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RELIZANE: Engouement pour la friperie

par E.Yacine

La friperie devient un ultime recours dans ces circonstances douloureuses. Lorsque la pauvreté est à son paroxysme, dans un pays aussi prospère que l'Algérie, la classe moyenne dans la société a tendance à disparaître et le pouvoir d'achat est terriblement en régression. Le nombre de chômeurs est énorme, au point où la rue déborde de ces « marginalisés ». S'offrir des habits corrects dans les pays qui se respectent fait partie des choses simples de la vie de tous les jours. Chez nous, des millions de gens ne peuvent pas goûter à ce qui est, désormais, un luxe. A Relizane, chef-lieu, la rue « Rakaba » laisse voir une réalité des plus trompeuses. Les tenues chics des « papiches » nous laissent savourer ce qu'il y a de plus magnifique, de plus beau. Cependant, loin de ces espaces de prestige un autre monde est à déceler. Un monde lugubre.

Dans la plupart des marchés de la wilaya de Relizane, la friperie, c'est-à-dire les vêtements d'occasion venus des pays occidentaux, marque une forte présence. Auparavant, ce genre de marchandise n'est vendu que les jours des marchés hebdomadaires, actuellement, c'est devenu une activité quotidienne. Les marchands du « produit de l'ailleurs » se font de l'espace afin de satisfaire leurs clients. Lorsqu'on fait un tour dans les parages, on peut même se demander si les boutiques des villes fonctionnent encore. Chaque jour que le bon Dieu fait, des revendeurs qui viennent des quatre coins du pays se consacrent au commerce du « chiffon », comme on l'appelle communément avec amertume. Ces commerçants exercent leur métier sans fatigue et sans répit. Ils passent la nuit dans leurs voitures hiver comme été.

Dans cet endroit, le client peut se permettre d'acheter nombre de choses : des vêtements, des chaussures? Les prix sont très bas, même pour les gens qui ont de petites bourses. Par exemple, on peut acheter une chemise d'occasion pour 150 DA, un pull à 200 DA, une paire de chaussures à 400 DA. La marchandise n'est pas neuve mais elle peut servir encore quelque temps. « Je viens ici souvent, ce marché est une véritable opportunité pour moi.

Je travaille comme manœuvre dans un chantier de construction privé et j'arrive mal à finir le mois. Je fais nourrir six personnes. Heureusement qu'il y a la friperie, sinon je ne pourrai jamais vêtir ma famille», se confesse Kaddour d'un air émouvant. Plus loin de ce marché, des commerçants se sont aussi spécialisés dans la vente des vêtements d'occasion. Il y a même ceux qui se sont fait leurs petites boutiques. Peut-être qu'un jour le fleuve de l'éternité sera plus clément.