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Marches populaires, planche à billets, grève de l'éducation...: Les réponses de Ouyahia

par Yazid Alilat

  Le Premier ministre Ahmed Ouyahia a affirmé jeudi devant les députés que son gouvernement a une «identité politique», et veille à la mise en ?'œuvre du programme du président de la République». Il a souligné dans ses réponses aux questions des députés sur sa déclaration de politique générale que ?' Notre identité politique est que nous sommes le gouvernement du Président Bouteflika, avec nos différentes appartenances politiques, et nous sommes fiers de travailler sous la conduite du chef de l'Etat». Il a ensuite attribué le retard pris dans la présentation de la déclaration de politique générale du gouvernement aux ?'événements qu'a connus l'APN, qui avaient retardé sa présentation», ajoutant que ?'le document était prêt en automne dernier.» Il a fait allusion au changement mouvementé intervenu à la tête de l'APN, après l'éviction non conforme au règlement intérieur de la chambre basse de son président, Said Bouhadja, et son remplacement par Mouad Bouchareb. Il a, fatalement, abordé dans le volet politique les marches populaires contre le 5ème mandat, lançant un sévère avertissement jeudi contre ?'les manoeuvres et l'instrumentalisation politique des marches populaires».

A la veille d'une marche nationale, organisée hier vendredi 1er mars, il a souligné que ?'le peuple doit faire preuve de vigilance quant aux appels anonymes, notamment face aux tentatives de certains milieux étrangers de s'incruster dans ces manifestations pacifiques pour faire sombrer le pays dans le chaos», a-t-il dit, avant de relever que ?'notre intention n'est guère de faire peur au peuple quand bien même il pourrait être en désaccord avec le gouvernement, mais la patrie vient avant tout». Il a, par ailleurs, précisé, sur la rencontre nationale inclusive prévue dans le cas de l'élection de Bouteflika à un 5ème mandat, qu'elle «sera ouverte à tous les partis politiques et associations nationales. Elle sera présidée par une personnalité indépendante et débattra de tous les dossiers et questions soulevés sur la scène nationale, dans le cadre du respect des principes nationaux». Ladite conférence devrait permettre d'opérer «une révision profonde de la Constitution et consacrera l'entente, à la faveur de la conjugaison des efforts de tous pour sortir avec une meilleure approche au service du pays». Il a également affirmé que le gouvernement «veillera à la transparence» de cette élection. ?'Le peuple aura à choisir en toute liberté parmi les candidats, dont le président Abdelaziz Bouteflika», avant de revenir sur »l'agitation» contre la candidature du président Bouteflika. Sur la polémique de la prière à l'école, Ouyahia a souligné d'autre part la nécessité de préserver l'école des tiraillements politiques. ?'Nous sommes tous musulmans et l'Islam est la religion de l'Etat. Nous veillons à préserver notre religion.» Comme pour discréditer les syndicats, Ouyahia a dit que ?'les élèves en ont assez avec les perturbations et les grèves», avant de rappeler que ?'l'Islam n'a pas besoin d'une nouvelle conquête en Algérie».

Financement non conventionnel, planche de salut

Mais, le gros de l'intervention du Premier ministre s'est concentré sur le volet économique. Il a ainsi souligné que l'économie nationale a continué, en dépit des difficultés financières, à se développer mais nécessitait encore «un redressement et des réformes». »Le processus de développement dans le pays ne s'est pas arrêté, en dépit du recul des cours de pétrole de 110 dollars en 2014 à 30 dollars en 2016 (...). Nous ne sommes pas ici pour dire que nous avons atteint la perfection. Nous avons encore besoin de réformes et de redressement de certains aspects en économie», a indiqué M. Ouyahia. Selon lui, la diversification de l'économie nationale ?' a franchi de grands pas ces dernières années», expliquant que le secteur des hydrocarbures ne représentait que 19,1% du PIB de l'année 2017 contre 27% pour le secteur agricole, 12% pour celui du BTP et 6% pour l'industrie. Mais, cela reste ?'insuffisant», ce qui requiert l'augmentation du taux de couverture des besoins du marché local par le produit national. Sur la situation du secteur économique public, M. Ouyahia a rappelé que les entreprises publiques avaient bénéficié, depuis 2011, de crédits de réhabilitation s'élevant à 1.100 mds DA, ce qui confirme, a-t-il dit, qu'elles «ne sont nullement marginalisées par le gouvernement comme le prétendent certains».

Les entreprises du secteur privé sont subventionnées par l'Etat, dont 900 mds de Da en microcrédits. Pour Ouyahia, ces chiffres ?'confirment qu'il n'existe aucun monopole de crédits bancaires en faveur d'une partie au détriment d'une autre». Sur le financement non conventionnel, le Premier ministre a indiqué que le montant des crédits accordés par la Banque d'Algérie au Trésor public a atteint 6.556 milliards de DA au 31 janvier 2019. ?'Ce chiffre devrait augmenter d'environ 500 mds de DA supplémentaires durant les prochains mois.» Ces montants, selon M. Ouyahia, sont de 2.287 milliards de DA pour l'assainissement des banques et entreprises et 2.470 milliards de DA au renforcement du Trésor public pour faire face au déficit budgétaire, outre 864 milliards de DA destinés à la Caisse nationale des retraites (CNR). Mieux, il a expliqué que le financement non conventionnel n'induira aucune hausse de l'inflation, comme l'ont prédit certains experts. L'inflation, ces dernières années, a atteint 6,5% fin 2016, pour passer à 5,5% fin 2017 puis à 4,3% fin 2018. «Ces chiffres viennent réfuter les prévisions des experts ayant prédit une inflation à quatre chiffres, en raison du recours au financement non conventionnel», a estimé M. Ouyahia. »

En recourant à ce mécanisme, le niveau de la dette publique interne a atteint 36% du PIB de l'Algérie, un chiffre appelé à baisser, au regard du recul progressif du déficit prévu dans le budget de l'Etat jusqu'en 2022", a-t-il expliqué. » L'essentiel est que nous avons préservé la souveraineté de l'Etat sur la prise de décision économique, grâce au financement non conventionnel. Nous aurions pu perdre notre souveraineté économique si nous avions eu recours au FMI», a-t-il lancé, s'adressant à ceux qui avaient prédit un affaissement des grands indicateurs macroéconomiques du pays après le recours à la planche à billets. L'autre point important abordé par le chef de l'Exécutif est celui de la politique des subventions des produits de première nécessité. M. Ouyahia a affirmé que le gouvernement est sur le point de parachever le recensement social des citoyens nécessitant des subventions, expliquant que le ministère des Finances s'attelle avec des organismes internationaux spécialisés à l'examen de nouveaux dispositifs de soutien. «La subvention directe laissera inéluctablement place à des aides financière au profit de ceux qui en ont droit», souligne t-il, avant de relever que ?'chaque citoyen bénéficiera de subventions en fonction de son revenu mensuel.» ?'Les subventions seront maintenues pour les démunis, les personnes à faibles revenus et «même la classe moyenne», a-t-il assuré. Il a, dans la foulée, démenti ?'une quelconque décision de l'Etat d'annuler la gratuité des soins, qui demeure un principe sacré» en Algérie».