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Les plages de la corniche à dix jours de l'ouverture de la saison estivale: Les étés se suivent? et se ressemblent

par Rachid Boutlélis

La cruelle déchéance des plages jalonnant la prestigieuse côte de la contrée d'Aïn El Turck a complètement gâché ce week-end ensoleillé à des centaines de visiteurs, venus de différents région du pays et ce, en se référant aux plaques d'immatriculation relevées sur leurs véhicules. Sur les plages de la principale commune d'Aïn El Turck où les solariums ont refait leur apparition en dépit de leur interdiction, récemment promulguée par le ministre de l'Intérieur, les amas d'une variété de détritus recouvrant de grandes superficies de sable, dont certains datent vraisemblablement de la dernière saison estivale, ne semblent désormais plus émouvoir quiconque. Les émanations pestilentielles qui se dégagent de ces tas d'ordures, entassées depuis des mois, embaument l'air iodé et ont grandement contribué à la déception qui se lisait sur les visages des personnes ayant choisi un week-end au bord de la mer sur la côte d'Aïn El Turck pour déstresser et respirer le grand air marin.

L'incivisme et sa fratrie n'ont pas eu finalement à faire de grands efforts pour ajouter leur petit grain de sel à ce triste décor qui semble augurer d'ores et déjà une saison estivale embourbée dans une situation de déliquescence encore pire que celle de l'année précédente. Toujours est-il que ce piteux constat a gâché une sortie d'oxygénation au bord de mer pour les dizaines de familles et autres groupes de jeunes et moins jeunes, venus lors du week-end de la cité éponyme de Sidi El Houari, de ses localités limitrophes et des autres régions du pays. La repoussante saleté des plages a fait réagir de nombreuses personnes qui ont exprimé leur vif désappointement en dénonçant le laxisme ayant enfanté cette situation de pourrissement au sens propre du terme.

« La dégradation des plages va crescendo. Cela s'est encore empiré depuis ma dernière visite l'été dernier. N'y a-t-il personne de conscient qui puisse être capable d'arrêter ce massacre à ciel ouvert ? », s'est interrogé avec dépit un quinquagénaire accompagné de sa famille, venu de la commune d'El Amria dans la wilaya d'Aïn Témouchent pour faire profiter à ses enfants d'un week-end ensoleillé au bord de la mer. D'autres interlocuteurs du village côtier de Cap Falcon et la localité de Coralès ont déploré, en plus de la saleté ambiante de cette prestigieuse côte et l'obstruction des accès aux plages, ce qu'ils « ont qualifié de la bidonvilisation des plages dans leur lieu de résidence ». Les interlocuteurs du Quotidien d'Oran ont été unanimes à revendiquer l'intervention du chef de l'exécutif de la wilaya d'Oran pour démêler cet écheveau. « Nous invitons le wali à effectuer une visite inopinée, sans protocole, dans n'importe quelle plage de son choix de cette contrée et ce, afin qu'il constate lui-même de visu la pitoyable déchéance de cette côte et surtout la défaillance des quatre stations de relevage avec tous les impacts négatifs qui en découlent sur l'environnement et le cadre de séjour ».

Selon le constat établi sur le terrain par Le Quotidien d'Oran, l'incomparable anarchie qui a régné en maître absolu au cours de la dernière saison estivale dans la région côtière d'Aïn El Turck, en charriant un incroyable lot varié de couacs, ne semble en toute vraisemblance pas avoir provoqué le déclic attendu chez les responsables concernés et ce, pour éviter une situation similaire cet été. Beaucoup de leçons auraient, en effet et en principe, dû être tirées de l'éventail d'imperfections qui a énormément contrarié et consterné en même temps un grand nombre de vacanciers, et ce, au point que certains d'entre eux ont juré in petto d'opter pour une autre destination.

Incivisme des uns et laxisme des autres

La flagrante et tant décriée insalubrité des lieux, notamment des plages, est également à additionner avec l'offre d'une piètre qualité des conditions de séjour dans la grande majorité des établissements hôteliers ainsi que l'absence totale d'animation, ont constitué les principaux facteurs attribués au gâchis de la dernière saison estivale. Les estivants ont constaté aussi à leurs dépens le dictat imposé par les exploitants des solariums clandestins, les pseudo-gardiens de parkings et les flagrantes et dangereuses infractions des jet-skis. Très peu ou rien n'a été entrepris pour tenter d'endiguer un tant soit peu ces transgressions qui ont tendance en toute vraisemblance à se répéter cette année. Ce triste état de fait a été à l'origine d'une large diversité de répercussions négatives sur les conditions de séjour pour les vacanciers et par ricochet sur la dégradation de l'environnement, qui vont crescendo dans cette région côtière appelée, ironie du sort, à participer pleinement à l'essor du tourisme, l'un des poumons de l'économie du pays et a encore été choisie comme zone d'appui pour les Jeux méditerranéens qu'organisera la capitale de l'Ouest en 2021.

