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Souk Ahras : l'économie locale se cherche une filière touristique

par Farouk Djouadi

L'absence d'infrastructures hôtelières en montre la difficulté mais la wilaya de Souk Ahras compte bien jouer sur son potentiel touristique dans l'avenir. Cinq zones d'extension touristiques ont été approuvées, trois hôtels sont en projets. Et Sonatrach envisage un centre sportif en altitude. Les ruines de l'antique Taghaste n'ont qu'à bien se tenir. En attendant l'économie locale a très peu à offrir aux jeunes.

L'arrivée en cette fin de septembre d'un groupe de touristes a éveillé la curiosité de gens de Souk Ahras. L'antique Thagaste n'a pas l'habitude de voir souvent des visiteurs, munis d'appareils photo, arpenter ses artères. «On reçoit à peine quelques dizaines de vieux pèlerins chrétiens par an, qui viennent ici se recueillir auprès de l'olivier de Saint Augustin», explique le gardien du site abritant l'arbre millénaire. Les récits historiques rapportent que l'auteur des «Confessions» médita, il y a 17 siècles de ça, sous cet olivier qui affiche, aujourd'hui encore, une indicible volonté de rester en vie. Souk Ahras ne dispose pas d'infrastructures hôtelières pour accueillir des touristes. Pourtant, la région recèle un potentiel touristique indéniable dont Madaure, la ville antique qui garde à ce jour les vestiges de l'une des universités les plus anciennes au monde. «Notre wilaya sert de transit car nous ne disposons pas d'infrastructures hôtelières dignes de ce nom», indique le wali de Souk Ahras, M. Saad Agoudjil. Les visiteurs de Souk Ahras, qui signifie (marché des lions), se dirigent généralement vers Guelma ou Annaba pour passer la nuit. La ville dispose actuellement de deux hôtels classés, dont l'un est fermé pour cause de litiges entre les héritiers. Le second hôtel, en réhabilitation, fonctionne à 20 % de ses capacités. Cette wilaya frontalière avec la Tunisie aspire désormais à drainer des investisseurs à la faveur des dispositions de la loi de finances complémentaire de 2010. «Avant c'était difficile car il fallait passer par l'adjudication pour octroyer du foncier. Maintenant la LFC 2010 nous autorise à accorder des terrains aux investisseurs par voie de gré à gré», explique le wali à la délégation de journalistes venus à Souk Ahras dans le cadre de l'eductour organisé par l'ONT (Office national du Tourisme).

Sonatrach et trois investisseurs

La wilaya de Souk Ahras a demandé sept ZET (Zones d'expansion touristiques), selon son directeur du tourisme, Zoubir Boukaabach. Cinq ont été approuvées par le gouvernement. Il s'agit des zones de Madaure (264 ha) dans la commune de M'daourouch, Betoum (320 ha) dans la commune de Taoura, El Maghassel (400 ha) dans la commune de Mechrouha, Lefhiss (30 ha) et El Ma Lahmar (178 ha), dans la commune de Aïn Zana. Le directeur du tourisme a indiqué que Sonatrach prévoit de créer un complexe sportif dans la ZET de Aïn Zana, une région forestière sise à plus de 1000 mètres d'altitude. Les travaux d'aménagement qui devraient se faire à la charge des autorités locales n'ont pas encore commencé. «Nous attendons la publication des décrets exécutifs qui devrait intervenir en décembre prochain», explique le directeur du tourisme de la wilaya. Les travaux devraient, selon ses prévisions, commencer en début de l'année prochain. Trois investisseurs ont déjà déposé leurs dossiers pour réaliser des hôtels. «Nous sommes en phase de démarrage. Nous n'allons pas exiger des hôtels classés, mais juste des infrastructures qui assurent des prestations correctes», estime Boukaabache. La réception des premiers hôtels est attendue à la fin de 2014.

Le sésame de l'Ansej : «aucune chance»

En attendant la concrétisation de ces projets touristiques, les jeunes de cette wilaya se plaignent du chômage et de la corruption. «Ça fait deux ans que je travaille dans le cadre du pré-emploi mais on refuse toujours de me titulariser», confie Adel. Ce jeune de trente ans n'a pas cessé de demander un crédit dans le cadre de l'Ansej. «Je n'ai aucune chance. Il faut avoir de solides connaissances pour décrocher un crédit». Un constat partagé par Mohamed, professeur au centre universitaire de Souk Ahras : «La corruption et les passe-droits sont favorisés par le grand nombre de demandes déposées au niveau de l'Anem (agence de l'emploi) et de l'Ansej.» Les jeunes de Souk Ahras arrivent cependant à se débrouiller et à tirer avantage de la position géographique de leur wilaya. «Beaucoup de jeunes travaillent dans la contrebande sur la frontière avec la Tunisie et arrivent à gagner beaucoup plus que les fonctionnaires», explique l'universitaire. La morosité qui caractérise la ville natale de Saint Augustin n'est pas généralisée. Bilal, un jeune infographe de 28 ans a réussi à monter avec ses propres moyens, une boîte de communication qu'il a baptisée Loux Madi. «Je n'ai pas assez de marchés vu l'inexistence d'une réelle activité économique à Souk Ahras, mais j'arrive quand même à couvrir mes frais et surtout à m'occuper.», dit-il souriant. En plus de l'infographie, Bilel fait dans le bénévolat et consacre une partie de son temps à l'association caritative Ness El-Khir (les gens du bien).