Quoique
solitaires et éparpillées, un peu partout, dans la voûte céleste, les étoiles
s'approprient vite la place laissée vacante par le soleil, en formant
discrètement un orchestre de lumières qui attirent les regards, les éclairent,
les fascinent, les enivrent..., les habitent. Une sorte de chapelet d'îles
aussi fantastiques que solidaires, au milieu du grand bleu, inspirant poètes et
créateurs de tous bords. Beaucoup d'entre ces derniers tombent, d'ailleurs, le
plus souvent, sous leur charme, en veillant des nuits durant, insomniaques. Et
nombreux sont ceux d'entre nous qui retrouvaient, aussi, du réconfort, juste en
les admirant un instant, puis, ne s'en sont jamais plus rassasiés depuis.
Ainsi les
étoiles deviennent-elles comme de «la drogue douce» ou plutôt des aimants
voraces qui ne libèrent point ceux qui s'y habituent. «Ya n'djoum
e'lil mâa'koum sahran» (laissez-moi, ô étoiles de nuit, veiller avec
vous), chantait, il y a des lustres Cheikh Hasnaoui
pour évoquer cette consolation, unique en son genre, qu'apporte la présence des
étoiles à quiconque se sentant atteint par la solitude ou la nostalgie, loin de
son pays ou des siens. Une étoile est, à n'en point douter, un horizon ouvert
aux embruns de l'imaginaire et de l'inspiration, sinon un radeau qui mène à une
nouvelle espérance. Un berceau du calme et de la bonne compagnie aussi. Mais
d'où celle-ci puise-t-elle cette force d'attraction sur les humains?
Et puis, comment arrive-t-elle à inspirer tant de gens?
Enfant, il m'est arrivé d'entendre ma mère dire que les flocons de neige ne
tombent que durant la nuit parce que celle-ci, m'expliquait-t-elle naïve, est
timide et seule la nuit sait lui sourire pour l'inviter à habiller la terre de
son manteau blanc. Il en est, probablement, de même pour ces milliers d'étoiles
qui tissent ce lien indéfectible de connivence avec le noir, ne brillant qu'au
moment où la lumière du soleil disparaît dans un déclin vertigineux. Une étoile
est toujours synonyme de vie et de mouvement. De révolte et de résistance.
Pouvons-nous imaginer, à titre d'exemple, Kateb Yacine sans sa «Nedjma» (l'étoile) qui aurait constitué le cœur palpitant
de son œuvre ? Et que serait le dramaturge espagnol Federico García Lorca sans
cette lune étoilée qui occupait la plupart de ses pièces de théâtre et de ses
poèmes ? Rien ! C'est que pour l'un, comme pour l'autre, la géométrie spatiale
est ce paradis poétique où les sens sont en éveil, les rêves foisonnants, la
vision claire, l'imagination fluide..., la résistance possible. Non seulement
les étoiles nous éclairent mais, aussi, elles nous écoutent, nous soulagent et
nous poussent à relever les défis de la vie, quand le soleil du jour nous
tourne le dos et déplace ailleurs ses rayons! Ultime
refuge contre l'indifférence du monde, son incompréhension... sa méchanceté.