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En attendant mai 2016

par Yazid Alilat

Pour la première fois, un remaniement ministériel, qui laisse perplexes analystes et opinion publique, n'obéit à aucune logique, autre peut-être que la «raison d'Etat''. Aucune explication officielle, comme il est de tradition, n'a accompagné l'annonce du changement partiel du gouvernement jeudi dernier. Des changements intrigants de portefeuilles, de nouveaux arrivants à des postes sensibles, des inconnus de la scène politico-économique sont nommés à des départements névralgiques comme l'Energie ou les Transports, et un nouveau département des Affaires étrangères bicéphale.

A n'y rien comprendre, sinon comment expliquer d'abord que le ministère des Affaires étrangères n'existe plus en tant que décideur de la diplomatie algérienne dès lors qu'il y a deux ministres: celui des Affaires étrangères et celui des Affaires maghrébines et africaines et de la Coopération internationale. Etrange démarche qui va compliquer le travail de la diplomatie algérienne avec ses partenaires. Du vraiment «2 en 1». Encore une fois, cette diplomatie bicéphale intrigue, étonne et ne semble pas vraiment obéir à une démarche logique qui voudrait que la diplomatie algérienne ait une seule voix, pas deux... ou trois.

Les discordances sur le terrain de la diplomatie algérienne, où chacun marchait sur les plates-bandes de l'autre, entre M. Lamamra et Messahel, ont fait que l'Algérie perd progressivement prise dans nombre de dossiers internationaux. A commencer par l'Afrique, le pré carré algérien. Sur un autre registre, la nomination d'un directeur d'institut (IAP) à la tête du ministère de l'Energie ne semble apparemment pas obéir à une vision claire et une perspective à long terme de la politique énergétique algérienne. A moins que cela ne prélude à des changements de cette politique énergétique, avec en toile de fond l'arrivée d'investisseurs privés dans le secteur pétrolier et la remise au placard du programme des énergies renouvelables.

L'Algérie est à la croisée des chemins en matière de développement énergétique entre la poursuite des programmes d'exploitation des énergies fossiles avec en toile de fond le basculement progressif vers les énergies renouvelables, ou un mix qui arrange des options telles que les investisseurs privés soient associés dans la poursuite de la production des énergies fossiles. Toute la question est là : le nouveau locataire du Val d'Hydra aura-t-il assez de mou pour basculer progressivement vers les énergies renouvelables, en mettant en place un programme 2030 qui tarde à voir le jour ?

A vrai dire, ce remaniement ministériel, où les ministres qui devaient partir pour avoir cristallisé la grogne des travailleurs et celle des partis politiques et d'une partie de la presse nationale sont encore là, n'obéit à priori à aucune logique. A fortiori quand il s'agit de poursuivre les programmes de développement local et les grands projets structurants en cours de réalisation. En fait, à bien des égards, ce changement ministériel sonne comme un correctif du précédent. Est-ce un message à ceux qui ont obtenu un sursis, aux nouveaux arrivants ? Des questions sans réponses, jusqu'au prochain remaniement, peut-être en mai 2016.