Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Les Rohingyas face à un carnage à huis clos !

par Kamal Guerroua

Affligeant de constater que les faiseurs d'opinion, au niveau mondial, recourent souvent au principe de «deux poids, deux mesures» quand il s'agit de peuples et de minorités ethniques «politiquement» faibles! Sinon, comment expliquer ce silence pesant de la Communauté internationale et des médias occidentaux, en particulier, sur le carnage, à ciel ouvert, dont est victime la minorité musulmane «Rohingya», en Birmanie et leur consternation, en même temps, suite à la persécution des chrétiens d'Orient, par le fameux Etat islamique (Daech)? Et pourtant, le malheur des deux populations respectives s'inscrit dans le même registre, d'extermination des minorités. En outre, si les chrétiens ont toujours bénéficié en Orient de la protection du nationalisme arabe, puis de celle des régimes dictatoriaux, alliés des puissances occidentales, les Rohingyas n'ont eu droit, eux, qu'au black-out médiatique, hélas!

Originaires du Bengale (Inde et Bangladesh), ces derniers furent poussés, pour rappel, dès le XIX siècle par l'Empire britannique, vers la Birmanie où ils se sont exposés, malgré le caractère multi-ethnique de l'Etat d'accueil, au racisme ainsi qu'à la violence des ethnies bouddhistes majoritaires.

Célèbre pour ses exactions de masse, la dictature des militaires en a même fait d'eux, des boucs-émissaires. La situation s'est dégradée, encore plus, en 2012 en dépit des assurances de Sun Suu Kyi, l'ancienne opposante démocrate, devenue Premier ministre, dans un gouvernement d'ouverture qui opte pour la réconciliation nationale. A en croire deux responsables de l'ONU, auprès des réfugiés au Bangladesh, plus de 1.000 de personnes, appartenant à cette minorité, pourraient avoir été tuées, depuis octobre dernier. Les deux humanitaires tirent la sonnette d'alarme jugeant d'atroces les violences survenues dans l'Etat de Rakhine, situé dans le nord-ouest du pays.

Ils redoutent même que le chiffre donné ait été sous-évalué par les organismes humanitaires internationaux. D'autant que des vidéos récentes, d'une rare cruauté, font encore le tour des réseaux sociaux. Ce qui est préoccupant est que le lot des réfugiés ayant réussi à rejoindre le Bangladesh voisin qui abritait, déjà, environ 70. 000 Rohingyas, n'est composé que de femmes et d'enfants. Ce qui laisse dire aux observateurs que les hommes ont été, massivement, exécutés. L'armée birmane les a pris, semble-t-il, pour cible parce qu'elle les considère comme une menace à le stabilité nationale. Ainsi le haut commissariat pour les droits de l'Homme, aurait-il souligné dans un rapport publié, il y a plus d'une semaine que les Rohingyas sont victimes d'une «politique de terreur calculée», impliquant viols, meurtres de masse et persécutions. Le gouvernement birman qui aurait nié, jusque-là, toutes les accusations portées à son encontre a été obligé d'ouvrir, enfin, une enquête sur ce dossier. Serait-ce alors la fin d'un génocide ethnique à huis-clos?