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Des spécialistes plaident pour le remboursement des actes médicaux: 10% des couples sont infertiles en Algérie

par M. Aziza

  En Algérie, sur un total de 900.000 mariages par an, 10% des couples sont confrontés à un problème d'infertilité. Bien qu'il existe des centres spécialisés dans la procréation médicale assistée (PMA) dans notre pays et qui ont fait leur preuve, la Tunisie demeure La Mecque des couples souffrant de stérilité. Pourtant, précisent les spécialités, l'Algérie pratique les prix les moins chers au monde, trois fois moins chers que la Tunisie et deux fois moins chers que le Maroc. Une fécondation in vitro (FIV) coûte 700 euros en Algérie, alors qu'elle est pratiquée à 2.000 euros en Tunisie. C'est ce qu'a affirmé le Dr Djender Farid, président de la Société algérienne de médecine de la reproduction (SAMERE), en marge de la tenue du 4e congrès de la SAMERE, hier, à l'hôtel Aurassi. Pour le président de la SAMERE, la Tunisie est devenue une destination de prédilection pour les couples infertiles par le fait que les médecins algériens orientent par réflexe leurs patients chez nos voisins. Et d'affirmer que les Tunisiens font beaucoup de publicité sur leurs centres, notamment à travers les médias pour capter le maximum de couples en détresse. Dr Djender a affirmé que l'Algérie était très en retard dans la procréation médicalement assistée (PMA), mais dit-il, les choses ont changé aujourd'hui. Quinze cliniques pratiquent la PMA en Algérie dont une publique, celle du CHU de Nafissa-Hamoud (ex-Parnet) à Alger. «Mais, affirme-t-il, par manque d'information, la majorité de nos praticiens ne savent pas que des centres existent et que cette spécialité est en progression constante en Algérie». Et d'affirmer que «30% des centres font des résultats honorables». Le taux de grossesse dans certains centres est «meilleur que dans certains centres en Tunisie», atteste-t-il. Et d'affirmer que certains centres font appel à un audit australien pour améliorer davantage la qualité de la reproduction dans notre pays.

Les spécialistes en la matière ont tout de même relevé que le remboursement est limité aux médicaments, sans l'acte médical de la fécondation in vitro (FIV) élevé. Ce qui dissuade, le plus souvent, les couples ayant de petits revenus. Ils précisent que la majorité des cas abandonnent au bout d'une seule tentative. Le président de la SAMERE appelle au nom des praticiens à la démocratisation du traitement de l'infertilité en Algérie, par le remboursement, ne serait-ce qu'une seule tentative de FIV, par les services de la sécurité sociale (CNAS), à l'instar de nos voisins tunisiens et marocains. Les spécialistes ont également demandé aux ministères de la Santé et de la Réforme hospitalière, et de l'Enseignement supérieur d'intégrer dans les études en médecine, le module de procréation médicale assistée. Ils ont également regretté l'absence de centre de référence d'évaluation de taux de réussite de PMA. Et d'affirmer que certains centres se font évaluer dans un centre de référence en France.

La stérilité chez l'homme en nette progression en Algérie

L'infertilité masculine est en augmentation au fur et à mesure des années. Karim Bendhaou, président de Merck pour l'Afrique du Nord et de l'Ouest, a affirmé qu'aujourd'hui, 40% de cas sont dus à l'infertilité masculine. 40% sont dus à une infertilité féminine et pour les 20% restants, les causes ne sont toujours pas connues. Et d'affirmer que cette situation n'est pas propre à l'Algérie, mais ce sont des données générales à travers le monde. Le docteur Djender abonde dans le même sens, en précisant: «J'exerce depuis une quarantaine d'années, à l'époque, je soignais un homme sur 100 femmes, aujourd'hui, les données ont complètement changé, je soigne 7 hommes sur 10 femmes». Et de préciser qu'en Algérie et partout dans le monde, l'homme devient moins fertile à cause des radiations, des aliments bourrés d'hormones comme le cas du poulet, des fruits et légumes pollués par de pesticides. A cela s'ajoutent le tabagisme, l'alcoolisme, la drogue, le stress et l'obésité. Et de préciser qu'un homme normal fertile à l'époque avait 200 à 300 millions par ml de spermatozoïdes, alors qu'aujourd'hui, le meilleur des hommes fertiles a 30 millions/ml de spermatozoïdes, heureusement qu'avec 15 millions de spermatozoïdes/ml, la procréation est déjà possible.

Karim Bendhaou des laboratoires allemands Merck, leader mondial dans le traitement de l'infertilité, précise que l'Algérie a essayé de rattraper le retard dans le domaine de la procréation médicale assistée et les résultats sont déjà là. Il a précisé que Merck a travaillé main dans la main avec les autorités algériennes, avec la SAREME, en participant à toutes les conférences internationales, pour pouvoir mettre à jour le niveau des connaissances. Et pour pouvoir envoyer des gens auditer et valider les centres qui existaient, tout en prodiguant des formations académiques et techniques au profit des praticiens. Il ajoute qu'aujourd'hui, il y a une hausse du nombre de centres, il y a également l'amélioration de la qualité des actes médicaux et des services de qualité en matière de reproduction en Algérie. Sans parler des médicaments de biotechnologie qui sont remboursés par les services de sécurité sociale.

Vers une légalisation pour la congélation des ovocytes des femmes

Le président de la SAMERE, Djender Farid, a affirmé que les centres spécialisés dans la PMA maîtrisent la congélation et vitrification du sperme de l'homme et des ovocytes des femmes. Et d'affirmer que la mise en réserve du sperme de l'homme par congélation est déjà pratiquée en Algérie, pour les personnes atteintes d'un cancer. Il a appelé les gynécologues et les médecins traitants de proposer aux hommes qui désirent protéger leur fertilité de recourir à la congélation du sperme, car rappelle-t-il, certains traitements sont potentiellement stérilisants. C'est valable pour les femmes aussi qui ont la possibilité de préserver leur fertilité avant un traitement à risque d'infertilité. La technique de congélation des ovocytes est utilisée depuis peu dans le traitement de l'assistance médicale à la procréation (AMP), mais il y a toujours un vide juridique dans ce contexte. Le Dr Djender a affirmé qu'une loi pour la congélation des ovocytes des femmes sera probablement introduite dans la nouvelle loi de la santé. «On a eu l'accord de principe du ministère de la Santé», conclut-il.