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Le pouvoir et la boule de cristal

par Mahdi Boukhalfa

Hier, le siège du FNA à Alger était fermé. Le petit immeuble, bien encastré dans la rue Tanger, qui devient à midi la ?'rue Manger'', était fermé, avec des affiches collées sur la porte, en arabe. Elles vantaient le pouvoir du peuple dans la conduite des affaires de l'Etat, globalement. En filigrane, on comprend que le président du parti est en colère et ne démord pas après la publication des résultats des législatives du 4 mai. Il est, paraît-il, en grève de la faim. Dans le camp de l'opposition, on continue à rejeter en bloc, en détail et en gros, le verdict des urnes. Certains parmi ces partis, en particulier ceux qui ont appelé au boycott, parlent aujourd'hui de ?'l'avant et l'après-4 mai 2017'', comme s'il s'agissait d'une date historique pour les Algériens, un moment marquant de leur histoire, eux qui ne sont pas partis voter et regardaient de loin les chefs de parti s'entredéchirer pour quelques ?'koursi'' de plus. Pour d'autres leaders politiques, l'armée a voté ?'blanc''. C'est l'avis de Louisa Hanoune qui fait plein d'éloges à l'armée, dont les éléments auraient, selon elle, voté ?'blanc''. Comment le sait-elle ? Les bulletins de vote ne sont-ils pas ?'anonymes'' une fois dans l'urne ? Une affirmation pareille aurait sûrement mérité des talk-shows ailleurs dans le monde, tellement l'affirmation de Hanoune est inouïe et sujette à débat sur les surdoués. A moins qu'elle n'ait été dans la tête des militaires qui ont voté, comme une vraie télépathe, son affirmation dans la presse nationale est étonnante. L'opinion publique est-elle pour autant sensible à ces sorties médiatiques, qui font sourire plus d'un ? Non, bien évidemment, car les débats politiques en Algérie sont tellement bas, tellement médiocres qu'il y a longtemps que le désert s'est installé de ce côté-ci de la vie partisane dans notre pays. Les Algériens regardent avec incrédulité ces comportements fantasques de chefs de partis politiques, qui, s'ils ne s'attendrissent pas à longueur d'année sur leur sort, ne cassent pas de sucre sur le dos du pouvoir, offrent dans l'autre partie de l'année un spectacle ridicule sur le paysage politique national. Autant les partis dits proches du pouvoir qui, avec désinvolture, dégoûtent les électeurs avec leurs promesses ?'venteuses et creuses'' d'avant les élections, autant les partis de l'opposition s'engluent dans des positions attentistes et n'offrent aucune solution de changement, aucune proposition sérieuse et crédible de sortie de crise, d'alternative politique au ?'multipartisme à sens unique'', qui sévit en Algérie. Et c'est tout naturellement que les Algériens, depuis très, très longtemps, en fait depuis l'indépendance, ont toujours pensé que les nouveaux arrivants, au Parlement ou au gouvernement, ?'ne feront rien. Ils sont tous les mêmes''. Qu'ils ont toujours été menés en bateau. Le FLN se succède à lui-même, le RND également depuis les années 2000, les autres partis politiques ne sont là que pour jouer aux opposants, mais les vrais maîtres du jeu sont ailleurs. Et, au final, ?'c'est toujours le FLN qui gagne'', ?'ils sont tous les mêmes'', sont, entre autres, les affirmations du terroir politique de chez nous. A bien des égards, les élections législatives qui viennent de se dérouler en ce mois de mai 2017, ne sont en rien différentes de celles organisées jusque-là, pour les Algériens: on prend les mêmes et on recommence. Même le gouvernement ne sera pas, paraît-il, complètement chamboulé, avec beaucoup de ministres qui vont rempiler. On dit même que Sellal, qui conduit les tractations pour la formation du prochain gouvernement, est partant lui aussi pour se succéder à lui-même. Vrai ? Faux ? Intox de l'opposition ? Attendons pour mieux voir, même si certains leaders de parti, qui ont, eux, une boule de cristal, sont en colère, car n'étant pas ?'ministrables''. On dit même que certains parlementaires refusent de quitter leurs bureaux, actuellement en ?'rénovation'' à grands frais pour accueillir les nouveaux locataires. Intox, là aussi ?