Curieux
quand même que l'Europe s'angoisse de l'avenir du marché énergétique algérien
et surtout le risque pour le pays de finir dans la violence des mercenaires de Daech et Al-Qaïda. Tout cela sur fond de succession de
l'actuel président Abdelaziz Bouteflika.
A défaut d'arguments rationnels jugeant objectivement du niveau et de la
qualité de la coopération économique UE - Algérie, les groupes de pression et
autres lobbies activant au sein des institutions internationales, plus
spécialement celles de l'UE, dévissent via les médias le débat et
l'argumentation sur le terrain qui prête le plus à équivoque, celui de la
spéculation politique marquée par un paternalisme qui frôle le mépris et sent
la manipulation grossière: en quoi la nature du régime politique algérien
gênerait-elle les intérêts stratégiques, plus précisément ceux liés la sécurité
énergétique de l'Europe ? Faut-il rappeler qu'au
plus fort de la décennie noire et l'instabilité politique aiguë vécue par les
Algériens (1990-2000) l'approvisionnement en gaz (et pétrole) de l'Europe a été
stable, garanti et n'a vécu aucune défaillance ? L'Algérie a honoré son contrat
dans des circonstances d'isolement, justement, par cette même Europe qui
s'angoisse des lendemains de l'Algérie d'aujourd'hui. Le groupe de consulting
américain «NARCO», repris par des sources anonymes (responsables de l'UE ?) et
publié par la revue «Politico» manifeste son impatience de voir un nouveau
régime algérien succédant à celui de Abdelaziz Bouteflika qu'il présage, par on
ne sait quel oracle, imminent. Pourquoi ? Quel régime politique et dans
l'intérêt de qui ? Au-delà de la thèse affabulatrice de réduire et de lier un
régime politique à la volonté d'un seul homme, fût-il Bouteflika, il faut être
naïf pour croire que le sort de l'Algérie et des Algériens inquiète les
responsables politiques européens au point de les voir perdre des parts du
marché énergétique mondial au profit des Russes par exemple. Pour cela, nos
amis Européens et Américains (ANACO est basé aux USA) souhaitent que l'Algérie
ouvre tous azimuts son marché énergétique, lève toutes les barrières douanières
d'une manière générale, en contrepartie d'une relance conséquente des
investissements étrangers (IDE). Autant le dire en un mot : l'
inclusion du pays dans la logique et les standards de la mondialisation
économique. Qu'à cela ne tienne, puisque les experts prédisent l'inéluctabilité
de la mondialisation économique. Seulement, nos conseillers occidentaux
semblent pressés de hâter cette perspective pour l'Algérie sous peine de
faillite, voire de finir dans la violence et la guerre. Du coup, partant d'une
question économique (la coopération énergétique), on retrouve dans les déclarations
et l'article de presse Al-Qaïda, Daech,
l'immigration, la Russie et la Norvège, c'est-à-dire un vocabulaire politique
et géostratégique. L'issue pour échapper au risque de finir dans la violence ?
Le changement rapide du régime politique, comme ça, du jour au lendemain, par
un décret du futur président de la république algérienne. Les Algériens n'ont
rien contre l'évolution de leur pays vers la modernité et la démocratie et
savent, au moins mieux que les Occidentaux, que cela ne dépend pas d'un seul
homme, fût-il le chef de l'Etat. Cette façon des Européens à vouloir réfléchir
à la place des Algériens sur ce qui les arrange le mieux et de vouloir leur
imposer des choix est plus que gênante, préoccupante justement. Brandir la
menace pour l'Algérie de perdre des parts du marché énergétique mondial,
sous-entendu au profit de la Norvège et de la Russie, si elle n'obéit pas à la
logique de Bruxelles est ridicule parce qu'elle n'apprend rien de nouveau au
plus profane des économistes : la concurrence du marché. Attiser les envies
concurrentiels entre Algériens, Russes et Norvégiens, c'est-à-dire les
fournisseurs de l'Europe en gaz en ces moments de baisse des prix (le prix du
gaz est aligné sur celui du pétrole) n'est pas un gage d'élégance, voire d'honnêteté
diplomatique. En revanche, pour l'Algérie, penser et étudier le retour effectif
sur la vie des populations de toute décision macro-économique de cette nature
est une autre affaire : par quoi l'Etat algérien va-t-il remplacer ses recettes
fiscales en livrant son marché énergétique à la concurrence vorace des grandes
multinationales des hydrocarbures ? Accuser la règle des 51 / 49 % sur le
partenariat économique comme seul frein à l'investissement étranger est un peu
court même si elle renferme une part de vérité aux yeux, naturellement, des
investisseurs étrangers. Aux yeux des Algériens, cette règle permet à l'Etat de
financer l'éducation nationale, la santé, le logement social, les produits de
large consommation. La conjoncture actuelle de l'Algérie commande à ne pas
prendre de décision précipitée qui risque d'hypothéquer sa relative stabilité
économique tant que les réformes structurelles n'aient porté leurs fruits dans
tous les secteurs de la vie du pays. Quant à la question de l'avenir de
l'Algérie et l'élection du prochain président, seuls les Algériens en
décideront le moment venu.