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Affaire Khalifa Bank : Des taux d'intérêt auxquels personne ne pouvait résister !

par Tahar Mansour

C'est peut-être la journée la plus banale depuis le début du procès en appel de Khalifa Bank qui continue à tenir en haleine tous les médias en attente de sensationnel.

En ce dixième jour, l'ex-directeur de l'entreprise nationale de boissons gazeuses et alcoolisées d'Oran, M. Abdellah Boulefrad qui fut appelé à la barre en premier et qui affirma : «je ne suis pas fou pour recevoir des avantages de Khalifa Bank contre le dépôt de l'argent de l'entreprise que je dirigeais, les taux d'intérêt étaient très avantageux et j'ai fait des dépôts censés ramener beaucoup d'argent à l'entreprise». L'entreprise que dirigeait M. Boulefrad avait fait des dépôts de 310 millions de dinars à un taux d'intérêt qui avoisinait les 12 %. L'accusé précisa aussi que le dépôt a été effectué selon la loi en vigueur et qu'il n'a reçu aucun avantage de la part de Khalifa Bank. M. Boulefrad déclara aussi ne pas posséder un compte personnel à Khalifa Bank : « j'ai un compte à la BADR seulement », rappela-t-il. Le prévenu rappelle qu'aucun cadre ni employé de Khalifa Bank ne s'était rendu au siège de l'entreprise pour l'inciter à effectuer des dépôts. Enfin, nous apprenons que la somme déposée n'a toujours pas été récupérée.

L'ex-directeur des finances et comptabilité de l'OPGI d'Oran, M. Noureddine Boucena, est le deuxième prévenu appelé à la barre ce samedi et qui reconnut lui aussi que c'est le taux d'intérêt assez élevé qui l'a poussé à faire des dépôts dans l'espoir de faire gagner beaucoup d'argent à l'OPGI. « Allah Ghaleb, le taux d'intérêt était si élevé que personne ne pouvait y résister », a-t-il déclaré. Une somme de 100 milliards de centimes a été déposée dans les caisses de l'agence d'Oran de Khalifa Bank sur ordre du directeur général de l'OPGI, feu Kheiredine Walid. Comme celui qui l'a précédé, l'inculpé nia avoir reçu un quelconque avantage de la part de Khalifa Bank.

1200 milliards de centimes de la CNR dans les caisses de Khalifa Bank

M. Meziani Abdelali, président du conseil d'administration de la CNR, affirme lui aussi que c'est le taux d'intérêt très élevé qui l'a poussé à déposer 12 milliards de dinars dans les caisses de Khalifa Bank. Appelé à la barre pour répondre des charges retenues contre lui : trafic d'influence, corruption et perception d'avantages illicite, il nia avoir intercédé en faveur de son fils pour qu'il bénéficie d'une formation d'aviateur au sein de Khalifa Bank. Revenant à la décision d'effectuer des dépôts auprès de Khalifa Bank, il rappela avoir convoqué le conseil d'administration pour avoir l'avis de tous les membres et que les 12 milliards de dinars ont été déposés par étapes. D'ailleurs, précise-t-il, 8 milliards de dinars sur les 12 qui ont été déposés ont pu être récupérés. Il nia aussi catégoriquement que le PV du conseil d'administration autorisant le dépôt des 12 milliards de dinars à Khalifa Bank ait été falsifié. Ayant occupé le poste de directeur général de la CNAC, Belkacem Mehrez est poursuivi pour corruption, trafic d'influence et perception d'avantages illicites après qu'il a effectué des dépôts importants chez Khalifa Bank. Il reconnut lors de son audition par le juge avoir procédé au dépôt de 800 millions provenant de la CNAC puis de 500 millions provenant de l'ANGEM. Contrairement à ceux qui l'ont précédé, M. Mehrez déclare que ce n'est nullement à cause des taux d'intérêts élevés qu'il l'a fait, mais afin de les faire fructifier, ces sommes étant en surplus.

Selon ses déclarations, même le ministère de tutelle avait été informé de ces dépôts mais il ne reçut aucun contrordre. Revenant à la formation d'aviateur dont a bénéficié son fils, il déclara qu'il a passé un examen comme tous les jeunes de son âge et qu'il a été sélectionné selon ses capacités intellectuelles et son niveau d'instruction : «je n'aurais jamais intervenu pour le faire admettre s'il ne s'en était pas rendu capable lui-même », a-t-il précisé. Enfin, il a jeté, selon lui, la carte de thalasso qui lui avait été envoyée par Khalifa Bank sans qu'il l'ait utilisée, ne serait-ce qu'une fois..

Rahal Rédha : les 10 millions de dollars n'ont pu être récupérés

M. Rahal Rédha qui a occupé le poste de directeur général de l'entreprise de géophysique de Hassi Messaoud, entreprise qui faisait partie du groupe Sonatrach, est le cinquième accusé à être appelé à la barre pour répondre des mêmes faits. Il déclara qu'il a procédé dans un premier temps au dépôt de la somme de 300 millions de dinars qui ont été retirés quelque temps après. Six mois après ce premier dépôt, il effectue un autre auprès de l'agence de Hassi Messaoud, mais cette fois en devises fortes puisqu'il s'agit de 10 millions de dollars qui n'ont d'ailleurs jamais pu être récupérés par l'entreprise. Il déclara au juge que les cadres de l'agence de Hassi Messaoud de Khalifa Bank lui rendaient souvent visite pour l'inciter à faire des dépôts auprès de leur banque, en mettant en avant le taux d'intérêt et les avantages qui étaient offerts. Il rappela que « les banques publiques n'ont jamais fait cela ». Concernant des avantages qu'il aurait obtenus après les dépôts effectués, il confirma avoir reçu une carte de gratuité pour le transport aérien à bord des avions de Khalifa Airways, carte utilisée à plusieurs fois, surtout pour des déplacements d'ordre professionnel à travers le territoire national, mais une seule fois pour un voyage à l'étranger. Il reconnut aussi posséder deux comptes à Khalifa Bank, l'un en monnaie nationale et l'autre en devises. Enfin, il affirma que même son argent personnel n'a pu être récupéré.