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TLEMCEN: La poterie traditionnelle de la région de M'sirda à l'honneur

par Khaled Boumediene

À l'extrême nord-ouest de la wilaya de Tlemcen, M'sirda, cette terre charmeuse et envoûtante, a su préserver us et coutumes au fil des ans. Quiconque franchira les portes de ce vaste territoire où tout respire tranquillité et art du bien-vivre, ne pourra se lasser des beaux paysages naturels et des villages perchés sur les collines ou enfouis dans des vallées qui conservent aujourd'hui l'aspect général qu'ils avaient il y a plusieurs décennies. Des montagnes et des vallées cernées de champs d'oliviers, de l'odeur de lavande venant titiller le nez d'une âme enivrée par le soleil et un air marin. Dans les agglomérations de Bider, M'sirda Fouaga, M'sirda Thata, Arbouz (chef-lieu), Boukanoun, Sebabna, Ouled Bouyacoub, Zaouia Ouled Benyahia, El Hanach Poste Bourogba, Chaib Rasso, El Ayayat? de nombreuses femmes continuent à exécuter la poterie traditionnelle avec leurs mains expertes. Dans cette région proche de la frontière du Maroc l'argile est en abondance. Cette matière première est privilégiée, pour son faible coût et sa facilité de fabrication permettant de réaliser des objets en série. Pour défendre et préserver cette culture locale, transmise et améliorée de génération en génération, auprès des habitants comme des touristes, nombreuses sont celles, qui en tant que professionnelles des métiers d'art, se positionnent comme ambassadrices de l'Artisanat de cette région réputée pour sa contribution dans la poterie. Ces jours-ci, durant l'exposition de la poterie qui se déroule du 28 avril au 18 mai prochain au palais " Abdelkrim Dali " d'Imama, dans le cadre du mois du patrimoine, le public tlemcenien est resté bouche bée devant les œuvres réalisées par des artisanes qui se caractérisent par la maitrise du geste, d'un savoir-faire mêlant tradition et innovation, d'un travail de la matière, gage de qualité. Les visiteurs peuvent apprécier les divers matériaux et techniques utilisées : vases et récipients à usage essentiellement domestique ou culinaire en terre cuite poreuse qui peuvent demeurer bruts ou recevoir un revêtement de glaçure. Les potiers présents dévoilent leur passion pour la terre et répondent aux interrogations de chacun sur la fabrication, la matière utilisée et les techniques employées. Par de véritables œuvres d'art, les artisanes mettent leur talent en évidence. Selon une artisane de Bider qui a pris part au premier concours national de poterie qui s'est tenu en 2013 à Tipasa et emporté le premier prix dans le label création et innovation, " la fabrication d'une poterie commence par le mélange des terres argile, marne, et silice. Les matériaux sont malaxés, soit manuellement (foulage), soit mécaniquement. La pâte obtenue est conservée au repos (pourrissage) durant une période qui varie de quelques semaines à quelques mois. Il existe plusieurs techniques différentes pour donner au matériau la forme définitive désirée. Le modelage, qui est la mise en forme d'une boule de terre par la pression des doigts. L'estampage et le calibrage. La pâte malléable est placée dans un moule en rotation puis pressée contre les parois grâce à l'action d'un calibre introduit mécaniquement. Ensuite, le montage. Cette technique, relativement rapide, permet d'obtenir de très grandes pièces, de formes totalement libres. Les pièces réalisées par cette technique sont cependant lourdes. Elles peuvent être affinées en utilisant une planchette et un galet pour comprimer la terre et modeler la forme de la pièce. Le galet est positionné à l'intérieur de la pièce, au contact de la terre, et la planchette permet de marteler la paroi. Ensuite, le montage à la plaque. Des plaques de terre sont réalisées à l'aide d'un rouleau puis assemblées à la barbotine. Puis le tournage. Le tournage ne permet d'obtenir que des pièces de révolution, qui peuvent cependant être déformées avant séchage complet. Le moulage ou coulage. Dans le procédé de moulage, la terre n'est plus sous forme pâteuse, mais sous forme liquide par adjonction d'eau et de dé floculant. Ce mélange de poudre fine d'argile et d'eau se nomme barbotine. Pour la cuisson, les différentes pièces obtenues sont disposées dans un four. Les pièces peuvent être décorées au pinceau à l'aide d'oxydes métalliques, broyés et dilués, de différentes couleurs. Le biscuit ainsi décoré est trempé dans des bains d'émail. Une fois décorée et émaillée, la pièce subit une nouvelle cuisson ", expliquera-t-elle. A noter que des ateliers vivants et des animations avec des démonstrations autour du modelage de la terre sont proposés au cours de cet événement placé sous le slogan " le patrimoine culturel entre la connaissance et le savoir-faire à l'ère de la numérisation ".