Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Ces Algériens qui nous honorent

par Ahmed Farrah

Des spots sont souvent projetés sur les sportifs et plus particulièrement les footballeurs algériens qui jouent dans les championnats européens, jetant ainsi le voile noir sur ceux qui corrigent les a priori sur l'Arabe de chez-lui et celui ghettoïsé dans les quartiers et dans les banlieues des villes occidentales, condamné à ne réussir que dans le sport ou le spectacle. D'autre type d'Algériens pratiquement méconnu du grand public de ces pays. Ceux-là sont sortis de leur pays avec des bagages intellectuels et des bases scientifiques. Ils sont établis en Amérique du Nord, en Europe, au Japon et dans les pays du Golfe, faisant le bonheur des pays qui les ont accueillis à bras ouverts. Ils sont chercheurs dans les grands laboratoires, à la NASA, professeurs dans les plus prestigieuses universités occidentales, médecins dans les hôpitaux français, belges, canadiens?Ils sont partout présents dans tous les domaines de la technologie de pointe et de la recherche fondamentale comme le nucléaire, les accélérateurs de particules, les nanosciences, la biotechnologie, la biologie, la génétique, le cancer?

Des centaines de brevets d'invention et d'innovation leur appartiennent. Des milliers de publications spécialisées consacrent les résultats de leurs recherches. Beaucoup d'entre eux ont reçu de hautes distinctions les honorant pour leur contribution au rayonnement scientifique de leur pays hôte. Quasiment tous ont fait le choix de réaliser leurs rêves de graver leurs noms dans le marbre de l'histoire de l'humanité. Le rêve est souvent plus fort que tout autre chose, le réaliser ne se fait pas sans sacrifice et sans déracinement. On ne quitte pas son pays sans en payer le prix. S'ils ont émigré c'est parce qu'ils n'avaient pas trouvé les conditions favorables à l'accomplissement de leurs ambitions et de leur raison d'être, qui est la science. Des médecins pouvaient rester au pays et se faire de l'argent en ouvrant des cabinets très lucratifs, ils ne l'ont pas fait parce que ce n'était pas leur motivation première. D'autres scientifiques se sont trouvés enchaînés dans les boulets du sous-développement qui les empêchent d'avancer. Le plafond de verre est partout érigé en dalle sur les têtes pensantes, inhibant les persévérances et brisant les volontés aussi tenaces soient-elles. Comme aussi, réussir dans un environnement hostile au mérite est pratiquement irréaliste dans des pays où les mentalités restent archaïques, obscurantistes et défavorables à l'intelligence. Que peuvent-ils donner à leur pays s'il est à la traîne du savoir, faute d'une école encore à la recherche d'elle-même et gaspillant les énergies créatives, que peuvent-ils faire si le rêve d'une Algérie développée à la manière de la Corée du Sud s'est consumé avant de voir le jour ! La seule chose réalisable de sitôt est que cette élite expatriée tisse des liens avec la communauté universitaire et scientifique en Algérie où elle a acquis sa formation de base, dans la voie de tracer un chemin menant à allumer la flamme rayonnant une autre mentalité et semant la graine de la performance, la créativité et l'innovation, mais tout cela ne sera que des mots creux si une volonté politique n'est pas réellement affichée et concrètement mise en chantier. Le rêve demeure permis tant qu'il y a encore des Algériens honorant leurs dettes envers le pays qui les a faits, à leur manière, soit ici, soit ailleurs en ambassadeurs émérites, c'est le moins qu'on puisse attendre d'eux.