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Rapport national sur le développement humain: Les jeunes ne font pas confiance au politique ni aux associations

par M. Aziza

Au-delà des statistiques sur la déperdition scolaire et sur le taux de chômage chez les jeunes Algériens, le rapport national sur le développement humain élaboré par le CNES (2013-2015) fait état de stratification des niveaux de confiance des jeunes vis-à-vis des organisations de la société civile, les institutions électives et les partis politiques .

Les rédacteurs du rapport, rendu public hier, à Djenan El Mithaq, expliquent cette réticence par le sentiment de méfiance induit par les effets négatifs de la période difficile que l'Algérie a connue dans les années 90.

Et de préciser encore qu'aujourd'hui «après les institutions religieuses, c'est l'armée et la police qui gagnent la confiance des jeunes». Et d'ajouter: «alors que tout ce qui est organisations de la société civile, institutions électives et partis politiques semblent les rebuter».

Si la crise de confiance des jeunes à l'égard du politique, qui s'est déjà traduite par l'abstention dans les différentes élections, est un constat déjà connu et qui fait déjà l'objet de débat, cette confiance des jeunes vis-à-vis du religieux et des corps de sécurité doit susciter des questions, voire des débats. L'élément pertinent est le fait que les jeunes Algériens font beaucoup plus confiance dans le religieux et les corps de sécurité (police et armée) au détriment des organisations de la société civile et politiques. Le rapport national sur le développement humain fait état d'une lecture critique des données sur la participation des jeunes Algériens dans les sphères sociale et politique. Il confirme parfaitement le constat fait au niveau mondial sur l'aversion de cette frange aux formes classiques de participation. «La désaffection des jeunes Algériens pour les organisations de la société civile et politiques est particulièrement édifiante». Cela dénote, selon le rapport, à quel point la réponse politique à la question du renforcement de la participation économique et sociale des jeunes nécessite une réponse «holistique» et appelle les décideurs à être davantage à l'écoute afin d'inverser cette tendance.

Les experts dans le développement humain ont également précisé que la religion se présente comme un référent indiscutable pour les jeunes Algériens, notamment pour la fille en ce sens qu'elle est sa principale source de valeurs qui régit ses appréciations et ses relations sociales. C'est évident, la jeunesse est une force positive pour le changement, la transition et le développement, notre pays est gâté dans ce sens, puisque le caractère jeune de la population est davantage renforcé. Les dernières évolutions démographiques ont fait connaître à l'Algérie en 2014 un record historique de plus d'un million de naissances vivantes. Il s'agit selon les rédacteurs du rapport «d'un atout sur lequel il faudra fonder l'ensemble de politique de développement». Il n'y a pas de recette miracle, les experts recommandent des investissements efficients dans l'enseignement, la formation et la santé pour lutter contre les comportements à risque.

500 000 enfants quittent l'école prématurément

Les rédacteurs du rapport ont beaucoup insisté sur la nécessité d'investir d'une façon efficiente dans le secteur de l'éducation et de la formation. Ils estiment que la probabilité de faire admettre un enfant aux études supérieures ou à une formation qualifiante doit être fortement optimisée, afin de garantir un retour sur l'investissement consenti en matière d'éducation. Autrement dit, il faut limiter davantage la déperdition scolaire devenue un véritable problème de société. Actuellement, selon le rapport, près d'un million et demi d'enfants sont soumis au redoublement. Et de préciser que près de 500 000 enfants finissent par quitter l'école prématurément. Ce qui est, selon le CNES, un signe manifeste de manque de performance du système éducatif. Il recommande dans ce sens un suivi et un contrôle permanent pour ne laisser aucun enfant quitter le système éducatif sans s'armer d'un socle minimum de connaissances, et ce, à travers le territoire national.

C'est pareil pour l'enseignement supérieur, où les experts recommandent un retour d'investissement à la faveur de l'économie nationale. Ils recommandent de former une masse critique suffisante pour un nouveau souffle en matière de créativité et d'innovation.

Les rédacteurs du rapport recommandent l'installation rapide de passerelles intra-système entre les trois composantes (éducation, formation professionnelle et enseignement supérieur) afin d'assurer une orientation appropriée aux aptitudes des élèves et éviter les échecs traumatisants. Il a été noté que les jeunes, notamment les diplômés, se trouvent le plus souvent exposés au chômage, et lorsqu'ils y échappent, ils se trouvent également enclins à occuper des emplois précaires.

29,9% de taux de chômage chez les jeunes en 2015

L'expert Jaques Charmes a indiqué dans le rapport sur le développement humain 2015 que le travail est au service du développement humain. Et de préciser que le travail n'est pas forcément synonyme de développement humain, car il existe toujours des formes de travail qui portent atteinte au développement humain, le cas du travail des enfants, travail forcé et le travail risqué. En ce qui concerne l'Algérie, Jaques Charmes a indiqué que le fléau du chômage chez les jeunes touche le monde entier avec des proportions différentes. Il a précisé que le taux de chômage des jeunes en Algérie en 2015 a atteint les 29,9%. Il a également fait état des inégalités entre les hommes et les femmes dans le travail rémunéré et non rémunéré. Il a précisé que les femmes en Algérie contribuent à 58% dans le monde du travail contre 42% pour les hommes. Il a également souligné que la part du travail rémunéré qui revient aux hommes en Algérie est près de 93% contre 7% seulement pour les femmes en Algérie. Il a en outre indiqué que lorsque les femmes sont rémunérées, elles gagnent 24% moins que les hommes.

L'expert a indiqué que l'Algérie se situe au 83ème rang mondial sur 185 pays dans le groupe des pays à développement humain élevé. Il a précisé que depuis 1990, l'indice de développement humain (IDH) de l'Algérie a progressé à un rythme moyen annuel de 1,04%, ce qui est nettement au-dessus de la moyenne du groupe des pays à développement humain élevé (0,95%) ou du groupe des pays arabes (0,90%).