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Le message des pauvres !

par Abdellatif Bousenane *

Parmi les chiffres publiés par la presse nationale indépendante, plutôt hostile au président en place, au lendemain des élections présidentielles du 17 avril passé qui ont particulièrement attiré mon attention : les taux de participation plus élevés dans les quartiers populaires que la moyenne.

Quel est le message que ces populations ont voulu passé ce jour là ? Je pense que ce message porte en lui deux nouvelles, une bonne et une mauvaise ! Commençant par la mauvaise nouvelle. Ce vote massif par des populations qui souffrent le plus dans notre pays, au bénéfice du président sortant, contient un message très politique au sens propre du terme. Le " petit peuple " a voté pour une personne, Bouteflika. Paradoxalement, Cette attachement des pauvre à leurs président, et très significatif d'une perception du peuple qui reste toujours négatif envers la représentation du pouvoir politique. On se souvient tous lors de la finale de la coupe d'Algérie du 2005 comment les jeunes des quartiers défavorisés de la capitale scandaient des slogans très hostiles au gouvernement en épargnant explicitement Bouteflika " HACHA BOUTEFLIKA ". Malgré qu'il y a 9 année qui nous sépare de cet événement, personne ne peut nier ou minimiser cet attachement d'une grande partie du peuple au président de la république seulemnt et non pas au pouvoir politique. Ce message , les decsideurs l'ont anticipé, ce qui explique le concensus au sein du la calsse diregeante sur la candidateure de Bouteflika . Le deuxième paradoxe, se résume dans le fait que les classes les plus défavorisées votent massivement pour l'homme qui incarnait la droite du Boumediénisme, ou l'aile libéral du FLN.

Néanmoins, notre président, ne doit pas se réjouir de ca, au contraire, le plus grand danger et le plus grand point faible du Bouteflikisme se représente dans l'incapacité à nouer une plus grande confiance entre le peuple et les institutions de l'état. Car l'homme est mortel et Bouteflika est un homme. Mais on ne sait jamais qui va mourir avant l'autre, la question de la mort est tellement mystérieuse.

Plus sérieusement, certes la reforme de la constitution est importante mais cette question de la confiance constitue, à mon sens, la première des priorités du prochain quinquennat. Instaurer la confiance entre le peuple et les institutions de l'état. Cela peut se faire par l'envoi des signaux très forts envers ces populations, par le renouvèlement progressif des cadres dirigeants, en choisissant les plus compétents, les plus jeunes et les plus intègres. Je sais ! C'est trop simpliste et idéaliste, mais, franchement, ca reste plausible. Dans n'import quelle organisation ou société, la qualité des hommes est primordiale. Inspirant nous des grandes multinationales capitalistes qui choisissent ses dirigeants parmi la crème, pas seulement de la population où elles sont installées mais la crème de la population mondiale. L'état aussi peut avoir cet esprit capitaliste dans le bon sens du terme. Parmi les signaux forts que le président peut, éventuellement, envoyer à son peuple, il y a aussi l'accélération de la réforme de la justice pour qu'on puisse ajuster un véritable état de droit où tous les citoyens sont égaux devant la loi. Donner plus d'indépendance au juge, plus de moyens humains et matériels à l'institution judiciaire, peut effectivement, constituer un signale très positive envers le peuple.

La deuxième nouvelle qui contient ce message du peuple dominé, la bonne en l'occurrence, c'est le fait qu'ils ont voté massivement pour la paix et la stabilité.

Beaucoup de gens parlent du volet sociétal de ce vote. Ce n'est pas péjoratif ni même méprisant d'ailleurs, le fait de dire que les retombés de la politique sociale mené par l'état en matière de logement sociale, emploi de jeune?etc. à participer dans l'orientation de ces populations vers ce choix. Dans cette perceptive, il existe une forte corrélation entre la baisse du chômage et la reélection des gouvernements et majorités en place dans, pratiquement, la plus part des pays du monde. Toutes les études sérieuses le démontrent, au moins en Europe. L'entourage du président français F. Holland, à titre d'exemple, évoque la non candidature de ce dernier si le chômage ne baisse pas d'ici 2017. Par conséquent, si on suit cette logique, le vote des pauvres chez nous confirme les chiffres de l'ONS sur la tendance baissière du chômage depuis une décennie. Mais cela ne représente pas, à mon avis, la vraie logique de ce vote massif.

Car, la vraie bonne nouvelle c'est que ces populations ont très bien compris que les moindres secousses ou dérapages c'est eux les premiers à en payer les frais. Pour la simple et bonne raison que les autres classes aisés ou/et dominantes sont très bien protégées. Cela révèle la grande maturité que ces populations pauvres ont acquise pendant des années. On peut noter, également, que le discours le plus violent, qui détient une sémantique de la " FITNA " vient, en générale, curieusement des classes les plus favorisées.

Cet indicateur est très significatif dans le sens où ces populations ont pris leurs responsabilités pour exprimer leurs refus, au moins, d'une situation de blocage ou d'une autre catastrophique, au pire. C'est une réponse très claire aux, medias, intellectuels et quelques cercles douteux qui ont déjà appelé aux révoltes des populations contres leurs gouverneurs, puis quand ça a tourné très mal, se sont tus d'une manière scandaleuse. L'exemple libyen est dans toutes les têtes. Nous avons vu comment on a détruit un état par des avions et des missiles et puis rien ! On n'en parle même pas. Silence absolue et criminel des ces mêmes médias et responsables de ce KO. Qui peut aujourd'hui, parmi ces droits de l'hommistes, journalistes et homme politiques, aller sauver le peuple libyen de sa souffrance ? Et bien, personne!

* Docteur en sociologie politique