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La démocratie apaisée, l'on en est loin

par Kharroubi Habib

La consolidation du consensus national à laquelle, depuis sa réélection pour un quatrième mandat, Bouteflika appelle acteurs politiques et citoyens à s'y atteler en leur prêchant que c'est la seule démarche qui immunisera l'Algérie en butte aux complots externes et internes qui se trament contre elle par ses ennemis, encouragés par la situation difficile tant endogène qu'exogène qu'elle traverse, reste une vue de l'esprit qui n'est pas près de se concrétiser tant que le pouvoir auquel il préside persistera à n'entendre par consensus national que celui se faisant autour de lui et contribuant à sa pérennisation.

Il en a résulté que l'opposition refuse de servir de faire-valoir à toutes les initiatives de ce pouvoir censées allant dans le sens de la consolidation du consensus national et que les citoyens n'y adhèrent pas car s'estimant à juste titre privés du droit d'exprimer leur opinion sur la sorte de consensus national dont l'Algérie a besoin et sur quelles en sont les conditions préalables. Le pouvoir n'en a pas pour autant tiré la conclusion qu'il fait fausse route et accentue l'isolement et le rejet qu'il encourt au sein de la société favorisant les visées malintentionnées dont l'Algérie est la cible. Il persiste et signe au contraire dans l'entêtement à se considérer comme seule source de la volonté nationale ayant à statuer sur ce qu'il convient de faire pour préserver le pays, son unité et sa stabilité.

A l'opinion qui a émis des propositions à même, de son point de vue, de faire émerger un possible consensus national, il a opposé une fin de non-recevoir et a confirmé à celle-ci qu'il n'est nullement dans la recherche d'une solution politique à la crise nationale dont il est l'origine et la cause mais dans celle de sa préservation quitte à plonger le pays dans la situation à la survenance de laquelle ses ennemis rêvent et espèrent. Aux citoyens qui lui ont fait connaître leur aspiration à des changements dans le système politique qui régente la vie du pays, sans pour autant qu'ils se rallient aux voix qui réclament son démantèlement pur et simple, il ne délivre qu'un discours paternaliste dont ils retiennent qu'il ne leur est pas concédé le droit d'être consultés et considérés comme acteurs actifs dans un quelconque processus de changement.

Pour ceux qui malgré cela ont entretenu l'espoir que l'autisme du pouvoir cesserait en raison de la gravité de la crise nationale, le désenchantement a été on ne peut plus atterrant devant la démarche adoptée par lui pour concevoir et réaliser une révision constitutionnelle qu'il présente comme conforme par son contenu à leur aspiration de changement. Ils n'ont été consultés ni d'une façon ou d'une autre et pas même appelés à la ratifier. Leur totale mise à l'écart du processus suivi pour concevoir et adopter le projet révisionnel vaut une fois de plus confirmation qu'ils ne sont aux yeux du pouvoir que masse malléable et consentante à laquelle l'on ne demande ni son avis et encore moins son accord.

Faut-il s'attendre qu'avec une opposition avec laquelle le pouvoir ne veut rien avoir à faire et des citoyens frustrés par la marginalisation et l'infantilisation qu'ils subissent, l'Algérie s'achemine vers la « démocratie pacifiée » dont Bouteflika a promis la survenance durant son quatrième mandat ? Rien n'est moins sûr.