Les Libyens veulent nous faire la guerre. Les Irakiens nous
reprochent des chants de spectateurs et crachent sur notre histoire. Les
Egyptiens n'ont toujours pas oublié Oum Dourman. Les
Marocains nous refourguent leur kif en kit. Les Tunisiens ne nous portent plus
dans leur cœur depuis que les touristes occidentaux sont de retour sous leur
soleil. Les Saoudiens veulent nous interdire la Mecque. Les Qataris cherchent
toujours à nous exporter leurs terroristes. Les Turcs veulent nous recoloniser.
Les Français nous détestent. Les Espagnols nous détestent. Les Italiens nous
détestent. Les Allemands nous détestent. Les Américains, eux, ne nous
connaissent même pas. Et le pire c'est qu'on ne se supporte pas entre nous, on
se déteste, on s'ignore, on veut se faire la guerre, on crache sur nos martyrs,
on ne se porte plus dans nos cœurs dès que la main d'Alger vous a adoubé, on
croit toujours qu'Oum Dourman est une bataille gagnée
contre Israël, on importe tous les travers du monde et on véhicule cet esprit
d'éternel colonisé. Les Algériens, ces êtres venus d'ailleurs, une race à part
dans le cosmos, un génome particulier qui désespère de l'universalité. On est
venu jusqu'à se demander où se trouve notre identité, où commence l'Algérien et
où finit l'humanité ? Alors que la diversité culturelle doit nous rendre plus
forts, plus réceptifs à l'autre, plus ouverts sur le monde extérieur, on passe
notre temps à s'insulter sur son accent, sa langue natale ou ses origines
ethniques. Il se trouvera encore et toujours des imbéciles et des irresponsables
criminels qui remettent en cause l'unité de ce pays, appelant à la haine de
l'autre parce qu'il parle kabyle, chaoui, tergui ou arabe. Il existera encore et toujours cette
engeance perfide qui insulte l'autre, lui crache à la figure parce que son nom
est différent, la couleur de sa peau est plus foncée que la peau de vache qui
l'invective. On est encore à se demander «chkoun hna ?» comme si c'est un cadeau, aujourd'hui, d'avoir un
passeport algérien dans ce monde qui nous veut beaucoup de bien. On est un pays
qui mange ses propres enfants puis les recrache dans la Méditerranée. On est un
pays où la corruption est presque naturelle et les lanceurs d'alerte, une
espèce à exterminer. On est un pays où le riche devient plus riche et le pauvre
creuse pour s'enterrer dans la dignité, si dignité peut. On est dans un pays où
un nom devient un CV et où les compétences sont chassées ailleurs. On est dans
un pays dont on ne sait même pas qui le gouverne et où tout le monde parle au
nom de celui qui ne parle plus. On est dans un pays où la loi existe mais la
justice a pris le large avec les milliers de harraga
qui ont fui ce pays. On est dans un pays où le plus méritant est celui qui se
prosterne le plus. On est dans un pays où?