Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Attaque sioniste contre Rafah: L'Afrique du Sud dépose une nouvelle requête devant la CIJ

par Mohamed Mehdi

Au 130e jour de l'agression contre Ghaza, avec l'accord tacite de l'administration américaine, l'armée israélienne prépare l'invasion de Rafah, au sud de l'enclave, qui accueille plus de 1,3 million de personnes déplacées, en procédant d'abord au ciblage des témoins gênants : les journalistes.

Hier, mardi, plusieurs journalistes, dont deux de la chaîne qatarie Al Jazeera, ont été ciblés par un drone au nord de Rafah.»Les collègues Ismaïl Abu Omar et Ahmed Matar ont été transférés vers l'hôpital européen pour y subir des interventions chirurgicales», a rapporté un autre correspondant d'Al Jazeera. La même source indique que le bombardement du drone s'est déroulé dans la région «Muraj», au nord de Rafah. L'agence Reuters a rapporté, hier, que l'Afrique du Sud a soumis une «demande urgente à la Cour internationale de justice (CIJ) concernant l'attaque israélienne contre Rafah». Mardi, le ministère de la Santé à Ghaza a annoncé que le nouveau bilan des victimes de l'agression israélienne s'élève à 28.473 martyrs et 68.146 blessés. Le ministère a également ajouté que l'occupation sioniste a commis, durant la journée de lundi, «16 massacres» faisant «133 martyrs et 162 blessés».

Alors que les combats s'intensifient à Khan Younes, au sud de Ghaza, où l'armée sioniste enregistre des pertes importantes en soldats, l'aviation et l'artillerie de l'occupation continuent de bombarder plusieurs régions de l'enclave assiégée.

Le correspondant d'Al Jazeera a déclaré mardi, à la mi-journée, que l'armée d'occupation a bombardé un «carré résidentiel» au centre de la ville de Khan Younes. Plus tôt dans la journée, la même source a également rapporté des bombardements d'artillerie, accompagnés de tirs de fusées éclairantes, au sud de la ville de Ghaza.

Dans le centre de Ghaza, le bombardement d'un groupe de Palestiniens à Deir al-Balah a fait un martyr et plusieurs blessés. Toujours au centre de Ghaza, lundi soir, des bombardements israéliens contre des maisons ont fait au moins 16 martyrs et des blessés. Hier aussi, le ministère de la Santé à Ghaza a déclaré que les forces d'occupation israéliennes ont demandé à l'administration de l'hôpital Nasser de Khan Younes «d'évacuer les personnes déplacées et de maintenir sur place les patients et le personnel de santé». L'ordre de l'armée sioniste ne précisait pas où devaient se diriger les personnes déplacées puisque le nord de Ghaza est toujours sous bombardements et que la région de Rafah, au sud de Khan Younes, est également une zone que l'occupation veut aussi vider de ses déplacés pour entamer l'incursion terrestre.

Plus tôt, le correspondant d'Al Jazeera a rapporté le martyr d'un enfant à la suite à des tirs de soldats de l'occupation postés à l'entrée du complexe médical Nasser de Khan Younes.

Le journaliste a également affirmé que des incendies ont éclaté à l'intérieur des écoles entourant le complexe Nasser suite à des tirs d'obus incendiaires de l'armée israélienne pour forcer les personnes déplacées à quitter les lieux.

Des correspondants d'Al Jazeera ont rapporté, mardi également, plusieurs martyrs et des blessés dans des bombardements israéliens sur plusieurs zones de Ghaza. Au moins 3 martyrs dans le ciblage d'une voiture près du stade palestinien à l'ouest de la ville de Ghaza, ainsi qu'un quatrième martyr et plusieurs blessés dans le bombardement d'un groupe de Palestiniens au carrefour de Lababidi. Deux autres personnes ont été blessées dans un bombardement de citoyens près de la mosquée Ali, dans le quartier de Zaytoun dans la ville de Ghaza.

L'occupation cible des journalistes au nord de Rafah

Au 130e jour de son agression contre Ghaza, la «puissante» armée sioniste continue de cibler des journalistes. Hier, mardi, le correspondant d'Al Jazeera Ismaïl Abu Omar et son collègue photographe Ahmed Matar ont été grièvement blessés après qu'un drone israélien a ciblé un groupe de journalistes dans la région «Muraj», au nord de Rafah. Les deux victimes ont été transférées à l'hôpital européen de Khan Younes.

Dans un compte rendu d'Al Jazeera English (AJE), citant Mohamed Al-Astal, médecin urgentiste à l'hôpital européen, on apprend que «Ismaïl Abu Omar a subi de graves blessures».

«Après examen, sa jambe droite avait déjà été amputée. En outre, des éclats d'obus s'étaient logés dans sa poitrine et sa tête, ainsi que dans sa jambe gauche. Nous soupçonnons que l'artère fémorale a été sectionnée à la base de la jambe», ajoute le médecin.

«Abu Omar saignait abondamment, à tel point que sa tension artérielle et son pouls étaient illisibles», poursuit le médecin, affirmant clairement que «cela signifie qu'il est dans un état très critique et qu'il risque de perdre la vie. Nous prions pour son rétablissement».