« A mon humble avis, nous avons beaucoup à apprendre pour prétendre être en mesure d'assumer ces responsabilités malgré les nombreuses potentialités qu'offrent notre contrée. Ce n'est certainement pas avec ces multitudes regroupements de constructions illicites et autres alignements de masures hideuses sur les plages, qui ne cessent de foisonner au fil du temps que nous réussirons à forcer l'admiration. Il y a longtemps que nos responsables auraient dû retrousser leurs manches pour mener à temps des opérations régulières avec un suivi rigoureux à même d'apporter des correctifs qui permettront d'améliorer les conditions d'accueil pour les vacanciers attendus cet été d'une part et du cadre de vie de la population de cette contrée d'autre part », a fait remarquer au Quotidien d'Oran un vieux riverain de la localité de Bouiseville avant d'ajouter « ce n'est pas en lançant précipitamment, à la veille de la saison estivale, des opérations d'embellissement anodines de bricolage que nous parviendrons à leurrer notre monde et le convaincre ainsi à nous accorder de bonnes notes. L'aberrant est qu'à moins de deux semaines de l'ouverture de la saison estivale, rien n'a été fait».

D'autres remarques, encore beaucoup plus pertinentes et lourdes de sens, ont été formulées à ce sujet par nombre d'autres interlocuteurs adeptes du rétablissement de l'ordre dans tous les sens du terme. D'autres encore, d'anciens habitants de cette région côtière, ont invoqué les temps jadis. « Je me souviens très bien de l'époque au cours de laquelle il régnait une ambiance conviviale sur les plages, résultant du suivi rigoureux et de leur l'entretien régulier. Ce n'est malheureusement plus le cas aujourd'hui et nous ne sommes plus surpris de voir le porc sauvage glandouillant aux côtés du chien errant sur ces mêmes prestigieuses plages ». Une remarque qui ne fait que résumer le piteux constat de cette côte à quelques jours seulement de l'ouverture officielle de la saison estivale qui s'annonce d'ores et déjà chaude dans tous les sens du terme.

La bidonvilisation? une plaie béante

La bidonvilisation des plages, qui a commencé à se manifester ces cinq dernières années, a ajouté une touche noire supplémentaire à ce triste tableau qui a fait réagir dernièrement le wali d'Oran en sommant les responsables locaux « d'assumer leurs responsabilités respectives à ce sujet». Une piètre opération de démolition ayant eu l'effet sur les défenseurs de l'environnement du bruit d'un petit caillou qui dégringole dans un puits vide, a été opérée par les responsables concernés pour faire bonne mine devant les remontrances du chef de l'exécutif de la wilaya d'Oran. L'envahissement des masures hideuses érigées illicitement agresse toujours le regard, même du plus imperturbable, de la petite localité de St Roch, sur le territoire de la commune d'Aïn El Turck jusqu'à la localité de Bousfer Plage. Ce phénomène n'a épargné aucune plage de cette côte. La cruelle déchéance des plages n'est pas uniquement à mettre à l'actif de la bidonvilisation mais aussi à la saleté ambiante additionnée à un éventail de déblais provenant des constructions et autres extensions illicites, qui recouvrent désormais de grands espaces de sable et ne semblent à priori plus déranger les consciences. Les riverains dont les habitations longent cette prestigieuse côte ont eu souvent à retrousser leurs manches pour nettoyer les plages mitoyennes à leurs lieux de résidence.

Toujours est-il qu'aucune véritable opération à même de remédier à cette situation de déliquescence ayant accouché ce piètre constat n'a été entreprise ces dernières années. Les seules actions, qui se sont avérées être finalement insuffisantes en raison des moyens limités, ont été menées dans le cadre de volontariats concoctés par des riverains, las de dénoncer la dégradation de leur cadre d'environnement et ayant en toute vraisemblance perdu tout espoir quant à une suite effective sur le terrain à leurs montagnes de doléances. L'ironie du sort veut que ce soit la zone d'extension touristique, ZET, englobant le village de Cap Falcon, la localité de la Madrague et le lieudit Pain de Sucre, qui est la plus touchée par la bidonvilisation et ce, avec l'installation de plusieurs regroupements de masures hideuses qui enlaidissent le paysage. Ce ne sont plus les fameux prétendus garages à bateau, qui ont fait leur temps, mais des constructions illicites avec des terrasses et vue imprenable sur mer, dont la grande majorité est équipée de compteurs d'énergie électrique et se négocient à partir de 100 millions de centimes, sans aucun document administratif afférent, au vu et au su de tout un chacun.