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Education: Des orientations pour une «régulation pédagogique»

par Abdelkrim Zerzouri

La première semaine de la reprise des cours après les vacances de printemps, annonce d'un dernier virage, le plus important pour les élèves avant le rendez-vous des examens de fin d'année, emprunte le chemin de l'espoir parsemé de doutes. Cette reprise des cours, qui a la particularité d'intervenir (presque) en même temps que la fin d'une longue grève déclenchée par le Cnapeste le 16 février dernier et gelée à la veille du départ en vacances, doit obligatoirement avoir le souci de gérer le temps qui reste encore disponible pour récupérer le temps perdu et avancer aussi loin que possible dans l'exécution du programme. Dans cet esprit, durant ces premiers jours de la reprise des cours, le ministère de l'Education nationale a dépêché ses inspecteurs centraux au niveau des wilayas afin de rassurer les élèves sur plusieurs aspects de la poursuite régulière de la scolarité, réaffirmer que seuls les cours effectivement dispensés seront pris en considération dans l'élaboration des sujets des examens du bac, et sensibiliser les élèves de ne pas décrocher tôt, de s'accrocher à leurs bancs de classes jusqu'au mois de mai. M. Ouglal Zeghdami, l'inspecteur central à l'Inspection générale de la pédagogie, qui suit l'exécution de cette mission de sensibilisation multiforme au niveau de la wilaya de Constantine, où une cellule est créée au niveau du service de la formation de la direction de l'éducation, nous dira à ce propos que «tout le personnel des établissements scolaires est, ainsi, impliqué dans cette action de sensibilisation» qui aspire à créer un environnement adéquat, pouvant panser les séquelles qui ont marqué le déroulement de la scolarité. Ainsi, on apprendra auprès de notre interlocuteur que la tutelle a donné des orientations pour appliquer à fond durant ce troisième trimestre «la régulation pédagogique». Sans manquer d'assurer que «cette approche n'est pas initiée dans le cadre d'une action précipitée pour parer aux effets de la dernière grève, car la régulation pédagogique a été engagée bien avant le débrayage». Seulement, on peut lire en filigrane, la régulation pédagogique qui s'inscrivait dans le cadre moyen passe à l'application dans l'immédiat. C'est que le besoin se fait urgent pour rattraper le retard dû à la dernière grève. La régulation pédagogique s'articule autour d'un concept très simple en apparence, «aller dans l'apprentissage, à prodiguer aux élèves, à l'essentiel de la leçon, sans trop disperser l'effort dans un long cheminement qui permet d'accéder à des connaissances souvent secondaires dans la formation de l'élève».

On dira dans ce contexte, pour montrer l'exemple, «l'enseignant dans ses cours particuliers fait bien avaler tout le programme scolaire à ses apprenants en une ou deux séances par semaine, recourant justement à une régulation pédagogique qui lui permet de surfer sur l'essentiel du cours et passer immédiatement aux exercices d'application». Et, conclut-on à partir de cet exemple, «ce qui est possible dans des cours particuliers peut l'être dans l'école, d'autant que tout s'y prête mieux à l'école, temps, espace et environnement». De toute évidence, la régulation pédagogique vise un apprentissage rapide, une exécution du programme scolaire appréciable. «Les enseignants se trompent lourdement en se basant exclusivement sur le livre scolaire pour donner leur cours, car le livre n'est qu'un manuel et le programme, c'est une tout autre histoire. Il existe des étapes intermédiaires dans le livre qui donnent des explications utiles pour améliorer les connaissances, certes, mais on peut éviter de trop se concentrer sur certaines étapes tout en gardant intact le savoir donné à l'élève», soutient dans ce sens M. Ouglal Zeghdami. Celui-ci rappelle que le programme est exécuté à hauteur d'un taux de 75%, et qu'il s'agit maintenant d'améliorer ce taux en recourant à la régulation pédagogique. Sans passer par le fameux rattrapage des cours, naguère vécu après chaque grève.

Et son corollaire la fixation des seuils des cours, ou El Aataba. Une issue pour contourner une négociation à ce sujet avec le syndicat Cnapeste ? Probable. Le ministère de tutelle maintient fermement sa décision de défalquer les jours de grève des salaires des enseignants, alors qu'une négociation avec les syndicalistes autour des cours de rattrapage impliquerait automatiquement un abandon de cette option. D'ailleurs, le Cnapeste ne croit pas à une exécution des programmes à un taux de 75% et ne voit pas d'un bon œil cette régulation pédagogique. Contacté hier au téléphone, le porte-parole du Cnapeste, M. Boudiba, soutient que «la tutelle aurait mieux fait de négocier avec les syndicalistes sur cette question purement pédagogique du rattrapage des cours au lieu de se lancer dans cette voie de la régulation pédagogique qui, finalement, incombe à l'enseignant».

Notre interlocuteur révèlera qu'«il n'y a pas eu de négociation entre son syndicat et la tutelle» après la fin de la grève et que cette action de régulation pédagogique est plutôt une ruse pédagogique engagée par la tutelle uniquement pour «sauver la face». «Le Cnapeste s'occupera du volet psychopédagogique avec les élèves et rien d'autre dans ces conditions», indique notre interlocuteur. On constate, donc, que loin du gel de la grève, qui a été possible grâce au concours actif du Premier ministre en personne, comme nous l'a confié M. Boudiba, le froid persiste dans les relations entre le Cnapeste et le ministère de l'Education nationale.