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Alain Juppé: La primaire de la droite française s'invite à Oran

par Houari Saaïdia

Hier à Oran, Alain Juppé a eu beau s'astreindre à une discipline rigoureuse, pour se confiner dans le statut de maire, la tentation était plus forte que lui.

Celle d'un présidentiable qui s'était, d'ors et déjà, mis dans la peau du candidat plébiscité par la droite et le centre. Mais, surtout, c'étaient les Algériens, pouvoirs publics, en première ligne, qui l'ont auréolé, très prématurément, de la stature de président de la République française, de par l'accueil présidentiel et les plus hauts égards qu'ils lui ont réservés. Mais pas seulement.

Traité en tant que tel, depuis son arrivée à l'aéroport ?Ahmed Ben Bella', dimanche vers 17h, Juppé a fini, à priori, par croire, vraiment, par moments en tout cas, qu'il était en mission de chef d'Etat, en Algérie. Aussi, n'avait-il pas besoin de trop raffiner et nuancer son langage, quand il devait passer du rôle «officiel» de maire d'une ville française à celui «officieux» de candidat à la primaire des Républicains, en campagne électorale. D'ailleurs, le bel habillage qui avait été convenu des deux côtés, le jumelage Oran-Bordeaux, en l'occurrence, pour parer cette première tournée pré-campagne électorale, à l'étranger de cet «ami de l'Algérie», dans la course préliminaire du 20 novembre 2016 (la primaire de la droite et du centre), précédant les présidentielles de fin avril 2017, n'a pas été mis en évidence et est resté, plutôt, comme un fond d'écran, tout au long du séjour oranais d'Alain Juppé. «Décidément, vous portez un tel intérêt à notre élection présidentielle que je me demande s'il y'aurait un candidat algérien à cette consultation», répliquera, Alain Juppé, à la question d'un journaliste de la presse locale, axée sur le thème de la primaire des Républicains, lors d'un point de presse, tenu hier matin, en marge de la signature d'une convention de coopération entre le groupe ?Eden Hotels' et le Lycée d'hôtellerie et de tourisme de Gascogne Bordeaux. «Mais, je sais, par ailleurs, que les Algériens sont de fidèles spectateurs de la télévision française», ajoutera-t-il. «Je ne sais pas si je dois replonger, ici, dans le bain franco-français», a-t-il commenté, suite à une question sollicitant son opinion à propos d'une lecture politique, mettant un lien entre le nombre jugé élevé de candidats déclarés ou pressentis à la primaire et un certain «manque de consensus», voire une «dé-cohérence», au sein des Républicains. «Je rappelle qu'il s'agit de la primaire de la droite et du centre. L'organisation est confiée à une institution indépendante, dite : la Haute autorité de la primaire. Le nombre de candidats n'est pas limité. Néanmoins, il y a des conditions à remplir, dont la présentation de parrainages (Ndlr : tout candidat à la primaire doit recueillir un certain nombre de parrainages, à savoir au moins 20, venant de parlementaires, au moins 250 d'élus répartis sur un minimum 30 départements et au moins 2.500 d'adhérents répartis sur un minimum 15 départements). Est-ce que c'est un signe d'un désordre, au sein de l'actuelle opposition ? Non, ce n'en est pas.

C'est plutôt, à mon sens, le signe d'une richesse, d'une évolution dans le paysage politique français. Nous avons besoin de dégager un homme qui incarne, au mieux, les valeurs de la droite républicaine et du centre (?) Il y aura beaucoup de débats télévisés, là-dessus, en septembre, octobre et novembre prochains. Libre à tout Algérien d'émettre un signe positif vers tel ou tel candidat », a encore déclaré Alain Juppé. Il a, avec cette même technique de jonglerie verbale qui consiste à ne rien dire, tout en daignant répondre, même aux questions «sensibles», subtilement esquiver une question sur «un éventuel match Hollande vs Juppé, dans la course à l'Elysée». «Je vous renvoie au débat qui aura lieu sur les plateaux de télévisions». Que ce soit dans ses déclarations à la presse ou dans ses allocutions d'ouverture et de clôture de la cérémonie qui a eu lieu à l'hôtel ?Eden Aiport Oran', la phrase «si je suis élu, je?» revenait, en boucle, dans la bouche de Juppé. «Lapsus» ou pas, le maire de Bordeaux en est allé jusqu'à étaler, à grands traits, les axes de son programme présidentiel, abordant des thèmes en relation avec la politique étrangère, les relations franco-algériennes, la question des binationaux, le dialogue inter-communautaire, comme solution d'apaisement aux conflits inter-religieux et les formes d'intégrisme et d'extrémisme qui en résultent?Il a, en tout cas, promis qu'il aura à aborder, plus amplement, les points phares, ayant trait aux relations bilatérales, lors de la rencontre publique prévue mardi (aujourd'hui).

Le maire de Bordeaux, Alain Juppé, avait entamé, dimanche, sa visite à Oran, en se rendant à la grande mosquée ?Abdelhamid Benbadis'. Officiellement, l'étape oranaise de deux jours, était axée sur les échanges et la formation professionnelle, dans le cadre du protocole de jumelage Oran-Bordeaux. L'ancien Premier ministre français s'est entretenu avec le président de l'APC d'Oran, Nourredine Boukhatem, avant de rencontrer des représentants de la Communauté française, établie à Oran.

Hier lundi, Alain Juppé a tenu une séance de travail avec le wali d'Oran, Abdelghani Zaalane, et a rencontré, entre autres, les jeunes de l'Association Santé Sidi Houari (SDH), partenaire de l'Association des centres d'animation de quartiers de Bordeaux (Acaqb), en matière d'animation socioculturelle. La deuxième journée de la visite a été marquée, notamment, par la signature d'une convention de formation aux métiers de l'hôtellerie et de la restauration, entre le Lycée de Gascogne Bordeaux-Talence (France) et le groupe hôtelier ?Eden' d'Oran. A Alger, qu'il devait gagner, hier, en fin d'après-midi, Alain Juppé aura des entretiens avec de hauts responsables de l'Etat et donnera une conférence au siège du ministère des Affaires étrangères. Avant son retour en France, il tiendra une seconde conférence de presse.