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Toufik, Rebrab, Hanoune: Le tir de barrage de Saâdani

par Moncef Wafi

De Tebessa où il animait, hier, un meeting populaire, le SG du FLN a été fidèle à lui-même, tirant à boulets rouges sur ses ennemis, et par extension dans sa logique, les ennemis de Bouteflika. Dans une diatribe enfiévrée, Amar Saâdani s'en est pris, tour à tour, à Toufik, Louisa Hanoune, Rebrab, Belayat, les partis de l'opposition, enfin, à tous ceux qui ne partagent pas ses opinions et qui ne se rangent pas derrière lui. Mais celui qui a, le plus, pris pour son grade reste l'ancien N°1 du DRS, le général major Mohammed Mediene, dit Toufik, dit aussi «Rab Dzaïr». Saâdani a, ainsi, accusé un lobby assimilé «à une pieuvre avec cinq bras», de mener campagne, à travers plusieurs relais, pour imposer son homme à El Mouradia. Et à Saâdani de détailler ses cinq tentacules: sécuritaire, médiatique, politique, financier et administratif.

Et il est aisé de deviner les hommes censés représenter les têtes de ponts de ses relais puisque, et sans surprise, on retrouve l'ancien patron des Services aux commandes du bras sécuritaire, secondé par des généraux, à la retraite, ou limogés. Aux comptes, c'est l'homme d'affaires Issad Rebrab qui est en point de mire des tirs de Saâdani. Il est, notamment, accusé de faire le jeu de Toufik, à travers le rachat d' «El Khabar». Pour le SG du FLN, ce n'est pas le patron de Cevital qui souhaite reprendre «El Khabar» mais bel et bien Toufik «la tête de la pieuvre», affirmant que l'argent de la transaction a été retiré de la Banque centrale «avec des noms d'emprunt». Des accusations graves, sans l'ombre d'une preuve, qui contribuent à polluer, un peu plus, la scène politique dont les débats souffrent de médiocrité et de décadence, du propre aveu de Ali Benflis. Sur sa lancée, Saâdani croit savoir que le général à la retraite avait, déjà, projeté de racheter le quotidien «El Watan» en vue de la prochaine présidentielle. Remettant, encore, une couche, il le dénigre, indiquant que «la tête de la pieuvre, celle qui désignait les présidents et les ministres, en Algérie, n'est même pas en mesure, aujourd'hui, d'imposer un chef de daïra», d'où sa volonté d'acquérir les deux titres pour «exercer sa pression et imposer son choix». Deux hommes, deux cibles encouragées à être chassées, Saâdani n'épargnera pas, non plus, Rebrab, lui reprochant d'avoir profité et évolué durant les années 90, grâce au général Toufik.

Le soupçonnant de vouloir faire «maintenant de la politique», il le menacera directement de faillite. «Il faut choisir entre la politique et les affaires. Si Rebrab opte pour le premier, il perdra son argent». Un destin qui rappelle, curieusement, celui de Khalifa Abdelmoumen. Quant aux appuis politiques de cette pieuvre, le SG du FLN de désigner les partis d'opposition «trotskiste, socialiste ou démocrate», citant, nommément, le Parti des Travailleurs de Louisa Hanoune, l'une de ses têtes de Turc préférées. Cette dernière qui avait appelé, ce vendredi, la justice à s'autosaisir, après les accusations du P-DG d' ?Ennahar' contre sa personne, celle de Toufik et de Rebrab affirmant que ce dernier avait financé le terrorisme. Dans l'esprit de Saadani, ce triumvirat (Toufik, Rebrab, Hanoune) est la cible à abattre, allant jusqu'à imaginer un complot qui se cristallise, dans le rachat d' «El Khabar». Pour lui, il ne fait aucun doute que c'est Toufik qui est derrière le rachat du quotidien arabophone, à travers Rebrab, sous la bénédiction de Hanoune qui «ne voit aucun inconvénient à ce qu'on vende les employés d' «El Khabar», à l'homme d'affaires, Issad Rebrab». Saâdani prend, également, la défense d'un Hamid Grine, «plus propre et plus intègre que tous les écrits journalistiques qui le ciblent», accusant, au passage, la presse qui s'attaque au ministre de la Communication de travailler sous les ordres de Toufik.

L'opposition interne dans son parti sera, aussi, laminée et son premier pourfendeur, Abderrahmane Belayat, est aux ordres «du même cercle qui a envoyé la photo du président, au Premier ministre français, Manuel Valls». Il n'oubliera pas de rappeler son soutien et sa fidélité au président de la République, tout en brandissant la menace extérieure, pour consolider un front intérieur commun.