« Tout comme le trafic de drogue, la contrebande d'objets archéologiques
s'est avérée très juteuse durant la décennie noire. Des pièces ont été vendues
au niveau local à des centaines de millions de centimes, voire des milliards »,
nous a déclaré M. Agoun Fouad, président de la Cellule régionale de lutte
contre l'atteinte aux biens culturels du 5ème Commandement régional de la
Gendarmerie nationale (GN) de Constantine. Les unités de la Gendarmerie
nationale ont traité, apprend-t-on, au cours de l'année 2014, en collaboration
avec les deux cellules régionales de Constantine et de Souk-Ahras, 43 affaires
ayant abouti à l'arrestation de 8 personnes et la saisie de 2037 objets divers
ayant une valeur historique et artistique confirmées, et qui ont été remises
aux Directions de la culture. En comparaison avec 2013, le nombre d'affaires
traitées en 2014 a chuté de 25 %, alors que pour ce qui est des personnes
arrêtées, on enregistre une baisse de 58 %. Avec une hausse durant la même
période (2014) en nombre d'interventions de 17,50 %. Citons parmi les objets
saisis, 1827 pièces de monnaie appartenant à différentes périodes historiques,
une pièce faisant partie d'un siège païen en pierre, la moitié d'une statue en
plomb, une bague en bronze de l'ère romaine, un appareil de verification de
l'authentification des diamants et des pierres précieuses, une statue en bronze
jaune datant de l'ère romaine et une pierre tombale. « Certaines localités
représentent plus que d'autres un gisement de pièces archéologiques à l'exemple
des régions de Beni H'midene, El-Khroub, Zighoud-Youcef, Aïn-Smara et
Ali-Mendjeli où des ossements et pièces de céramique de l'ère romaine ont été
découverts près de l'université Mentouri 3 lors des travaux d'une bretelle de
l'autoroute Est-Ouest », nous a informé par ailleurs notre interlocuteur.
M. Agoun Fouad nous apprend que «les 10 membres de sa cellule participent
dans les enquêtes liées au domaine, mènent des interventions régulières sur le
terrain, prennent des photos et répertorient les sites et monuments, de même
qu'ils participent aux journées d'étude dans le cadre de la formation continue,
la dernière en date, étant le Colloque national portant sur le thème ??l'Aurès
à travers les temps''». Il précisera que « la Gendarmerie nationale était
présente à ce colloque qui s'est tenu du 30 mars au 1 avril à Khenchla, comme
intervenant à part entière et non comme une institution qui veille à la
sauvegarde des vies des personnes et la préservation de leurs biens ». En plus
de cela, cette cellule, « entretient différentes relations avec les directions
de la culture, les agences de voyages ainsi qu'avec la trentaine d'associations
dans tout l'Est dont l'activité est liée à l'archéologie. On déplore toutefois
l'absence totale de ces associations sur le terrain, « elles n'ont jamais
répondu présent quand on les invite, bien qu'elles recèlent des compétences».
Par ailleurs, on apprendra qu'une banque de données comportant des fiches
techniques a été créée depuis 2011, répertoriant tous les sites historiques.
Cette banque est constamment mise à jour. « L'objectif primordial de notre
cellule est de soutenir les unités de la GN afin de dévoiler et prévenir les
hémorragies dont souffre notre patrimoine, le pillage, la défiguration et la
destruction ciblant les monuments et les sites touristiques », précisera notre
interlocuteur. Sans oublier de souligner que « certaines personnes, par
ignorance, vendent au rabais à des initiés dans le domaine des objets de grande
valeur que ces deniers acheminent vers l'Europe via la Tunisie ». Il citera
dans ce sillage, « un jeune originaire de Constantine qui a été appréhendé en
possession d'une pochette à lunettes bourrée de pièces de monnaie en bronze des
ères islamique, chrétienne et ottomane, qu'il a trouvées par hasard près du
Rhumel et qu'il avait l'intention de vendre ». Sans oublier notamment les
touristes étrangers arrivant par route par les postes frontaliers de l'Est,
ajoutera-t-il, « celui de Taleb El Arbi à El Oued, pour ne citer que lui, et se
dirigent plus vers l'extrême Sud à Djanet où ils trouvent à disposition un
musée naturel à ciel ouvert. Des flèches de guerriers datant de la préhistoire
presque à portée de main, ont été volées par ces soi-disant touristes qui
repartent avec leur précieux butin pour le revendre à des prix très forts en
Europe ». Concernant l'imminent événement du 16 avril, notre interlocuteur dira
« nous avons deux messages à passer aux citoyens, le premier est que tout
citoyen doit savoir que toute pièce archéologique qu'il découvre enfouie sous
terre, en creusant pour entamer des travaux de construction, ou ailleurs, ou
par un simple hasard, ne lui appartient pas, et que c'est un bien de l'Etat
qu'il doit remettre à la plus proche unité de gendarmerie. Le deuxième message
est que les Constantinois doivent, durant l'année en cours, être à hauteur de
l'image riche en histoire et en culture de leur ville ».