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Mémorandum de l'UFDS

par Ghania Oukazi

«Le certificat médical du candidat doit être délivré par un collectif de médecins spécialistes assermentés, précisant que le candidat est sain de corps et d'esprit».

C'est l'une des propositions de Nouredine Bahbouh, ancien ministre, ex-député, l'un des premiers dissidents à un RND inféodé au pouvoir de la fin des années 90, actuellement président de l'UFDS (Union des Forces Démocratiques et Sociales). Il a été l'un de ceux qui ont préparé la plate-forme de sortie de crise adoptée le 6 juillet dernier à Aïn Benian. Tout autant que les partis auxquels il s'était associé pour le faire, Bahbouh a reçu la semaine dernière au siège de son parti le coordonateur du panel dans le cadre de la médiation et du dialogue menés pour unifier les avis et concilier les positions de la classe politique et l'ensemble des représentants de la société civile.

Dans le mémorandum qu'il avait remis à Karim Younes, le président de l'UFDS rappelle que «le scrutin en Algérie constitue depuis fort longtemps un comportement électoral, révélateur d'une profonde crise de confiance liée à un système qui a réformé ses procédures sans changer ses logiques de fonctionnement». Il en a résulté, note-t-il, «un code électoral dissuasif, des résultats officiels trafiqués et une présomption de culpabilité en matière de fraude électorale». Il propose alors des amendements à la loi électorale «sans (pour autant, ndlr) vouloir toucher aux dispositions communes à toutes les consultations électorales». Bahbouh pense, entre autres, que « la révision des listes électorales doit être assurée par une commission indépendante composée d'électeurs (3 à 5 personnes), inscrits sur la liste électorale de la commune sous le contrôle direct d'un magistrat. Pour ce qui est des circonscriptions diplomatiques et consulaires, il recommande de remplacer le chef de la mission diplomatique ou le chef de poste consulaire par un magistrat également. S'assurer à ce titre de réhabiliter les électeurs radiés arbitrairement dans le cadre des opérations « assainissements » du fichier électoral (les personnes radiées sont surtout celles qui ne soutenaient pas le candidat du pouvoir). Vérifier les radiations au niveau des communes d'origines également. »

Restreindre les bureaux de vote itinérants

A propos des candidatures, Bahbouh estime que «le dossier doit être accompagné d'une synthèse du programme électoral du candidat, des parrainages d'électeurs dont le nombre doit être relevé à 100.000 répartis à travers les deux tiers des wilayas et dont le nombre ne devait pas être inférieur à 1.500 parrainages ». Mais sa précision est que «le recours au parrainage des élus est supprimé pour le cas de ces élections présidentielles. Toutes les dernières élections décriées par l'ensemble de la population et de tous les partis politiques y compris par ceux qui étaient au pouvoir et dont ils étaient les principaux bénéficiaires, ont été assimilées à une véritable prime à la fraude». Et même que «le retrait des imprimés de parrainage est assujetti à un dépôt d'une caution bancaire de 500.000 DA, qui sera restituée une fois le dossier de candidature de l'intéressé accepté. Cette disposition a pour objectif de dissuader d'éventuelles candidatures fantaisistes et qui discréditent la sacralité du poste de président de la République ». L'ancien ministre veut que «l'instance chargée de l'organisation des élections soit tenue de mettre à la disposition des candidats participant aux présidentielles les listes électorales définitives avec dépôt au greffe du tribunal compétent copies dûment approuvées. A ses yeux, il faut «restreindre les bureaux itinérants et supprimer les bureaux de vote isolés et les bureaux de vote rattachés. «Désigner les chefs de centre et membres des bureaux de vote par la commission en faisant participer le représentant de chaque candidat au niveau des centres de vote. A ce titre, il y a lieu d'éviter de recourir aux listes en possession du ministère de l'Intérieur (listes appelées communément listes du résultat). Faire appel si possible au bénévolat pour une meilleure transparence.

Les faire assermenter en présence des représentants de la commission. » Il estime en outre qu'il faut «confier le pouvoir d'annoncer la date d'ouverture et de clôture du scrutin à l'instance nationale chargée des élections et interdire toute prolongation de l'heure de clôture(...)». Il propose de «transférer les compétences du Conseil constitutionnel indiquées dans la loi relative au régime électoral à l'instance nationale chargée de l'organisation des élections».

Des interdictions et des amendes

Autre proposition «le retrait aux walis et aux chefs de daïra toute forme d'injonction dans la désignation et la composition des commissions électorales. Aucune demande d'habilitation ou désignation des représentants des candidats ne doit plus être exigée par l'administration locale. Toutes ces démarches doivent dorénavant se faire auprès de l'instance chargée de l'organisation des élections et ses démembrements locaux. » En plus, ajoute-t-il, «la suppression de tout rôle aux ministres de l'Intérieur, de la Justice, des Affaires étrangères et de la communication dans l'opération de vote». L'organisation médiatique de la campagne électorale ne doit plus être à l'avenir assurée, selon lui, par l'autorité de régulation de l'audiovisuel. Une commission ad hoc issue de l'instance d'organisation des élections doit la substituer. « Il faut interdire les affichages anarchiques et imposer une amende de 1.000.000 DA à chaque situation, interdire la libération des fonctionnaires, agents et travailleurs des administrations et des entreprises publiques ou privées. La loi relative aux réunions et manifestations publiques doit être révisée dans le respect de la sauvegarde de l'ordre public et les droits des candidats », propose-t-il encore.

Il écrit par ailleurs dans son mémorandum que «l'instance d'organisation des élections présidentielles et de toutes les élections constitue le maillon centrale de la réussite de la nouvelle démarche». Et parce que «le trafic des élections a été de tout temps l'œuvre de ceux qui l'ont organisé et supervisé, il est nécessaire d'exclure de l'instance tous ceux qui ont participé par le passé dans les opérations de vote (magistrat, administration, Conseil constitutionnel, etc.)». Il propose que «la composante humaine de cette instance désignée pour ces élections présidentielles uniquement doit comprendre des personnalités ou des hauts fonctionnaires non partisans choisis par le panel, des représentants de diverses corporations (avocats, huissiers, notaires, enseignants universitaires, médecins), des représentants de syndicats autonomes élus par leurs pairs et de représentants des jeunes issus du hirak. La même configuration sera adoptée au niveau local ». Il conclut son mémorandum en soulignant que «la prestation de serment sur le respect et l'engagement de tenir des élections libres et transparentes doit se faire d'une manière publique ».