«El Kissas», le terme arabe emprunté au Saint Coran, revient
tel un leitmotiv au devant de la scène à chaque fois
que la population est durement frappée dans sa plus tendre chair, lors de
l'enlèvement et de l'assassinat d'enfants innocents. Ainsi, la revendication de
l'exécution de la peine de mort est brandie ces jours-ci par les foules depuis
la disparition tragique de la petite Nihal.
Hier, l'onde de choc a fait retourner le couteau dans la plaie ouverte
pour l'éternité dans les cœurs des parents de victimes des rapts d'enfants de
la wilaya de Constantine, qui ont organisé vers 9h 30mn, hier, à square Bennacer, non loin du Palais de justice, un rassemblement
de solidarité avec la famille de la petite Nihal, et
qui sont revenus sur la revendication qu'ils n'ont pas cessé de remettre sur le
tapis, en l'occurrence l'application de la peine de mort contre les coupables
d'enlèvements et d'assassinat d'enfants. Ils
étaient tous au rendez-vous, principalement les parents des enfants Ibrahim et
Haroun, lâchement assassinés en 2013 à la nouvelle ville de Ali-Mendjeli, de Salaheddine de Ouled Rahmoune, toujours porté
disparu depuis le 1 mai dernier, de Yasser de Massinissa, et du petit Laith Kaoua, enlevé à la
maternité du CHUC et retrouvé vivant, fort heureusement, chez une femme près de
trois semaines plus tard, mais toujours profondément traumatisés. Ils étaient,
donc, près d'une quarantaine de personnes, ces parents au cœur toujours meurtri
par la douleur, accompagnés de proches et d'amis ainsi que d'enfants camarades
de classe ou de quartier des victimes, à se rassembler au square Bennacer, brandissant des banderoles où les écrits
appellent à l'application de la peine de mort, ainsi que des photos d'enfants
ravis aux leurs par des mains criminelles. Vers 10 heures 20 minutes, une
petite partie des contestataires a décidé de faire une marche, depuis les
allées Benboulaid jusqu'au cabinet du wali, pour
marquer leur solidarité avec tous les enfants victimes d'enlèvement et faire
entendre leur voix aux autorités locales. Les protestataires, qui se sont
arrêtés devant le cabinet du wali, entourés d'un discret dispositif
sécuritaire, brandissaient le drapeau national, des posters du président de la
République et des banderoles où il était écrit «nous demandons justice, El Kissas», autrement dit, la peine de mort pour les auteurs
d'enlèvements d'enfants. De même que s'adressant aux responsables du pays, ils
criaient « ministre, et si l'enfant kidnappé était ton fils, quel serait ta
réaction ? ». Les parents de Haroun et d'Ibrahim de
Ali-Mendjeli ont déclaré qu'à chaque enlèvement
d'enfants dans le pays, ils ressentent la même douleur qui leur revient et
éprouvent leur solidarité avec les parents des victimes, car « ils mesurent
toute la peine qui est la leur et les assurent de leur soutien». «Si l'assassin
de mon fils sort de prison dans 70 ans, je le tuerais », a lâché B. Salim, le
père de Brahim, avant la dispersion du sit-in qu'on promet de renouveler dans
les prochains jours, plus vaste encore. Un sentiment de vengeance ? « Non, car
je privilégie l'application de la peine de mort par la justice, mais si tel
n'est pas le cas, j'avoue que je ne supporte pas l'idée que l'assassin de mon
petit est encore en vie. Et aucun père ne peut supporter cette épreuve », s'est
expliqué B. Salim. A les voir, ces parents d'enfants victimes de kidnapping,
qui se mobilisent pour l'application de la peine de mort, on ne peut que croire
à la sincérité de leur réclamation. Mais la vague est là pour d'autres?partout
en Algérie se forment des groupes de pression qui portent haut et fort sur la
scène publique cette revendication, des groupes souvent classés dans la
catégorie des acteurs politiques du courant islamiste, qui ne s'en cachent pas,
d'ailleurs, de défendre ce principe de l'application de la peine de mort, et
cela n'est pas un choix mais une exigence de la chariaâ,
ne manquent-ils pas de souligner. Bien évidemment, ébranlée par l'émotion, la
population a toujours suivi cette règle de conduite, et sans chercher à trop
philosopher sur la question, l'application de la peine de mort contre les
assassins des enfants coule de source dans les propos de la majorité des
citoyens. A ce jour, la peine de mort est toujours appliquée dans 58 États et
territoires, alors que 103 États l'ont abolie pour tous les crimes, 6 l'ont
aboli pour les crimes de droit commun, et 32 respectent un moratoire sur les exécutions,
dont l'Algérie.