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L'improbable mise en accusation de l'OTAN

par Kharroubi Habib

Un groupe de scientifiques libyens a transmis, jeudi dernier, au gouvernement d'entente nationale reconnu par la communauté internationale, un rapport qui confirme l'utilisation d'obus à l'uranium appauvri lors des bombardements menés par l'OTAN en 2011. L'information a été totalement ignorée par les médias occidentaux qui, sur les simples allégations formulées par des observatoires et des sources humanitaires à la sulfureuse réputation, ont mené campagne contre les autorités syriennes en les accusant d'avoir fait usage de l'arme chimique contre les combattants de la rébellion et de la population civile des agglomérations ciblées. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), elle aussi prompte à réagir aux mêmes allégations visant ces autorités syriennes, ne semble pas se sentir concernée par le rapport du groupe de scientifiques libyens. Pour mettre cette agence onusienne dans l'obligation de se déterminer sur ce qu'il a dévoilé dans son rapport, ce groupe envisage de lui faire appel ainsi qu'à d'autres organisations internationales pour initier une enquête et vérifier la présence de traces d'uranium appauvri qu'il soutient avoir découvertes dans les zones en Libye ayant été ciblées par les bombardements de l'OTAN.

Pour sûr que les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni qui se targuent de faire de l'utilisation d'armes prohibées par les conventions internationales la ligne rouge dont la violation entraîne des représailles de leur part contre les contrevenants, vont tenter d'étouffer toute initiative visant à donner une suite au rapport du groupe de scientifiques libyens. Il en a été ainsi quand l'armée américaine a été accusée d'avoir fait usage de bombes à uranium appauvri au cours des deux interventions militaires qu'elle a menées contre l'Irak de Saddam Hussein. La France et la Grande-Bretagne qui sont allées aux côtés des Etats-Unis « punir » le régime de Bachar el Assad au prétexte de l'accusation jamais prouvée encore qu'il aurait gazé la population civile de son pays, n'avaient pas alors joint leurs voix à celles qui ont réclamé une enquête sur ce qui a été reproché à l'armée américaine. Etant dans le cas libyen, elles-mêmes visées par les conclusions du rapport des scientifiques libyens, ces deux Etats s'ingénieront à tous les niveaux à démonétiser ses auteurs et à faire pression sur l'AIEA pour qu'elle n'initie pas l'enquête internationale réclamée par eux. Il n'y a pas à attendre du gouvernement d'entente nationale libyen qu'il officialise une demande d'enquête sur les bombardements de l'OTAN. Tant sa survie est justement tributaire du soutien que les Etats membres de cette alliance militaire lui prodiguent. L'opinion internationale saura encore une fois, avec le rapport des scientifiques libyens, que le droit et la justice internationale sont instrumentalisés en une logique à géométrie variable par les grandes puissances occidentales.