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Amère réalité pour l'Algérie à la «tête haute»

par Kharroubi Habib

L'aplomb dont ont fait montre les autorités algériennes à affirmer que le pays n'a rien à craindre de l'effondrement des cours du pétrole est en train de se lézarder. Et si elles laissent toujours entendre que toutes les programmations inscrites pour le court terme vont être respectées et financées, elles admettent néanmoins que la persistance de la chute de ces cours les obligera à des révisions dans la gestion des ressources financières de l'Etat.

Comme leurs devanciers ayant été aux commandes du pays quand il a été confronté dans les années 80 à une crise de même nature, nos gouvernants actuels nous vendent la fiction qu'ils ont anticipé la tourmente qui plombe les marchés pétroliers et pris toutes les dispositions qui vont permettre à l'Algérie de s'en sortir sans dégât de cette mauvaise passe. On sait sur quoi les fausses assurances de leurs prédécesseurs ont débouché : une Algérie réduite à mendier de quoi survivre, sa population plongée dans une pitoyable détresse qui a produit le plus effroyable effet : une guerre civile dont les plaies sont toujours ouvertes.

L'on voudrait croire que les assurances données par nos responsables actuels ne sont pas de la même espèce. Mais tout montre que la seule disposition à laquelle ils sont résolus de recourir c'est celle de puiser autant que besoin dans le fonds de régulation des recettes. Sauf que si les cours pétroliers s'inscrivent dans leur baisse durablement, la recette risque d'aggraver la situation pour le pays qui dilapiderait ainsi rapidement ses économies sans avoir été doté d'une autre alternative. Pourtant l'Algérie a vécu des années de vaches grasses durant lesquelles il lui était possible de se construire une économie qui lui aurait permis de s'affranchir de la dépendance de la rente pétrolière. Au lieu de cela, il a été procédé à la casse impitoyable de ce que cette économie avait réalisé dans ce sens, sous le prétexte que cette opération de démolition était le prélude indispensable à sa rénovation et adaptation à la nouvelle donne économique internationale.

Le temps des vaches maigres arrivant, l'Algérie y entre désespérément démunie de protection contre l'épreuve qui s'abat sur elle. Qui peut croire un instant que l'économie hors pétrole qui n'a pas pu en deux décennies rapporter les deux modestes milliards de dollars l'an lui ayant assigné comme objectif, va devenir subitement pourvoyeuse de rentrées financières susceptibles de pallier au tarissement de celles générées par l'exportation des hydrocarbures ? Comment croire que les autorités ont effectivement un plan pour lui permettre d'accomplir ce «miracle». Les Algériens n'y croient pas en tout cas et comme ils savent ce que pourrait en coûter au pays une crise pétrolière durable, le seul espoir auquel ils s'accrochent est celui d'un renversement salvateur de tendance sur les marchés pétroliers. Pour autant, le pouvoir qui a réduit l'Algérie à n'attendre son salut que de cette perspective aléatoire doit et devra rendre compte. Comment l'y contraindre sans précipiter le pays dans un chaos apocalyptique doit devenir le débat duquel sortirait un consensus national sur les moyens et méthodes de l'y forcer.