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Le retour de la police communale et des décisions déjà annoncées

par G. O.

Le Premier ministre a tenu à huis clos un CIM que ses conseillers ont annoncé comme «public et ouvert à la presse».

Il a promis que son ministre de l'Intérieur animera une conférence de presse à la fin de la réunion. Les journalistes ont attendu 7 longues heures pour que Taieb Belaiz apparaisse enfin mais juste pour édicter les huit décisions que le CIM a prises, que le 1er ministre a entérinées et a dit vouloir voir appliquer ce dimanche, c'est-à-dire demain. Au fait, ce CIM a juste rappelé quelques-unes d'entre ces décisions annoncées déjà dans plusieurs occasions, comme les sorties de Sellal sur le terrain ou de celles de ses ministres. Les opérations de relogements et l'achèvement des logements en construction d'ici au 31 décembre n'a, en effet, rien d'une décision nouvelle. Fallait-il tenir un CIM de 7 heures pour décider de terminer les opérations de relogement des Algérois alors qu'elles sont menées tambour battant en permanence et font les Unes des JT de la télévision nationale reléguant au second plan le manque de civisme et le délabrement du pays? L'embellissement des façades de la capitale n'a rien de nouveau non plus. La décision date du fameux bleu et blanc imposées par les entreprises d'El Khalifa. S'en sont suivies d'autres opérations, sans succès. Dernière en date et sans suite aussi, l'obligation faite aux commerçants des grandes artères d'Alger de couvrir le bas des façades de leurs magasins avec de la faïence noire. «Pour que ça fasse uniforme», disent des autorités locales qui se fichent de voir les climatiseurs qui sont partout à goutter sur les têtes des passants.

Un nouveau schéma pour Alger, pour quoi faire?

La création d'entreprises spécialisées dans l'entretien des cimetières est une nouvelle dépense que le gouvernement veut inscrire dans les milliards qu'il affiche dans son bilan. Parce qu'il est nécessaire de rappeler que la prise en charge des cimetières a été décidée depuis deux ou trois ans.

Ce sont les P/APC de l'ensemble du pays qui ont été instruits pour faire débroussailler les mauvaises herbes dont l'épaisseur et la propagation cachent toutes les tombes. L'opération a été menée une seule fois. Sans suite.

D'autres décisions ont été annoncées, comme la création d'entreprises économiques chargées de l'embellissement de la capitale et l'installation de groupes de travail auprès de chaque circonscription administrative de la wilaya pour réfléchir sur le nouveau schéma organisationnel de la capitale. L'on se demande si Alger reprendra son statut de gouvernorat décidé par Cherif Rahmani alors nommé gouverneur tout à la fin des années 90. Statut qui avait enfreint toutes les lois de la République, de la Constitution au code communal et de wilaya en passant par les textes réglementaires les plus simples. Pour rappel, c'est Bouteflika qui avait décrété sa fin pour cette même raison. Enfin, ce n'est pas un nouveau schéma administratif qui fera d'Alger une capitale « civilisée et moderne» tant que ses habitants ne respectent pas la moindre règle de civisme et que les représentants de l'Etat qui sont censés y veiller, ne le font pas et s'accommodent plutôt du désordre régnant. Les agents de police pullulent dans les rues et quartiers mais se plaisent à traîner les pieds même quand des rixes se déclenchent ici et là.

Quand l'urgence est érigée en gouvernance

Le ministre de l'Intérieur et le wali d'Alger voient que le commerce informel continue de boucher les espaces, que les voitures sont stationnées sur les trottoirs, que les jeunes continuent de brandir leur bâton pour obliger les conducteurs à s'acquitter d'un ticket de parking dont le montant, l'impôt et la légalité même, échappent totalement à l'Etat. Ceci, même si des textes pour réglementer le stationnement ont été signés il y a longtemps mais le ministère de l'Intérieur n'a pas daigné (osé) les appliquer.

Autre absurdité, la création de nouvelles entreprises pour l'embellissement d'Alger alors que celles déjà existantes ne font pas leur travail correctement. Net Com est la plus indiquée dans ce sens. L'on remarque depuis quelques jours que ses agents ballaient les rues à l'aide d'aspirateurs neufs et modernes. Ils font marcher la machine d'une main et aspirer les ordures d'une autre à l'aide d'un tuyau. Résultat, une grande partie des trottoirs n'est pas nettoyée. La création d'espaces pour réserver le bon accueil aux citoyens dans les administrations publiques ne servira à rien quand les préposés aux guichets narguent les usagers, passent leur temps à parler au téléphone et défient ceux qui veulent se plaindre à leurs chefs de service. «Allez-y le voir, faites ce que vous voulez et je fais ce que je veux», a répondu à un citoyen une jeune femme au guichet de l'annexe de l'APC de Belouizdad (Belcourt) qui chuchotait au téléphone qu'elle avait décidé d'accrocher à son oreille pendant les heures de travail.

Parmi les huit décisions que le CIM a frappées du sceau de l'urgence, figure par ailleurs celle relative à la réactivation de la police communale. Les textes existent au ministère de l'Intérieur mais l'on ne sait pas encore d'où viendront ses effectifs. Recyclage des gardes communaux ou recrutements nouveaux, il serait juste judicieux de l'habiller en tenue «civile» pour éviter l'effet frappant de l'Etat policier qui s'étale sur le pays.

Ces arrivistes qui nous gouvernent

Pourtant, aucune autorité ne contrôle ni ne sanctionne en cas de faute alors que c'est dans cette absence de sanction que réside tout le mal du pays. Confortée par le discours politique ambiant, l'impunité qui règne enfonce la capitale et toute l'Algérie dans les travers les plus infâmes de la gouvernance. Première fausse note de ce discours, le fameux slogan au lendemain de l'indépendance «un seul héros, le peuple.» En l'agitant, les gouvernants pensent toujours et encore gagner la confiance des «masses» pour les berner et leur faire avaler l'illusion «d'une vie meilleure». Les gouvernés, eux, l'ont pris comme référence pour schématiser les avantages de l'indépendance et la construction de l'Etat selon leur vision personnelle, celle-ci bien éloignée du projet de société auquel ils n'ont jamais eu droit. Ces arrivistes qui nous gouvernent ont fait tout faux. En parallèle, beaucoup de citoyens acquièrent leurs droits par le fait de la corruption ou des systèmes «D» sans se soucier de s'enfoncer dans de terribles engrenages.

Pas de comités de quartiers où le citoyen a parole et droit de regard sur ce qui doit se faire comme «voulu» par les collectivités locales. Pas d'instances de recours dans toutes les institutions y compris dans la justice. Quand elles existent, elles ne sont que pures lubies. Les droits et les libertés continuent d'être monnayés au gré de sautes d'humeur de beaucoup d'entre ceux qui sont censés les garantir. On est loin de la démocratie participative dont le gouvernement vante les mérites alors qui ne l'a jamais exercée.