La magie
des papillons ! Peut-on facilement la définir ? Tient-elle à l'éclat de leurs
couleurs, au charme de leurs ailes qui voltigent, en brassant l'air, de façon
irrégulière ? Est-elle due à l'infinie variété de motifs enchanteurs ornant ces
fragiles créatures qui, après avoir été chenilles, puis chrysalides, revêtent
leur belle parure nuptiale pour les derniers jours, ou plutôt les dernières
semaines de leur existence ? Quand on observe bien un papillon, on y découvre
toute la fragilité de la vie, faite de patience, de beauté et de mouvements. Un
papillon n'est-il pas après tout synonyme de légèreté, de liberté ? Un grand
écrivain classique s'est-il un jour étonné du fait que c'est la plume d'une
colombe, et non pas l'aile d'un papillon qui est attachée au métier de
l'écriture ! Pour lui, aucun être vivant n'a le pouvoir évocateur de la poésie
comme un papillon qui survole une prairie et atterrit tel un hôte heureux sur
les corolles de ses roses, en quête d'une nouvelle brise, d'un nouvel espace de
vie. En effet, le survol de ce dernier n'est pas une simple promenade dans un
jardin, mais une prospection de ses roses. Il s'unit parfois avec chacune
d'elles avec tant de douceur et de délicatesse qu'on a l'impression, la rosée
matinale ayant léché et presque forgé le moule de leurs corps, de voir deux
insectes étroitement enlacés dans la nature. C'est comme s'ils dialoguaient
entre eux en privé, dans l'intimité. Un dialogue de cœur qui ressemble à celui qu'entretient le poète avec son âme, durant ses moments de
solitude et d'inspiration, une fois la nuit tombée.
Dans les
choses où le cœur n'est pas, disait un jour Jules Barbey
d'Aurevilly, la tête ou la main n'est jamais
puissante ! Si la joie du papillon ne prend vraiment corps que lorsqu'il se lie
d'amitié avec les roses, celle du poète dépend de son immersion dans le monde
de l'esprit, du cœur, des mots. Ne dit-on pas d'ailleurs qu'il n'est de poésie
que dans la communion, la vivacité et l'intimité des émotions ? Décidément !