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La gouvernance selon Ben Badis revisitée

par Rekibi Chikhi

Les pensées du cheikh Abdelhamid Ben Badis ont été encore une fois revisitées, mais cette fois-ci dans le cadre du colloque maghrébin autour des réformes de la constitution dans les pays du Maghreb arabe et les horizons de la transformation démocratique, tenu les 11 et 12 mai, dans la grande salle de conférences de l'université des sciences islamiques Emir Abdelkader.

Ce colloque, qui s'inscrit dans le cadre de l'événement ??Constantine, capitale de la culture arabe'', a été organisé par la faculté de la charia et de l'économie, et auquel ont pris part des députés, des professeurs, des avocats, des chercheurs et des magistrats venus des universités algériennes, tunisiennes et marocaines. Dans un article paru dans son journal ??Chihab'', en janvier 1931, le leader du mouvement Islahiste en Algérie, le cheikh Ben Badis, a élaboré une liste de 13 articles régissant le système de gouvernance en Islam (wilaya), en prenant le discours prononcé par le califat Abou Bakr Essedik, juste après ??El Baiaa'', comme référence. Ces 13 articles ont été décortiqués par M. Abdallah Boukhelkhal, le recteur de l'université des sciences islamiques Emir Abdelkader de Constantine, dans son intervention tenue, avant-hier, lors de ce colloque. «Cet article paru au journal ?Chihab', je l'ai transmis à une institution américaine, basée à Washington, qui m'a contacté pour demander des textes ayant trait au système de gouvernance en Islam (le système de wilaya en Islam), pour enrichir des textes traitant de la pensée démocratique», indiquera l'orateur. Et d'ajouter que «La pensée démocratique a atteint le summum sous le règne du califat Abou Bakr Essedik». Dans le court discours prononcé spontanément par un califat, devançant 14 longs siècles de pensées et de recherches, toutes les bases nécessaires à la mise en place conjointe, d'un Etat civil et d'un Etat islamique en même temps, préservant la dignité humaine et garantissant l'acceptation de l'autre et prônant l'équité dans la diversité, ont été implicitement ou explicitement énumérées, souligne, M. Boukhelkhal. Citons parmi ces 13 articles, dignes d'un texte de constitution, «personne ne peut gouverner une nation sans l'approbation de cette dernière, c'est le plus compétent parmi la population, qui a le droit de gouverner, le fait d'accéder au pouvoir n'implique pas automatiquement que cette personne est la meilleure, mais elle doit le prouver par les actes et les bonnes décisions, la nation doit soutenir, porter conseil à son gouverneur et a tous les droits de contrôler le gouverneur et le déchoir le cas échéant». Le penseur Ben Badis précisera, toujours en s'appuyant sur le discours du 1er califat musulman, que «les gens sont égaux devant la loi, ne pas craindre les puissants en prononçant des jugements, et ne pas être indulgent vis-à-vis des plus faibles, d'autre part. La loi doit faire l'unanimité chez la population, cette dernière doit avoir le droit de regard sur tout ce que entreprend son gouverneur». Gouvernant et gouverneur doivent être conscients de cette responsabilité commune aux deux, citera également Ben Badis, sans oublier que le maintien et la préservation de l'équilibre entre les différentes classes de la société est le seul à même de garantir un climat de paix dans la société. «C'est la pensée d'un homme d'il y a 14 siècles de cela, qu'en est-il de nous maintenant ?», une question que s'est posée M. Boukhelkhal à la fin de son intervention.