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Tribunal criminel: Ce qui va changer dès septembre

par Houari Saaïdia

Evoquant de manière laconique l'entrée en vigueur, dès septembre, de la nouvelle réforme concernant le tribunal criminel, lors de son intervention à l'occasion de l'installation du nouveau PG de la Cour d'Oran, le ministre de la Justice, Tayeb Louh, a bien voulu en livrer de plus amples détails au Quotidien d'Oran.

A l'issue d'une visite d'inspection du chantier du nouveau palais de justice d'Oran, situé à l'USTO, dont les clés seront remises par les Chinois avant la fin d'année, Tayeb Louh, sollicité par nos soins, a donné des informations supplémentaires sur ce sujet.

«Le tribunal criminel, qui siège au niveau de chaque cour, a été revu dans sa composition et dans son fonctionnement. Quels sont les aspects saillants de ce grand changement, qui prendra effet dès septembre, et quel en sera l'impact dans la pratique judiciaire et sur les justiciables ?».

Le ministre de la Justice rappelle qu'«avant les derniers amendements introduits au code de procédure pénale, on ne disposait que d'un seul degré de juridiction». «C'est-à-dire, précise-t-il, qu'une décision rendue par le tribunal criminel n'était pas susceptible d'appel. C'était d'autant aberrant que cette juridiction peut prononcer la condamnation à mort ou la réclusion à perpétuité. On pouvait seulement recourir au pourvoi en cassation auprès de la Cour suprême, celle-ci ne tranchant pas sur les faits mais uniquement sur le droit et la procédure. Alors que l'instance d'appel a le droit de revoir l'affaire et la rejuger à nouveau. Avec cette réforme, on va ainsi se conformer au droit universel qui stipule que tout accusé a le droit d'être jugé à deux degrés. Si la première instance se trompe, la deuxième rattrape l'erreur». En fait, ce principe était appliqué pour les affaires civiles et celles relevant de la correctionnelle, mais jusqu'alors, pas pour les dossiers relevant de la criminelle. «Ainsi, explique encore le ministre de la Justice, le juge d'appel est tenue de rejuger, en fait et en droit, la décision qui lui est dévolue. Il peut infirmer la décision, partiellement ou complètement, ou la confirmer».

Selon les explications du ministre, la composante du tribunal criminel subira, elle aussi, un changement substantiel. Actuellement, le tribunal criminel siège sous la présidence d'un juge aidé par deux magistrats conseillers et deux membres de jury choisis, selon un tableau préétabli, parmi la société civile. «Le tribunal criminel gardera bel et bien son caractère populaire. Mais ce qui changera, c'est qu'il y aura deux cas de figure, selon la qualification de l'affaire enrôlée. Si celle-ci a trait à des faits liés au terrorisme, au crime organisé, à la cybercriminalité et d'autres crimes qui requièrent une compétence pointue eu égard à leur technicité, le tribunal criminel qui siègera sera composé exclusivement de magistrats professionnels. En revanche, dans les autres affaires, disons ordinaires, les jurés dits populaires ou civils seront bien là».

L'autre réforme qui touchera le tribunal criminel consiste en l'annulation de l'ordonnance de prise de corps en application du principe de la présomption d'innocence et son remplacement par l'obligation pour le prévenu poursuivi pour crime, qui n'a pas été mis sous mandat de dépôt pendant l'instruction, de comparaître libre. On sera alors devant deux situations possibles : si le prévenu a fait l'objet d'un mandat de dépôt durant l'instruction, il se présentera devant le tribunal criminel en tant que détenu. Sinon, il se présentera libre après avoir répondu à une convocation. Si durant l'audience, il n'a pas été mis sous mandat de dépôt, il restera libre jusqu'à l'épuisement de toutes les voies d'appel.