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Il n'y a pas de bulle mettant l'Algérie à l'abri

par Kharroubi Habib

Ce n'est pas parce qu'elle dispose d'un épais matelas de réserves de change que l'Algérie serait à l'abri des ondes de choc de la crise des dettes publiques qui est en train de mettre à mal les santés économique et financière des géants de ce point de vue que sont les Etats-Unis et l'Union européenne et, par un phénomène imparable de contagion, celles du reste de la planète.

 Nos autorités politiques et nos argentiers ont tenté de nous vendre cette thèse en 2008, lorsque le monde s'est trouvé confronté à la crise financière générée par celle dite des « subprimes », née en Amérique, et dont le monde entier a subi les désastreux impacts. Leurs discours et assurances ont été infirmés puisque l'Algérie a, du fait de cette crise, elle aussi payé un lourd tribut sous la forme d'une contraction conséquente de ses rentrées financières et d'une augmentation de l'enveloppe de ses importations, qui l'a été tout autant. Certes, grâce aux réserves dont il disposait, le pays a été dans une situation beaucoup moins gravissime momentanément que celles qu'ont vécues d'autres plus démunis. Au prix de quelques mesures d'austérité et d'élagage dans les dépenses publiques programmées, alors que la crise financière internationale n'était pas encore en vue, les autorités ont amorti l'impact des effets de celle-ci sur le pays.

 On voudrait croire qu'instruites par le précédent de 2008, ces autorités ne s'emploieront pas, dans le contexte de cette nouvelle crise financière qui est en train de balayer le monde, à nous bercer de la fausse assurance que le pays n'a rien à redouter de ses conséquences. Cette fois encore, le matelas des réserves leur permettra de voir venir. Sauf que cette protection que son matelas financier donne au pays pour un temps atteindra inéluctablement ses limites, si la crise à l'œuvre s'avère impossible à être surmontée rapidement par les Etats et entités qui en sont touchés.

 Selon les experts, cette crise menace de récession les plus grandes puissances économiques de la planète, laquelle impactera négativement les cours des matières premières, dont celui des hydrocarbures, et relancera la spirale inflationniste sous l'effet du rétrécissement des offres et de la chute du taux de change du dollar, principale devise sur les marchés internationaux. Si ces trois menaces se concrétisent et surtout s'installent dans la durée, il est évident que le matelas financier de l'Algérie sera vite épuisé.

 Car l'Algérie n'a pas d'autre alternative dans ces sortes de coups durs que de puiser dans ses réserves pour faire face. C'est en cela que la gouvernance du pays a failli. Une gouvernance qui a été incapable de mettre en œuvre une stratégie de développement national basée pour l'essentiel sur le «compter sur soi» et l'objectif de sortir la nation de sa dépendance de l'argent de ses hydrocarbures et de l'importation pour couvrir les besoins primordiaux de la population.

 Dans cette crise dont les effets ne vont pas tarder à affecter l'Algérie, le pouvoir politique et les argentiers du pays vont être contraints, à plus ou moins brève échéance, de décréter des mesures d'austérité budgétaires et mettre un terme aux largesses financières qu'ils répandent pour endiguer le mouvement social qui agite le pays et dans l'espoir de le détourner de la contestation politique du régime et du système.

 Mais cette révision, qui, dans le principe, s'impose eu égard au danger auquel l'Algérie risque d'être confrontée, pourrait être le déclencheur de la crise interne que la fuite en avant à laquelle se sont adonnées les autorités en utilisant sans compter l'argent public, n'a fait que différer.