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Bedoui: La présidentielle est encore loin

par Yazid Alilat

  «La voix des citoyens sera respectée» lors des élections locales de jeudi prochain, a rassuré hier dimanche le ministre de l'Intérieur, des Collectivités locales et de l'Aménagement du territoire, Noureddine Bedoui.

«Nous sommes prêts» pour cet événement, a-t-il ajouté dans un entretien à la radio nationale, rappelant que les premiers bureaux de vote itinérants sont déjà sortis à la rencontre des citoyens habitant les zones isolées. «Ces gens-là ont commencé à voter», a-t-il dit. Après la révision exceptionnelle du fichier électoral, a indiqué le ministre, le corps électoral a augmenté, et «nous sommes aujourd'hui à 22.878.056 électeurs. C'est un chiffre provisoire qu'il faut consolider, commune par commune». Selon le ministre de l'Intérieur, il n'y a pas eu d'intervention de l'administration durant la campagne électorale. «Nous avons laissé ces trois semaines aux partis politiques pour qu'ils soient réellement une force de proposition pour les réformes qu'on a enclenchées au niveau du gouvernement», a-t-il indiqué, avant d'affirmer, sur la transparence de ce scrutin, qu'«il y a les valeurs constitutionnelles qui garantissent cela. Il y a des élections libres et où le citoyen doit donner sa voix, qui sera respectée». En outre, précise M. Bedoui, «il y a l'administration qui doit être engagée pour que ces élections soient transparentes, et il y a aussi la Haute instance de surveillance des élections (HISE), qui accompagne les pouvoirs publics et l'administration dans ces élections». Sur les «cas de dépassements» durant ces élections, il a indiqué qu'il y a «des instructions qui ont été données par la Commission nationale de préparation des élections et le ministère de l'Intérieur aux walis et aux communes et au niveau de tout le territoire national». «La commission a préparé un rapport et l'a envoyé au Président. C'est à travers cette commission mixte qu'on peut organiser des élections, qui répondent aux aspirations des citoyens algériens», a expliqué le ministre de l'Intérieur, selon lequel certaines dispositions de la loi organique «doivent être revues, comme celle des 4%». «Nous considérons cependant que c'est une disposition très positive, qui nous a permis de voir nos partenaires politiques travailler à l'intérieur du pays. Il y a une progression par rapport aux élections de 2012, car il y a une progression de listes déposées par rapport à ces élections de 2012. On ne peut dire donc que c'est une disposition contraignante pour les partis politiques», estime M. Bedoui.

Démocratie participative

Pour lui, il faut du temps pour voir l'efficacité ou non de cette disposition des 4% contenue dans la nouvelle loi électorale. Cette disposition exige des partis de justifier au moins de 4% de votes en leur faveur lors des dernières élections législatives et locales avant de se présenter lors de nouvelles élections. Elle a été d'ailleurs très critiquée par les partis et la société civile. «On a les élections locales, on a eu les législatives, nous aurons les élections présidentielles pour mieux voir cette loi et on aura à évaluer l'ensemble des dispositions de cette nouvelle loi», a-t-il fait observer, avant d'affirmer que la «loi électorale ne sera pas révisée dans l'immédiat». «Mais nous sommes prêts avec la commission mixte pour étudier les points, qui peuvent être discutés et mis en place par des dispositions réglementaires ou des circulaires». Selon le ministre de l'Intérieur, «beaucoup de projets de lois sont en préparation dans un grand chantier, et nous écoutons les propositions de nos partenaires politiques». Par ailleurs, sur les déclarations de certains leaders politiques, qui ont évoqué durant la campagne électorale la présidentielle de 2019, M. Bedoui a expliqué qu'«il faut se concentrer sur la campagne des élections locales et non sur la présidentielle: nous considérons qu'il faut écouter les préoccupations des citoyens algériens et donner de l'importance à la base et d'ancrer cette démocratie participative au niveau communal. Nous considérons que les élections communales sont importantes pour les citoyens algériens, les écouter et leur donner plus d'importance». «L'élection présidentielle a des dates constitutionnelles, et il faut respecter chaque date constitutionnelle. La présidentielle aura lieu en 2019». L'administration craint-elle un fort taux d'abstention à ces élections locales ? «Cette question, je ne la vois pas seulement chez nous. C'est une réalité qui existe à travers le monde. Il y a des pays développés qui commencent à mettre en place la démocratie participative, et le citoyen sera un peu plus concerné dans la prise en charge de ses préoccupations au niveau local». «La participation (aux élections, NDLR) des citoyens sera plus forte dans les prochaines élections. Nous devons être à l'écoute des citoyens, administration et partis politiques». Sur la question du niveau d'instruction des candidats à ces élections locales, qui a suscité un vif débat lors de cette campagne électorale, M. Bedoui a expliqué que «les élus (...) ont un encadrement pour la mise en place de la politique communale dans tous les domaines». D'autre part, le ministre de l'Intérieur a insisté sur l'ancrage de la démocratie participative, soulignant que «nous voulons que cette démocratie participative soit un complément de la démocratie élective». «On prépare des dispositions pour que la place du citoyen soit représentée dans ce projet de loi portant démocratie participative«, et cette «loi est déjà au niveau du gouvernement», a-t-il souligné. «Nous avons travaillé durant plus de six mois sur la démocratie participative, on l'a présentée au gouvernement, et elle doit passer prochainement en Conseil des ministres, avant d'aller au Parlement«, a-t-il annoncé.

