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Fruits, légumes, viandes : La surchauffe des prix au rendez-vous

par Yazid Alilat & J. Boukraâ

Surchauffe généralisée du panier de la ménagère en cette fin du mois d'août. Les prix des produits de consommation restent, en fait, sur des niveaux très hauts, autant les produits agricoles frais que manufacturés, les viandes blanches comme les viandes rouges, fièvre aphteuse ou pas.

Pour s'en convaincre, il suffit juste de tirer de sa poche un billet de 1.000 dinars et aller acheter du pain, du lait, une bouteille de jus d'un litre; cela juste après avoir passé par le marchand de légumes du coin avec l'achat de 2 kg de pommes de terre, un kg de laitue, un kg de tomates et, chez le boucher, une livre de viande bovine. Ceci pour dire que la hausse des prix des produits alimentaires de large consommation reste orientée à la hausse et se poursuit en fait depuis les mois de juin et de juillet, période qui a coïncidé cette année avec le mois de Ramadhan. En pleine saison de récolte des primeurs, dans les marchés d'Alger, la tomate reste accrochée aux 40-50 DA/kg, la pomme de terre à peu près la même tendance, parfois jusqu'à 60 DA/kg, les haricots verts dépassent en moyenne les 120 DA/kg, les haricots blancs sont hors de prix et atteignent dans les marchés à Alger et ses environs les 300 DA/kg, alors que les haricots rouges oscillent entre 100 et 140 DA/kg. Le panier de la ménagère flambe en réalité en cet été 2014 pourtant doux côté température par rapport aux autres saisons estivales. Les aubergines (60-70 DA/kg) et les poivrons (60-75 DA/kg), très consommés durant cette saison sont également largement au-dessus des niveaux de prix saisonniers. La laitue (la salade quoi !) atteint, elle, jusqu'à 70-80 DA/kg, alors que c'est pratiquement la pleine saison de production pour ce produit agricole très demandé. Au moins de juin dernier, les prix à la consommation avaient augmenté de 1,8%, selon l'Office national des statistiques, un rebond par rapport au mois de mai (0,3%). Les viandes restent généralement ?'hautes'', avec une moyenne de 1.200-1.400 DA/kg pour la viande ovine, et jusqu'à 1.800 dinars pour les parties nobles de la viande bovine, comme le foie, les entrecôtes, alors que le kilogramme, même en pleine campagne de lutte contre la fièvre aphteuse bovine, ne descend pas des 1.000 DA. Pour la dinde, les prix sont globalement scotchés dans les 700 DA/kg pour les escalopes, mais c'est un produit qui est moins demandé que le poulet qui se vend bien, avec des niveaux de prix oscillant entre 250 DA/kg (vif) et jusqu'à 300 DA/kg sans abats. Quant au poisson, il reste ce qu'il a toujours été: un produit de luxe en Algérie, et la sardine a fini par s'imposer dans la moyenne des 250 DA/kg, hélas ! Pas étonnant que les Algériens consomment moins de cinq kilogrammes de poisson par an, loin des minima de 12 kg fixés par la FAO. Malgré les assurances des responsables du secteur agricole et, surtout, du commerce, les prix des produits agricoles ne sont toujours pas assujettis à une mercuriale, à des règles commerciales reconnues et pratiquées par tous les éléments qui interviennent dans l'ensemble des maillons de la chaîne commerciale. Entre le producteur parfois obligé de vendre à perte ses produits, le mandataire qui rouspète sur le montant du loyer des carreaux et les détaillants, les prix évoluent souvent très vite, à une vitesse vertigineuse, au point où les fruits de saison, comme les raisins, se vendent en moyenne à plus de 120 DA/kg. De quoi susciter la colère des bas salaires. A Oran, c'est le paradoxe. Même les produits de saison ont connu une hausse, malgré la production abondante. Une petite virée au niveau de quelques marchés de la ville nous a permis de constater que les prix des fruits et légumes ont connu une hausse de 15 à 20% par rapport à la moyenne saisonnière.

En plein mois d'août où la production est censée répondre à la demande, la tomate est cédée entre 50 et 60 dinars le kilo, alors que durant le mois d'août 2013, son prix n'avait pas dépassé les 40 dinars. En outre, en moyenne, la pomme de terre est proposée à 65 dinars, la carotte à 60 dinars, le poivron entre 70 et 90, selon la qualité. Les autres légumes ont, pour leur part, connu une hausse moins importante, soit entre 5 et 10 DA au kilo. L'oignon a gagné 10 dinars pour atteindre les 35 DA. Les fruits sont également touchés par cette hausse. Les pommes sont à 250 DA le kilo, les bananes sont à 185 DA, alors qu'elles étaient entre 130 et 140 DA. Le raisin, par exemple, n'est pas cédé au-dessous des 100 dinars pour les qualités nobles comme le «cardinal» ou le «muscat» vendu lui entre 150 et 200 dinars le kilo, selon les sites de vente.

Les commerçants expliquent ces hausses par, notamment, le déséquilibre entre l'offre et la demande. «Les producteurs et certains intermédiaires ont recours au stockage des produits dans les entrepôts frigorifiques. Et en cette période estivale où la demande est très importante, les spéculateurs saisissent l'occasion, surtout que certains producteurs, qui n'ont pas de dépôts frigorifiques, ont perdu leur récoltes à cause de la canicule de ce mois d'août». Le manque d'infrastructures de stockage et l'insuffisance des marchés de proximité sont également des facteurs à l'origine de la hausse des prix des fruits et légumes.

Selon les derniers chiffres de l'ONS, l'indice des prix à la consommation de la ville d'Alger, un indice ensuite étendu à l'ensemble du territoire national, a augmenté au mois de juin 2014 de 1,8% par rapport au mois de mai contre 0,7% au mois de juin 2013. Cette surchauffe des produits de consommation s'explique, selon l'office, par la hausse des prix des biens alimentaires, qui ont bondi de 3,6%, dopés par un bond de 7,1% des produits agricoles frais. Les prix des produits alimentaires industriels accusent une croissance modérée de 0,4%. Ainsi, la surchauffe des produits agricoles frais est induite par la hausse de 12,00% des légumes et 15,1% des fruits, de 12,2% pour la volaille et près de 30,3% pour la seule pomme de terre. «Corrigé des variations saisonnières, l'indice des prix à la consommation accuse, pour ce mois de juin 2014, une hausse de 2,2% par rapport au mois écoulé», précise l'ONS dans sa note de conjoncture. Au mois de juin 2014 et par rapport au même mois de l'année 2013, la hausse des prix des produits à la consommation s'est établie à 2,8%, le rythme d'inflation annuel (juillet 2013 à juin 2014/ juillet 2012 à juin 2013) étant élevé, soit +1,5%, explique encore l'ONS. En 2013, le taux d'inflation annuel a atteint, officiellement, 3,3%, après avoir atteint une année auparavant les 8,9%. Le taux moyen escompté pour 2014 est de 3,5%.