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Jugé à huis clos au tribunal militaire d'Oran : Le général Hassan condamné à cinq ans de prison

par Moncef Wafi

Accusé de «destruction de documents et infraction aux consignes militaires», le général à la retraite Abdelkader Aït Ouarabi, dit Hassan, a été condamné à cinq ans de prison ferme, ce jeudi, par le Tribunal militaire de Mers El-Kebir, à Oran.

Même si Mokrane Aït Larbi, l'un des avocats du général Hassan, avait appelé à la tenue d'un procès public, c'est sans surprise qu'un huis clos a été décidé, compte tenu, certainement, de la sensibilité du dossier. Le procès qui a duré plus de dix heures a vu le général " très bien" se défendre, selon ses avocats, plaidant non coupable des charges retenues contre lui. "Il a donné beaucoup d'explications" sur le métier du renseignement et expliqué avoir agi dans le parfait respect de la loi et des règlements miliaires, ajoute sa défense. Seuls les membres de la famille de l'accusé ont été autorisés à pénétrer dans l'enceinte du tribunal jusqu'au moment où le juge a statué sur le huis clos. Attendu par l'opinion publique, ce procès, qualifié politiquement de celui du DRS et de son patron, s'est déroulé en l'absence du général de corps d'armée, Mohamed Lamine Mediène, dit Toufik, cité par la défense comme témoin à décharge. Mokrane Aït Larbi avait introduit une demande de citation de l'ex-patron du DRS "conformément aux articles 131 et 192 du code de justice militaire", a-t-il expliqué, le 17 novembre dernier. Dans un point de presse donné par Me Khaled Bourayou, l'autre avocat du général, celui-ci dira qu'un pourvoi en cassation à la Cour suprême est envisagé, annonçant que le général Hassan a 10 jours pour en formuler la demande conformément au code de justice militaire.

Pour rappel, avant son limogeage début 2014, le général Hassan dirigeait le Scorat (Service de coordination opérationnelle et de renseignement antiterroriste, DRS), passé, depuis lors, sous la tutelle direct de l'état-major de l'armée. Le Scorat est le service qui avait mené l'assaut contre le groupe terroriste qui avait pris en otages le personnel du complexe gazier de Tiguentourine, à In Amenas, en janvier 2013. Le général Hassan avait été placé sous mandat de dépôt, en août dernier, et incarcéré à la prison militaire de Blida, après avoir été interpellé à son domicile, sur les hauteurs d'Alger. Dans un premier temps, les chefs d'inculpation retenus contre lui vont "de l'insubordination à la création d'une organisation armée en passant par la rétention d'informations et la détention d'armes à feu" pour lesquels la peine encourue est la plus lourde et peut aller jusqu'à la condamnation à mort. Quant aux circonstances de cette affaire, la presse, citant "certaines sources d'informations", estime qu'elles remontent au début de l'année 2014, lorsque "le général a dépêché à la frontière algéro-malienne quelques-uns de ses éléments pour avorter une opération d'infiltration, sur le territoire algérien, d'un groupe de terroristes avec un arsenal d'armement. La mission est entourée d'une totale discrétion et l'arsenal est récupéré. Mais sur le chemin du retour, l'équipe est arrêtée à un checkpoint des militaires qui avisent aussitôt leur supérieur, lequel leur donne l'ordre de les mettre aux arrêts. Le général Hassan saisit son chef, le général-major Toufik, informé de la mission", relate 'El Watan'. Le patron du Département du renseignement et de la sécurité (DRS) intervient alors et deux ou trois jours après, ordre est donné de relâcher l'équipe. "Pour tout le monde, l'affaire était close. Mais, quelques mois après, elle resurgit et est utilisée pour pousser le général à quitter son poste" écrit le quotidien national. En juillet 2014, le dossier est transmis au Tribunal militaire de Blida, devant lequel le général est déféré. Le juge d'instruction le place alors sous contrôle judiciaire, alors que le procureur requiert le mandat de dépôt. L'arrestation du général avait été, abondamment, commentée, aussi bien par la presse nationale et internationale que par les partis politiques et les personnalités nationales. Pour certains, "le général Hassan subit les dommages collatéraux" de la guerre des tranchées entre El Mouradia et le DRS, à l'origine des enquêtes sur la corruption au centre desquelles se trouvent ceux qu'on appelle les hommes du président. Pour Noureddine Aït Hamouda, ancien député RCD, l'arrestation du général Hassan «n'est qu'une suite logique de toutes les autres décisions prises depuis 2013». Il estime que cette affaire «sent le règlement de comptes».

Rappelons que depuis plus d'un an, le chef de l'Etat a entrepris une réforme des services de renseignement qui ont été délestés de nombreuses missions, désormais, placées sous le contrôle direct de l'état-major de l'Armée.