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Poursuite des bombardements à Ghaza : Hamas décline une offre de trêve

par Yazid Alilat

Situation tendue hier mardi sur les fronts militaire et diplomatique au 8e jour de l'agression israélienne contre l'enclave palestinienne de Ghaza, le nombre de victimes ayant atteint 192 personnes tuées par les bombardements aériens et navals de l'armée israélienne. Fait nouveau mais aléatoire dans les efforts de la communauté internationale pour briser l'étau de cette agression militaire contre des populations civiles désarmées, une offre de trêve formulée par l'Egypte, soutenue par les Etats-Unis et la Ligue arabe, acceptée par Israël et rejetée par la branche militaire de Hamas. Réunis au Caire pour une réunion d'urgence, les ministres arabes des Affaires étrangères ont affirmé «demander à toutes les parties concernées d'accepter l'initiative égyptienne et de s'engager à en respecter les termes».

A l'ouverture de cette réunion du Caire, M. Arabi a accusé Israël de perpétrer des «crimes de guerre» et des «crimes contre l'Humanité» à Ghaza: «Israël bénéficie d'une immunité politique, il commet des crimes sans en être tenu responsable».

Le ministre palestinien des Affaires étrangères Riad al-Malki a ensuite affirmé que l'offensive aérienne sur Ghaza n'était «pas une guerre entre deux armées, ou contre le Hamas, mais une guerre contre le peuple palestinien tout entier et contre ses droits». Plus tôt dans la journée, l'institution panarabe avait appelé la communauté internationale à agir «par le biais de ses institutions légales et humanitaires pour protéger le peuple palestinien», faisant écho à la demande du président palestinien Mahmoud Abbas qui avait pressé dimanche l'ONU de placer officiellement l'Etat de Palestine «sous (son) système de protection internationale».

Le chef de la diplomatie algérienne Ramtane Lamamra a en fait dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas: Israël n'aurait jamais agressé le peuple palestinien s'il n'avait pas bénéficié de ?'l'impunité internationale''. Mais, juste avant le début de la réunion des chefs de la diplomatie de la Ligue arabe, le Caire a dévoilé une proposition de trêve.

L'initiative égyptienne prévoit un «arrêt total des hostilités aériennes, maritimes ou terrestres» et l'ouverture dans la foulée de négociations sur l'entrée des biens et des personnes dans l'enclave palestinienne sous blocus. L'Egypte propose d'accueillir sous 48 heures après l'entrée en vigueur de la trêve deux délégations palestinienne et israélienne pour ouvrir ces discussions indirectes.

ISRAËL ACCEPTE, HAMAS DECLINE

Après quelques hésitations, le cabinet de sécurité israélien a accepté mardi matin la proposition de trêve pour Ghaza présentée par l'Egypte, selon le porte-parole du Premier ministre Benjamin Netanyahu. «Le cabinet a décidé d'accepter l'initiative égyptienne pour un cessez-le-feu commençant à 09h00 locales», a-t-il ajouté. Selon la proposition égyptienne, la trêve devait entrer en vigueur à partir de 06h00 GMT mardi. La radio militaire israélienne a précisé que le feu vert du cabinet de sécurité, qui regroupe les principaux ministres, a été donné quelques minutes avant l'échéance. Mais, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a prévenu hier que si le Hamas rejetait la trêve proposée par l'Egypte et poursuivait ses tirs de roquettes, l'armée israélienne élargirait ses opérations dans la bande de Ghaza. De son côté, Hamas, qui contrôle Ghaza, a rejeté en bloc la proposition égyptienne. Hamas a écarté tout cessez-le-feu qui n'inclurait pas un accord complet sur le conflit avec Israël. Il exige l'arrêt des bombardements, la fin du blocus de Ghaza en place depuis 2006, l'ouverture du poste-frontière de Rafah avec l'Egypte et la libération des prisonniers arrêtés de nouveau après avoir été relâchés dans le cadre d'un accord d'échange contre le soldat israélien Gilad Shalit en 2011. «Un cessez-le-feu sans parvenir à un accord est exclu.

En temps de guerre, on ne cesse pas le feu pour ensuite négocier», a déclaré Fawzi Barhoum, un porte-parole du Hamas à Ghaza. Pour la branche militaire du Hamas, les Brigades Ezzedine al-Qassam, la proposition égyptienne est une «reddition» et il a menacé d'»intensifier» sa lutte contre Israël. Pour autant, les ?'politiques'' du Hamas sont divisés, et «les consultations se poursuivaient», selon un responsable de Hamas en Egypte. Reprise au ?'vol'', la proposition de trêve égyptienne a été saluée par les Etats-Unis, qui ont pressé le Hamas de l'accepter. «La proposition égyptienne d'un cessez-le-feu et des négociations est l'occasion de mettre fin à la violence et de ramener le calme», a déclaré le secrétaire d'Etat John Kerry. «Nous nous réjouissons de la décision du cabinet israélien d'accepter cette proposition. Nous encourageons vivement toutes les autres parties à l'accepter», a-t-il ajouté, mettant en garde, depuis Vienne, contre «de grands risques» d'escalade de la violence en Israël et dans la Bande de Ghaza. En milieu de journée hier, les bombardements contre la ville de Ghaza et les autres villages palestiniens, dont Khan Younès, avaient repris après un arrêt de 6 heures.

L'ONU «ATTERREE» PAR LES PERTES HUMAINES

A Ghaza, l'ampleur des destructions est immense, ce qui a choqué l'Agence des Nations unies pour l'aide aux réfugiés palestiniens (UNRWA), qui a déploré hier la destruction massive de bâtiments dans la bande de Ghaza. «Le niveau de pertes humaines et de destruction à Ghaza est vraiment immense», a déclaré un porte-parole de l'UNRWA, Sami Mshasha, lors d'un point presse de l'ONU à Genève. «Selon nos derniers chiffres, nous parlons de 174 personnes tuées et de plus de 1.100, blessées. Ces chiffres vont augmenter, ils augmentent d'heure en heure», a-t-il ajouté. «Un grand nombre de ces personnes sont des femmes et enfants», a-t-il déploré. Quelque 560 maisons ont été complètement détruites et des milliers de bâtiments, dont certains sont publics, ont été endommagés.

Sans cessez-le-feu, «nous risquons de voir une incursion militaire à Ghaza, ce qui est extrêmement préoccupant car nous savons que cela veut dire plus de morts, plus de destructions», a averti M. Mshasha. En outre, 17.000 personnes se sont réfugiées dans 20 écoles de l'UNRWA. Le CICR, de son côté, a attiré l'attention sur la destruction des installations d'AEP à Ghaza par l'aviation israélienne. «Des centaines de milliers de personnes à Ghaza sont maintenant sans eau. D'ici quelques jours, l'ensemble de la population de la bande de Ghaza risque de se retrouver à court d'eau», a indiqué dans un communiqué Jacques de Maio, chef de la délégation du CICR en Israël et dans les Territoires palestiniens.