Plus de prérogatives aux élus

Sur les prérogatives des élus, M. Bedoui a expliqué que les prérogatives des P/APC «ont été très larges dans les années 1990, et il faut se rappeler les dépassements dans certaines régions du pays». «On est en droit, a-t-il dit, de revoir un peu toutes ces prérogatives au niveau local. On y travaille, et c'est aussi des revendications des partis. C'est un chantier qu'on a ouvert, et on travaille sur cette loi communale et de wilaya». «Nous aurons une loi qui va consacrer la décentralisation«, poursuit le ministre, qui a annoncé la mise en place «avant la fin du premier semestre 2018 d'un arsenal nouveau». Il y aura également, a-t-il précisé, «les projets de lois sur la fiscalité locale pour gérer les biens et les richesses des communes.

Il y a plusieurs projets de lois au niveau du gouvernement». Le ministre de l'Intérieur a, sur le nouveau découpage territorial, indiqué qu'il «est toujours d'actualité». «C'est toujours en cours», a-t-il précisé. «Nous avons commencé par la mise en place de wilayas déléguées du Sud. Il y aura peut-être enrichissement de cette organisation dans le sud du pays, qui a été une réussite dans le rapprochement de l'administration avec le citoyen.

Puis, on va passer aux Hauts-Plateaux, et ensuite aux régions nord du pays». «Les walis délégués auront les mêmes prérogatives que les walis, il y aura des dispositions pour cela», a-t-il expliqué sans donner le détail de ces nouvelles wilayas déléguées des Hauts-Plateaux. Sur les communes «électroniques», le ministre de l'Intérieur a indiqué qu'elles commencent à se mettre en place progressivement.

Mais des élections électroniques ne peuvent «être organisées tant que tous les Algériens n'ont pas encore leur carte d'identité biométrique», a expliqué M. Bedoui quant à la possibilité d'organiser des élections électroniques, comme cela se passe aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne ou dans les pays développés. «Il faut que tous les Algériens aient leur identifiant national, nous sommes à plus de 11 millions de cartes, et notre objectif est de clôturer l'opération avant 2021». M. Bedoui a indiqué que la carte biométrique est dotée justement d'une application pour les élections électroniques, c'est-à-dire permettant l'enregistrement et le décompte des voix à partir de la carte d'identité biométrique.

Sur le fonctionnement des communes électroniques, il a indiqué que «nous avons des opérations pilotes pour la commune électronique à Alger-centre, avec un guichet électronique. Il y a aussi les communes d'El Madania et d'El Mouradia.

On avance pour cet objectif, et à fin 2018, on doit avoir des guichets électroniques avec la mise en place des communes électroniques». Enfin, sur la disparité entre les collectivités locales, notamment entre communes «riches et pauvres», M. Bedoui a expliqué qu'«il faut redonner vie à ces fonds des Hauts-Plateaux et les zones frontalières». Nous préparons un grand dossier au niveau du gouvernement, toutes ces zones seront mises à niveau par le soutien de l'Etat à travers le Fonds de solidarité des collectivités locales«, a-t-il détaillé.

Ce fonds est doté d'un budget de 600 milliards de dinars, mais il ne sera pas débloqué plus de 200 milliards de dinars «en vertu des difficultés financières» actuelles, a-t-il précisé, et c'est ce fonds, ajoute-t-il, «qui est mis en œuvre pour réduire les déficits des communes». L'actuel découpage territorial compte 1.541 communes. «Il y a des communes en difficultés financières, mais pas de communes pauvres», selon le ministre de l'Intérieur, qui a rappelé que le code de la fiscalité communale sera effectif en 2018, tout comme le code des collectivités locales.