Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Avion d'Air Algérie bloqué à Bruxelles : La fin du feuilleton

par Moncef Wafi

Après le bras de fer entre Air Algérie et la société néerlandaise K'Air BV, au sujet de l'avion bloqué à Bruxelles vendredi, un terrain d'entente a été trouvé entre les deux parties, hier après-midi.

Selon TSA qui cite le P-DG de K'AIR BV, l'huissier de justice belge chargé du dossier aurait été contacté par la compagnie aérienne nationale. Air Algérie aurait affirmé qu'un transfert de 2 millions de dollars sera effectué au profit de la société néerlandaise. Et l'avion bloqué à Bruxelles pourra repartir dès que l'opération sera effective, explique la même source.

Pourtant la partie était mal engagée avec les révélations des uns et des autres. Le P-dg de la compagnie plaignante, Hamid Kerboua, et dans un entretien accordé à TSA, avait expliqué que le contrat liant Air Algérie à K'Air BV porte sur l'achat d'avions, de moteurs et de pièces détachées retirées de la flotte vieillissante de la compagnie nationale. Le contrat, datant du 6 juillet 2008, d'une valeur de 13 millions de dollars, prévoit le versement d'une caution de 2 millions de dollars par la compagnie néerlandaise, au titre d'avance sur l'exécution du contrat, affirme-t-il encore. Et c'est apparemment cette somme qui est au centre du litige entre les deux parties. Air Algérie avançait, pour sa défense, que cette somme ne constitue en aucune manière une caution. «La caution n'étant pas prévue au contrat de vente» souligne le communiqué d'Air Algérie rendu public ce dimanche. «Les sommes de 500.000 dollars et de 1.500.000 dollars représentent les deux échéances qui devaient être honorées par la société K'Air BV, au titre du contrat la liant à Air Algérie, respectivement 7 jours suivant l'acceptation de l'offre et 15 jours suivant la signature du contrat de vente», rappelle le dit document. Hamid Kerboua, revenant sur les raisons du litige, dira que le contrat stipule «noir sur blanc» qu'Air Algérie se devait de remettre toute la documentation technique «back to birth» (depuis le début de vie) relative aux appareils de la compagnie. Une démarche qui n'a pas été faite par la compagnie nationale qui a refusé même de remettre les fiches techniques, selon sa version. Et pour preuves de l'incapacité d'Air Algérie de fournir cette documentation, un procès-verbal de la commission de vente de la compagnie, datant du 16 juin 2008, durant les négociations du contrat avec d'autres sociétés : la compagnie américaine Commercial Turbine Services a fait une offre de 14 millions de dollars à Air Algérie, mais exigeait d'abord les documents techniques. Il révèle que, de l'aveu des Algériens, «cette demande est difficile, voire impossible à réaliser» étant donné l'ancienneté des avions et leur date de retrait de la flotte. Faux, rétorque Air Algérie qui affirme, pour sa part, que ce point avancé par K'Air BV «n'a aucun fondement contractuel étant donné que le contrat de vente ne prévoit pas une obligation de remise de ces fameux documents techniques». Le communiqué de la compagnie nationale explique que «ledit contrat de vente en ses articles 1 et 10 stipule clairement que la vente des avions et de leurs équipements sont acceptés par l'acheteur en l'état (As is, where is)». Selon le p-dg de la société néerlandaise, les banques lui ont refusé les demandes de crédit parce qu'elles exigeaient au préalable les documents techniques des avions et des pièces détachées. Air Algérie répond que les difficultés rencontrées par la société K'Air BV pour obtenir les crédits nécessaires «ne peuvent être expliquées que par sa non solvabilité». Air Algérie a d'ailleurs indiqué que K'Air BV avait essayé de justifier, dans son courrier du 10 février 2010 adressé à Wahid Bouabdallah, patron de l'époque de la compagnie nationale, ses difficultés d'honorer ses engagements financiers par la crise financière mondiale qui avait touché le secteur de l'aviation, notamment les avions d'ancienne génération. Contacté par TSA, l'ancien P-dg d'Air Algérie a indiqué que «la société néerlandaise n'a pas respecté ses engagements», n'ayant pu «mettre en place les financements nécessaires pour l'exécution du contrat».

A propos de l'action judiciaire, M. Kerboua explique que sa société a réclamé le remboursement des 2 millions de dollars après qu'Air Algérie ait décidé de résilier le contrat unilatéralement. L'affaire avait été portée alors en arbitrage, devant la Chambre internationale de commerce de Paris (ICC) qui donnera raison à la partie plaignante le 31 mars 2014,. Le 16 août 2014, le tribunal bruxellois a statué en faveur de K'AIR, d'où la saisie de l'avion d'Air Algérie ce vendredi 12 décembre. Une saisie qui a poussé l'Algérie à réagir en rappelant, samedi, ses deux ambassadeurs en Belgique et en Hollande pour «consultations».

Ce dimanche, les ambassadeurs de ces deux pays à Alger respectivement Fréderic Meurice et Mme Willemijn van Haaften, ont été convoqués au ministère des Affaires étrangères où il leur a été fait part de l'«étonnement» et de l' «incompréhension» d'Alger suite à cette décision. Le secrétaire général du MAE qui a reçu les deux diplomates, Abdelhamid Senouci Bereksi, a expliqué que cette mesure a été prise au moment où les voies de recours «n'étaient pas épuisées et qu'une procédure était en cours au niveau du tribunal d'Alger qui a adressé une citation à comparaître à la société néerlandaise le 17 décembre courant».

Tout en les informant des motifs du rappel pour consultation des ambassadeurs algériens à Bruxelles et à La Haye, M. Bereksi a exprimé le souhait que la mesure d'immobilisation de l'avion «soit immédiatement levée».