L'embrouille semble à son apogée dans le procès en cours de l'affaire Khalifa et l'infortuné juge en charge du dossier, malgré la dextérité qui le caractérise, ne se rend pas compte qu'il ne juge pas seulement des hommes mais qu'il a à la barre tout un pan de l'Histoire d'un pays. S'il y a bien aujourd'hui des métiers que la sagesse et la circonspection ne recommandent pas ce sont bien ceux de policiers, de gendarmes et de magistrats. Ces professions-là ont le mauvais génie de contraindre à aller tâter les racines profondes de la dégénérescence d'une société et à défaut de permettre de se conformer à des textes de loi, elles imposent les limites de la concision d'amateurs laborantins. N'est pas anthropologue qui veut et le mastodonte sac porté sur le dos du fils d'un des anciens patrons des services secrets n'a rien d'un petit sachet. On imagine l'effarement des gens de ces métiers devant ce qui s'apparente à une bouche d'égout dégageant des pestilences qui prennent à la gorge jusqu'à l'asphyxie.

La violence amplifiée, la corruption démultipliée, les divorces en mode conjugué, les grèves effrénées et la lourde chape d'anxiété pèsent sur une population sourde aux leçons de patriotisme du passé et insensible au rappel des faits d'armes des héros d'hier qui apparaissent aujourd'hui presque comme des éberlués qui se sont lourdement trompés.

La rigole de faits reprochés à Abdelmoumène Khalifa n'est pas la coulée de gros larcins planifiés par le dandy qu'un malheureux concours de circonstances a produit. A Blida, c'est toute l'Algérie qui est en procès et les griefs trop sommairement retenus ne pourraient se contenter d'un AVC aussi select qu'inattendu. On a peut-être là l'une des raisons de la démission d'un honorable Zeroual qui a sans doute compris qu'un tribunal et des lois avaient une piètre figure à afficher face à une fabuleuse Histoire malmenée et corrompue et que l'indépendance d'une nation est bien autre chose qu'une chasse gardée et qu'elle ne se contente jamais d'un étendard trop galvaudé et d'un hymne avec outrage chanté.