à un massacre.

À son tour, la ministre belge de la Coopération et du Développement, Caroline Guenez, a déclaré que les violations du droit international par Israël nécessitent une réponse ferme, soulignant le travail visant à imposer des sanctions économiques européennes à Tel-Aviv.

Le ministère français des Affaires étrangères a également renouvelé l'opposition de son pays à une opération terrestre contre la ville de Rafah, soulignant que tout déplacement forcé de civils constitue un crime de guerre, et renouvelant son appel à la libération des détenus et à un cessez-le-feu permanent.

Quant à David Lammy, le secrétaire d'État des Affaires étrangères du cabinet fantôme, il a déclaré lui aussi qu'une attaque terrestre israélienne contre Rafah serait «catastrophique». L'offensive de Rafah «ne doit pas avoir lieu», a écrit le politicien du parti travailliste sur X, appelant à un cessez-le-feu immédiat, à la libération des captifs et à une aide sans entrave à Ghaza.