AJE rapporte également que le photojournaliste Ahmed Matar «a également été blessé et se trouve dans un état grave» et sera également opéré.

Al Jazeera condamne un ciblage délibéré

Dans un communiqué rendu public moins d'une heure après l'attaque au drone de son correspondant Ismaïl Abu Omar et du photographe Ahmed Matar, Al Jazeera Media Network a vivement condamné «le ciblage délibéré par l'armée israélienne» de ses correspondants à Rafah.

«Viser le journaliste Ismaïl Abu Omar et le photographe Ahmed Matar est un crime complet qui s'ajoute aux crimes d'Israël contre les journalistes», affirme la chaîne qatarie que plusieurs ministres sionistes avaient appelé à interdire dans les territoires occupés. Le communiqué affirme encore que «le ciblage du journaliste Ismaïl et du photographe Ahmed est un nouveau maillon dans la série de ciblages délibérés par l'occupation des équipes d'Al Jazeera», ajoutant que «ces attaques visent à intimider les journalistes et à les empêcher de rapporter les crimes de l'occupation contre des civils innocents à Ghaza».

De son côté, le Mouvement de la résistance islamique (Hamas) a déclaré : «Le ciblage brutal et perfide des journalistes est un comportement terroriste sioniste récurrent visant à décourager les journalistes de couvrir les crimes de l'occupation».

«Tout le monde est une cible»

Le correspondant d'Al Jazeera English, Hani Mahmoud, écrit à partir de Rafah que «Ismaïl Abu Omar et son caméraman Ahmed Matar, documentaient les conditions de vie des familles palestiniennes déplacées à Rafah». «Ils témoignaient de l'horreur qu'ils ont vécue au cours des dernières 24 heures lors des frappes aériennes massives sur les principaux quartiers de la ville de Rafah -où près de 100 personnes ont été tuées- lorsqu'ils ont été directement visés par un missile tiré par un drone», ajoute Hani Mahmoud.

«Ce n'est pas le premier incident et nous nous attendons à ce que ce ne soit pas le dernier. Les journalistes font l'objet d'attaques continues, systématiques et presque constantes -plus de 100 journalistes ont été pris pour cible depuis le début de cette guerre», rappelle-t-il.

L'Afrique du Sud adresse une requête urgente à la CIJ

L'Afrique du Sud a adressé mardi une «requête urgente» à la CIJ concernant l'offensive israélienne à Rafah. Selon AJE, le gouvernement sud-africain a demandé à la Cour internationale de justice (CIJ) d'examiner si le projet d'Israël d'étendre ses opérations militaires à Rafah «exige que la Cour use de son pouvoir pour empêcher une nouvelle violation imminente des droits des Palestiniens de Ghaza».

«La Cour peut à tout moment décider d'examiner d'office si les circonstances de l'affaire exigent l'indication de mesures conservatoires qui devraient être prises ou respectées par l'une ou l'autre des parties ou par toutes les parties», explique un communiqué du gouvernement sud-africain, ajoutant qu'il est «gravement préoccupé par le fait que l'offensive militaire sans précédent contre Rafah a déjà entraîné et entraînera d'autres morts, dommages et destructions à grande échelle».

«Cela constituerait une violation grave et irréparable de la Convention sur le génocide et de l'ordonnance de la Cour du 26 janvier 2024. L'Afrique du Sud espère que cette question recevra l'urgence nécessaire à la lumière du nombre quotidien de morts à Ghaza», affirme encore le communiqué.

Mise en garde de la Norvège et de la Chine

L'opération terrestre à Rafah inquiète également la Norvège et la Chine qui ont mis en garde, hier, contre ses conséquences désastreuses.

Hier, le ministre norvégien des Affaires étrangères a fermement mis en garde contre le lancement par Israël d'une opération terrestre à Rafah, alors que la Chine a appelé l'entité sioniste à cesser dès que possible ses opérations militaires contre la ville de Rafah et à éviter une catastrophe humanitaire plus grave.

Le ministère chinois des Affaires étrangères affirme condamner «toutes les actions visant les civils et violant les lois internationales».

De son côté, l'ONU affirme qu'elle ne participera pas à l'évacuation forcée de Rafah. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA) affirme qu'il n'a reçu aucune communication de la part d'Israël concernant un plan d'évacuation de la zone de Rafah à Ghaza.

«Quoi qu'il en soit, les Nations unies ne participent pas aux évacuations forcées et non volontaires. Il n'est pas prévu pour l'instant de faciliter l'évacuation des civils», affirme Jens Laerke, porte-parole de l'OCHA.

Par ailleurs, le Commissaire général de l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés (UNRWA), Philippe Lazzarini, affirme que les habitants de Rafah «n'ont pas où partir», ajoutant que «personne n'est en sécurité dans l'enclave de Ghaza».

Lazzarini a également révélé que «150 installations internationales ont été ciblées» à Ghaza, et que cela devrait «faire l'objet d'une enquête indépendante».