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Ça krache, ça liquide, ça brade !Panique générale sur les places boursières

par Salem Ferdi

La perte de confiance était manifestement totale hier sur l'ensemble des places boursières mondiales où l'on soldait et bradait à tout va. Les fondamentaux des économies américaine et européennes sont mauvais et, pour une fois, ce n'est pas une clause de style : le monde tremble. Panique générale dans les Bourses.

Les Etats-Unis, c'est un quart de l'économie mondiale, l'Europe compte pour un tiers. Or, les deux économies sont en panne de croissance. Les Etats-Unis sont en risque de récession et en Europe, la crise de la dette menace de s'étendre. La dégradation de la dette souveraine américaine par l'agence Standard & Poor's aura ajouté un peu plus au climat de peur générale qui gagne les marchés.

Depuis au moins une dizaine de jours, les marchés boursiers connaissaient un krach rampant. Les Bourses ont perdu entre 15 et 20% de leur valeur en dix jours, ce qui est énorme. Le krach de 1929 avait connu une perte de 30% en deux jours. Dans la crainte générale, les investisseurs bradent et liquident les positions, faisant craindre aux spécialistes un krach en bonne et due forme. Certains affirment que c'est déjà le krach. La crise financière de 2008 a échaudé les investisseurs (Hedge Funds, multinationales, banques, gestionnaires de fortunes, fonds souverains?) qui deviennent sensibles à toutes les mauvaises nouvelles et liquident sans hésitation dans l'idée de sauver les meubles. Et en matière de mauvaises nouvelles, ils ont été bien servis par l'état des économies américaine et européennes.

Chris Weston, un financier dans un cabinet d'affaires australien, se désole de voir les détenteurs de titres « agir dans l'émotion au lieu de regarder la situation de manière générale. C'est une panique générale ». Les marchés étaient très volatils au niveau de l'ensemble des Bourses. En Asie, la situation était proche de la catastrophe : la Bourse de Séoul a chuté de 10% en séance, avant de se reprendre et de limiter les dégâts à - 3,64%, - 5,66% à Hong Kong, - 1,68%... Seule Sidney a gagné 1,2% car certains ont profité de la braderie pour faire de « bonnes affaires ». Lundi, Wall Street a connu sa plus mauvaise séance depuis décembre 2008 et a perdu 5,55%.

«Tout le monde est tétanisé»

« Tout le monde est tétanisé», a déclaré François Duhen, analyste chez Crédit Mutuel-CIC à Paris. «On s'inquiète de l'Amérique, de l'Europe, de la manière dont leurs difficultés actuelles vont ralentir la croissance». Les marchés étaient en attente d'une réunion de la Réserve fédérale américaine qui pourrait décider d'injecter des liquidités pour soutenir l'économie. Lundi, Barack Obama a essayé, sans réussir, de rassurer les marchés après l'abaissement de la note de la dette souveraine américaine. Le patron de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet, s'est dit plus inquiet par les dettes publiques des pays européens que par celle des Etats-Unis. « C'est la crise la plus grave depuis la Deuxième Guerre mondiale. Ce qu'il faut, c'est rétablir la confiance, une confiance qui a été entamée », a-t-il déclaré mardi matin, en appelant les gouvernements à s'engager à réduire leur dette. Les États membres de la zone euro accélèrent la réduction de leurs déficits. La décision de la BCE d'acheter des obligations des Etats paraît sans effet non plus. La récession économique devient une perspective forte et inquiétante.

Une «grosse guerre» pour relancer la machine ?

«Devant le marasme de l'économie, les particuliers et les entreprises cachent leur argent et se tiennent à l'écart de la dette, ce qui a pour conséquence une consommation et une croissance de l'investissement anémiques», explique le Wall Street Journal, qui souligne que face à la crise des subprimes en 2008, la solution était simple: interventionnisme, mise à disposition de liquidités, des taux d'intérêt bas. Aujourd'hui, estime-t-il, cette réponse n'est pas possible car le problème n'est pas « le manque de liquidités mais un manque de confiance». Pour un pays comme l'Algérie, une récession se traduirait probablement par une baisse des prix du pétrole et un renchérissement des importations. Sauf si les producteurs décident de baisser la production pour éviter une chute des cours. Mais dans le cas d'un krach brutal, la crainte, toujours légitime, d'une tentative de relance de la machine par une grosse guerre est toujours présente. L'Afghanistan, l'Irak ne suffisant plus, l'Iran, « oublié» en raison du printemps arabe, pourrait reprendre les devants de la scène médiatique?