Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Réaction des «19» signataires de la lettre au Président : Jeux de rôles

par M'hammedi Bouzina Med : Bruxelles

Certains des signataires de la lettre des «19» personnalités adressée au chef de l'Etat se défendent de faire de la politique, même s'ils évoquent la «déliquescence de l'Etat et les dangers qui pèsent sur la nation».

Comment lire et interpréter les réactions de certaines personnalités du groupe dit «des 19» signataires de la demande d'audience au président de la République, lorsqu'elles se défendent de faire de la politique et se réclament d'une simple réaction citoyenne face au «délitement du pays» ? Chef d'un parti politique, Louisa Hannoune va jusqu'à exclure la responsabilité de son parti politique de l'initiative des «19». Le moudjahid Abdelkader Guerroudj, personnalité reconnue, refuse de se prononcer sur des dossiers «sensibles» qui font régulièrement l'actualité (emprisonnement de généraux, rôle du DRS, état de santé du chef de l'Etat). Khalida Toumi soupçonne des personnes qui cachent la vérité à Bouteflika, sans les nommer, bien sûr. Et puis, Me Mokrane Aït-Larbi, co-fondateur du RCD, non signataire de la lettre qui déclare avoir été approché et que la fameuse «lettre-requête-demande d'audience» devait être diffusée le 1er novembre pour lui coller toute la charge symbolique de cette date pour le peuple algérien. Tout cela ne reflète pas de connotation politique, partisane ou intéressée, selon ces premières réactions. Mais alors, pourquoi cette «lettre» et pour quel but ? Apparemment pour vérifier si c'est bien le chef de l'Etat qui «décide» et surtout s'il est au courant de la réalité que vivent les Algériens. Question : pourquoi le président va-t-il les croire, eux, et adhérer à leur diagnostic et ne pas croire son gouvernement et les responsables de la sécurité et de la défense du pays ? Comptent-ils sur leur seul lien d'amitié avec le président ? Situation pour le moins incongrue et hallucinante tant «on» attribue à Bouteflika une chose et son contraire : tantôt, on lui attribue la décision de restructuration et d'assainissement de l'ogre DRS, tantôt, on le dit ignorant jusqu'à l'emprisonnement de deux généraux majors remarquables dans leur lutte antiterroriste. Allez savoir, ou Abdelaziz Bouteflika a la main sur tout, contrôle tout et décide de tout, ou bien il est «hors service» et ignore même où il se trouve et ce qu'il fait. Dans l'autre camp, celui aux responsabilités ou dans les grâces du pouvoir, ce n'est pas mieux. Ils répondent du tac au tac et à leur manière : le président du FCE, le SG du FLN, le Premier ministre?, tous qualifient la «lettre» de dilatoire, voire ridicule dont le but est la manipulation de l'opinion publique. Cette opinion publique qui, elle, s'exprime de tout temps sur l'état du pays sans qu'elle soit «reçue» ou écoutée. Parce qu'elle s'exprime peut-être hors du cadre politique traditionnel que sont les partis politiques. Et c'est pour cela que ses revendications, demandes et manifestations ne sont pas prises en compte au plus haut sommet de l'Etat. Du coup, les membres des «19» qui se sont exprimés par presse interposée et qui se défendent de faire de la politique devraient méditer sur le sort réservé aux doléances de l'opinion publique : tant que les revendications, demandes, lettres affirment ne pas faire de politique, elles ont de minces chances d'être prises en considération. Peut-être est-ce la raison que certains des signataires veulent retirer leurs signatures ? dit la rumeur. Cependant, patience. Ceux parmi les «19» qui ont réagi par presse interposée affirment qu'ils attendront quelques jours avant de décider de la suite.

Ça promet. Quelques jours de délai accordé au chef de l'Etat pour qu'il daigne les recevoir afin qu'ils lui disent tout et dans le détail, les noms «Raspoutine», des prédateurs et usurpateurs de l'autorité de l'Etat jusqu'aux périls qui pèsent sur la nation et que le chef de l'Etat, son gouvernement, ses services de sécurité et son armée ignorent. L'opinion publique, elle, attendra pour ne pas les accuser de faire de la politique.