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Pénurie de carburants : La version de Naftal

par Yazid Alilat

La crise du carburant a franchi un nouveau palier, ces derniers jours, à l'ouest du pays et notamment dans la wilaya d'Oran où beaucoup de stations-service sont à sec, n'en déplaise aux responsables du secteur avec leurs déclarations rassurantes.

La crise dans la capitale de l'ouest du pays est telle que l'essence est devenue une denrée rare, au moment où les autres régions de l'Ouest vivent une situation très pénible. Cette indigence de l'offre d'essence et de gasoil a provoqué des mouvements de panique chez les automobilistes, mais également les agriculteurs en pleine période de moissons-battages, les moissonneuses-batteuses consommant beaucoup de carburant (gazole), alors que les automobilistes se débrouillent comme ils peuvent, allant jusqu'à faire des centaines de kilomètres pour remplir leur réservoir. Selon les dernières informations, presque toutes les wilayas de l'Ouest sont au Rouge. Une situation anachronique, avec des sit-in de protestation, qui ont été organisés à Tlemcen pour dénoncer le trafic de carburants algériens vers le Maroc, une des principales raisons de cette absence de carburants dans les stations-service.

Au centre du pays, la crise commence à apparaître, notamment à Alger, où certaines stations n'ont plus de ?'sans plomb'', ni du gazole. Les chaînes sont visibles dans d'autres stations-service.

Loin des désagréments de cette énième crise des carburants dans l'Oranie, le P-DG de Naftal rassure, sans vraiment convaincre. Dans une déclaration à l'APS' hier, M. Said Akretche a indiqué que son entreprise a augmenté, ces derniers jours, ses approvisionnements pour répondre à la forte demande des citoyens en carburants, en cette période estivale. «Naftal, a-t-il dit, a déployé tous les moyens matériels et humains nécessaires pour répondre à la forte demande en augmentant ses approvisionnements de plus de 20% d'une manière générale, et de plus de 100% dans les stations-service les plus sollicitées». Il a également souligné qu'une très forte demande s'est exprimée, ces derniers jours, ?'particulièrement à l'ouest du pays où les stations-service ont enregistré une affluence considérable''. Selon les explications du P-DG de Naftal, cette situation «ubuesque» est le résultat de plusieurs facteurs dont «la fin de la période scolaire, le début de la saison estivale et l'approche du Ramadhan, ainsi que la forte affluence des agriculteurs en cette période de moissons-battages».

Une chose est sûre: la carence de Naftal dans la situation de pénurie, inquiétante autant pour les usages domestiques qu'industriels et agricoles, est entière, d'autant que ce phénomène est devenu récurrent dans la région, depuis quelques années. Le responsable est, également vite désigné: les hallaba qui pompent le carburant algérien pour le vendre, grassement, sur le marché parallèle marocain. A Tlemcen, une pétition mise en ligne sur le réseau social ?Facebook' a appelé les citoyens de la région à protester contre le trafic de carburant.

«Nous, habitants de la wilaya de Tlemcen, considérons que la contrebande institutionnalisée de carburants, à destination du Maroc, a assez duré. En signant cette pétition, nous demandons aux pouvoirs publics de prendre des mesures draconiennes pour mettre fin à ce commerce frauduleux, qui perturbe considérablement la vie des habitants de la région.»

Les signataires exigent également que le wali de Tlemcen revienne sur un arrêté qu'il a signé récemment, ordonnant le plafonnement des ventes de carburant pour les véhicules utilitaires à 500 DA et à 2.000 DA pour les camions. Le trafic d'essence à destination du Maroc est important, selon des chiffres avancés par le ministre marocain de l'Economie et des Finances Nizar Baraka: du 1er janvier à fin mai 2013, près de 1,63 million de litres d'essence de contrebande, en provenance d'Algérie, ont été saisis, contre 1,281 million de litres durant la même période de l'année 2012, alors que 1.120 véhicules utilisés pour le transport du carburant de contrebande ont été également saisis, contre 1.263 véhicules à fin mai 2012.

Pour autant, ce trafic très lucratif pour les réseaux de contrebande transfrontalière, justifie t-il, à lui seul, qu'à chaque été et en hiver toute la région ouest et une partie du centre du pays souffrent du manque de carburant dans un pays pétrolier ?