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Des taux et des valeurs

par El Yazid Dib

Surfacturation à l'importation. Transfert illégal de capitaux. Constitution illicite d'avoirs à l'étranger. Société écran. Autant de notions vagues et d'infractions sont venues alimenter la scène des événements actuels. « Il faut également souligner que ce courant de fraude est vieux et qu'à l'époque où j'étais ministre du Commerce à la fin des années 1990, le gouvernement a tenté de le combattre sans grand succès avec l'imposition des valeurs limites, appelées valeurs administrées », disait récemment le ministre du Commerce.

Un aveu posthume pour un échec consommé. Ces termes évoquent pour les moins avertis une résonance du déjà entendu. La mal-intention des néophytes leur octroyait un sens péjoratif. Pourtant ils faisaient l'apologie d'une technique de sauvetage et de sauvegarde d'une économie qui n'était plus nationale. Cette locution de « valeur administrée » s'était incrustée tel un kyste à l'administration des douanes. Une thérapie douloureuse mais nécessaire.

Dans ces années-là, qui pouvait prétendre connaître l'économie de marché ? N'étions-nous pas tous des produits de l'école socialiste ou socialisante ? Avions-nous, administration, effectif politique et conglomérat commercial, la moindre culture de cette économie ? Nous connaissions uniquement le marché couvert, le souk el-fellah, les galeries algériennes et la société nationale. Le sens de l'importation n'était qu'un sens individuel selon la fréquence des mouvements de chacun vers et/ou de l'étranger.

Certes, le peuple rêvait encore de la profusion qu'offrait jadis le PAP. Hélas, la ressource budgétaire, en mal d'orthodoxie gestionnelle, plongeait le pays dans une situation de pénurie des plus rares en matière d'approvisionnement des ménagères. Le besoin national s'était joint, bras croisés, à l'impératif planétaire et faisait produire hâtivement des lois et des lois. Après les notions des « objectifs planifiés » des « contingentements » des « AGI », vinrent les listes de « marchandises éligibles à l'import », les feux verts de la « CCI » jusqu'à l'avènement d'une presque liberté de faire mais qui restait tout de même conditionnée par les « avis de débit » et plus tard, les « domiciliations bancaires ». Le pouvoir ministériellement commercial omettait alors son rôle de régulateur et se confinait dans la fonction de comptage et de statistiques. La direction du négoce mondial se diluait entre offices et agences et fluctuait d'une institution à une autre. Tous étaient concernés et aucun ne se disait responsable. La promotion de l'exportation hors hydrocarbures était déjà rabâchée comme une nouvelle politique économique. L'exportation en termes de flux supposait un pack de dattes ou quelques amandes amères. L'activité de l'import découvrait grandement ses jours avec la création d'un organe de soutènement et d'amélioration à l'investissement. Les structures changeaient autant que le faisaient les enjeux et le contrôle s'amalgamait aux facilitations des conventions internationales.

Ainsi, ces déclarations ne peuvent être comprises comme valeurs d'appréciation d'un créneau ou d'une administration. Elles sont juste un avis autorisé qui surplombe tout de même des fonctions ne s'enregistrant pas dans son plan de prérogatives. Une valeur transactionnelle n'est forcément pas une assiette d'imposition à retenir par le fisc. Car une facture n'est en fait qu'un accord bilatéral sur un prix non imposable aux tiers. La valeur réelle serait donc ailleurs que dans un écrit. La mesure.