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Selon l'assureur français Coface: L'économie algérienne dans le rouge

par Mahdi Boukhalfa

L'économie algérienne serait dans le rouge avec un risque « élevé », indique dans son dernier rapport trimestriel de juin 2016, l'assureur-crédit français Coface, qui a déclassé la note de l'Algérie de B à C, avec risque élevé. La Coface estime dans cette évaluation trimestrielle de juin que la croissance économique mondiale sera en baisse en 2016. Dans sa révision trimestrielle des évaluations risque pays, la Coface annonce dans un communiqué rendu public mardi à Paris que « la prévision de croissance mondiale en 2016 a été revue à la baisse de 0,2 point à 2,5%, que la moyenne du risque mondial correspond à B (risque assez élevé), et que de « plus en plus de pays émergents figurent dans les catégories de risque extrême et très élevé. » En outre, les trois plus grandes économies mondiales (Etats-Unis, Chine et Japon) « sont fragilisées », alors que « l'Europe est engagée dans une dynamique positive, mais le risque politique alimenté par le Brexit est à surveiller ». Globalement, l'économie mondiale, exceptée l'« Europe, est en décroissance, et le risque pays est en hausse, selon la Coface, qui a déclassé plusieurs pays, dont l'Algérie, qui passe de la note A4 en 2015 à B au premier trimestre 2016 et maintenant à C (risque élevé) dans la dernière révision. En cause, la chute du prix du pétrole, l'Algérie étant un pays mono-exportateur d'hydrocarbures. Or, sur le marché pétrolier, la baisse permanente des prix du brut a fait que l'Algérie ne va plus engranger fin 2016 que la moitié de ses recettes pétrolières de 2015, soit un peu plus de 34,5 milliards de dollars, au moment où le déficit budgétaire, couplé à une baisse des investissements publics, devrait atteindre les 30 milliards de dollars au 1er semestre 2016. Dans sa dernière prévision, la Coface relève que « la baisse des prix du pétrole continue à se faire ressentir au sein des pays exportateurs de pétrole. L'Arabie saoudite (nouvelle évaluation B), Koweït (A3), Qatar (A3) et l'Algérie (C) voient leur déficit public se creuser davantage et l'activité hors hydrocarbure ralentir ».

Algérie : fondamentaux en chute libre

Les évaluations risque pays de Coface mesurent le risque de crédit moyen des entreprises d'un pays, sur une échelle de 8 niveaux : A1, A2, A3, A4, B, C, D, E, dans l'ordre croissant du risque. L'assureur français, qui a déclassé l'Algérie en C avec risque élevé après un B en janvier dernier pour le climat des affaires, note dans son rapport de juin que «le pays reste fortement dépendant des hydrocarbures» et «la politique budgétaire expansionniste menée jusqu'en 2015 a permis de limiter l'impact du choc pétrolier sur l'activité économique, mais la croissance devrait ralentir en 2016 en raison d'une baisse des dépenses publiques». En outre, l'Algérie «a connu en 2015 un déficit record pour la seconde année consécutive. Ce dernier atteindrait 15% en 2016, après avoir atteint 16% en 2015 selon les dernières données du FMI». Plus loin, la Coface ne manque pas de relever que «le Fonds de régulation des recettes (FRR) tend à s'épuiser (passant de 25,6% du PIB en 2014 à de 12,3% du PIB en 2016)», et «le déficit du compte courant continue de se creuser, alors que les exportations d'hydrocarbures ont chuté de près de moitié». Dans cette grisaille, la Coface fait remarquer que «les flux IDE restent faibles et n'excèdent pas 1% du PIB'', alors que «les réserves de change bien qu'importantes ont diminué ». Dans son intervention lors de la dernières tripartite, le Premier ministre Abdelmalek Sellal avait situé ces réserves de change à 136,9 milliards de dollars à fin mai 2016 contre 143 md de dollars à fin 2015.

Menaces sur les réserves de change

Déjà, lors de sa révision en janvier dernier, le Coface notait que « les importantes réserves de change et le faible endettement public ont permis aux autorités de faire face au choc induit par la baisse du prix des hydrocarbures en 2014 et 2015 ». « Cependant, la fonte des réserves de change et la diminution de moitié du fonds de régulation en 2015 limiterait les perspectives de financement en 2016 et conduirait à une augmentation de la dette publique estimée à 30 % », prévenait alors l'assureur-crédit français, pour qui « les comptes extérieurs continueraient de souffrir de la baisse des recettes d'exportations en 2016 ». La COFACE a, par ailleurs, dégradé en janvier dernier la note de l'Algérie de A4 à B, en raison du « faible prix » des hydrocarbures qui continue à « peser sur l'activité algérienne en 2016 ». La note B concerne les pays dont les perspectives économiques et financières présentent des incertitudes et dont l'environnement des affaires peut présenter « d'importantes lacunes », avec une fiabilité et une disponibilité des bilans d'entreprises « très variables » et un recouvrement des créances « souvent difficile ». Bref, l'Algérie traverse une dure période économique, avec à la clé une baisse de ses recettes d'hydrocarbures et des IDE sur fond de détérioration des principaux fondamentaux dont une hausse du déficit de la balance des paiements et budgétaire, ainsi qu'un affaiblissement du FRR. Ailleurs, l'assureur-crédit estime également le risque «assez élevé» en Tunisie, «élevé» en Égypte et «extrême» en Libye. Parmi les pays arabes, le Qatar, le Koweït, les Émirats arabes unis et l'Arabie saoudite maintiennent les meilleures notes (A2 à A3), mais ont été déclassés.