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Tiaret: Le travail des enfants inquiète

par El-Houari Dilmi

Le nez plongé dans une benne à ordures au quartier de «Frigo», l'un des quartiers de la ville de Tiaret, un enfant d'à peine 10 ans s'ahane à remplir un sac en jute d'objets hétéroclites. Il est accompagné d'un autre adolescent à peine plus âgé, ce dernier casse une vieille chaise en plastique pour la charger sur sa charrette qui ploie sous un tas d'objets en tous genres.

Il s'agit là du phénomène inquiétant du travail des enfants qui «prend des proportions inquiétantes dans cette région du pays», s'inquiètent les militants de plusieurs associations de défense des droits des enfants. Pour de nombreux acteurs de la société civile locale, la situation continue d'empirer, au point que Tiaret caracole en tête des wilayas où l'on dénombre le plus grand nombre d'enfants qui travaillent avant l'âge de seize ans. Sur plusieurs dizaines milliers d'enfants âgés de moins de seize ans travaillant au noir en Algérie, la wilaya de Tiaret en compterait au moins six mille qui travaillent au mépris total de toutes les règles éthiques, morales et légales, s'offusquent des militants associatifs impliqués dans la protection des droits de l'enfant. Pourtant, plusieurs employeurs ont été «épinglés» depuis le début de l'année en cours à Tiaret pour avoir employé des enfants âgés de moins de seize ans. En cette période estivale avec des températures insupportables, des pelotons entiers d'enfants, pas plus hauts que trois pommes, sont quotidiennement observés aux quatre coins de la ville ahanant sous la tâche pour rassembler quelques misérables sous à ramener à leurs familles dans le besoin. Tous les jours que Dieu fait, des «nuées» d'enfants sont observées la tête enfouie dans les poubelles et autres décharges sauvages à la recherche d'un quelconque objet à vendre aux récupérateurs et autres recycleurs contre quelques dinars. «A Tiaret comme ailleurs dans le pays, face aux conditions sociales difficiles des familles, les enfants qui travaillent avant l'âge légal sont de plus en plus nombreux, y compris dans les grandes villes» s'alarme Khaled, un militant d'une association caritative.

En nippes et sentant mauvais, la majorité de ces enfants souffrent en silence de maladies graves, sans que leurs parents n'aient les moyens de les soigner. En raison de la conjoncture économique difficile que vivent certaines franges de la société, des enfants sont souvent obligés par leurs propres parents à travailler pour contribuer à la prise en charge des besoins urgents de la famille. Depuis des années déjà, malgré plusieurs actions visant à lutter contre le travail au noir des enfants sur le quadruple plan légal, éthique, sanitaire et psychologique, le «phénomène continue à enfler pour prendre des proportions des plus inquiétantes», s'égosillent à rappeler des associations locales impliquées dans la défense des droits des enfants. Dans une énième lettre ouverte adressée aux autorités concernées, des militants du mouvement réclament la création en urgence de structure pour la prise en charge des enfants issus des milieux défavorisés, responsabiliser les parents qui obligent leurs enfants à travailler et surtout intensifier les opérations de contrôle au niveau des établissements et organismes exploitant les enfants de moins de seize ans.

La nécessité de veiller à une application stricte sur le terrain de la réalité de la Convention internationale ratifiée par l'Algérie et relative à la défense des droits et la protection de l'enfance constitue l'autre leitmotiv du mouvement associatif local qui compte même saisir les instances nationales pour attirer l'attention sur ce fléau qu'il faut éradiquer au plus tôt.