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Reconversion du droit de jouissance en droit de concession : 9.000 agriculteurs risquent d'être dépossédés de leurs terres

par El-Houari Dilmi

«L'opération portant reconversion du droit de jouissance en droit de concession, limité à 40 ans, avance très bien avec la distribution de plus de 140.000 actes à ce jour», a indiqué, hier, sur les ondes de la Chaîne I de la radio nationale, le directeur général de l'Office national des terres agricoles, M. Yacine Zeroual.

« Nous sommes déjà à plus de 75% des dossiers traités, alors que les 25% restants qui font l'objet de litiges, liés principalement à des questions d'héritage, seront traités une fois que la justice aura statué sur leurs cas », a encore expliqué le DG de l'office, ajoutant que plus de neuf mille agriculteurs « n'ont toujours pas déposé leurs dossiers ». « Les agriculteurs qui n'auront pas répondu aux deux mises en demeure que nous leur avons adressées, par voie d'huissier de justice, verront leurs actes annulés et seront dépossédés de leurs terres conformément à la loi », a-t-il menacé. La superficie globale des terres agricoles, concernée par la reconversion du droit de jouissance en droit de concession, dépasse 2,5 millions d'hectares répartis sur le territoire national, a indiqué Yacine Zeroual, ajoutant que « des commissions ont été instituées pour sortir sur le terrain et étudier les dossiers, objet de litige ».

Au sujet des terres « arch », d'une superficie ne dépassant pas un million d'hectares, exploitées par des fellahs depuis l'époque coloniale, le DG de l'Office des terres agricoles a expliqué qu'une instruction du Premier ministre sera prochainement adressée aux parties concernées pour « régulariser leur situation et accorder aux agriculteurs des actes de concession leur permettant d'exploiter leurs terres en tout légalité ». Citant une dizaine de wilayas du centre du pays qui connaissent un retard en matière de traitement des dossiers, Yacine Zeroual a indiqué que « la majorité des cas sont actuellement portés devant les tribunaux, en raison essentiellement de conflits entre personnes, ou de terres agricoles détournées de leur vocation initiale, comme c'est le cas à Blida où des personnes ont construit des habitations sur des terres agricoles ; elles seront démolies», a lancé le DG de l'Office des terres agricoles.

En raison de la nature sensible des litiges, liés au foncier agricole, « nous voulons prendre le temps, surtout en matière d'expertise judiciaire, pour régulariser définitivement ces dossiers, et surtout ne pas léser les personnes qui ont le droit d'exploiter ces terres, conformément au décret exécutif n°10-326 du 23 décembre 2010, fixant les modalités de mise en œuvre du droit de concession pour l'exploitation des terres agricoles du domaine privé de l'Etat », a-t-il affirmé. L'Office national des terres agricoles a identifié un millier de périmètres d'une superficie de 350.000 hectares destinés à la création de nouvelles exploitations agricoles et d'élevage dans le cadre du dispositif d'accompagnement, visant l'élargissement de la base productive, a par ailleurs souligné Yacine Zeroual.

Concernant le sud du pays, l'invité de la Chaîne I a expliqué que des « actes de propriété seront délivrés aux agriculteurs qui auront mis en valeur leurs terres, alors que les autres fellahs se verront attribuer des actes de concession d'un durée de quarante ans ». Ces fellahs du sud du pays « vont bénéficier du crédit « Ettahadi », un crédit d'investissement octroyé par la BADR, dans le cadre de la création de nouvelles exploitations agricoles et d'élevage sur les terre agricoles non exploitées relevant de la propriété privée et du domaine privé de l'Etat », a encore expliqué l'invité de la radio. Les domaines concernés par le crédit « Ettahadi » sont « la création, équipement et modernisation de nouvelles exploitations agricole et/ou d'élevage, le renforcement des capacités de production de celles existantes et insuffisamment valorisées, et les entreprises économiques qui concourent à l'intensification, la transformation, la valorisation de produits agricoles et d'élevage nécessitant des besoins de financement (crédit fédératif) à moyen terme », a-t-il conclu.